Un mois après sa formation, le premier gouvernement Babiš démissionne
Le gouvernement minoritaire d’Andrej Babiš, formé en décembre de membres affiliés à son parti ANO, a accepté ce mercredi matin le principe de sa démission. La veille, comme cela était attendu, la Chambre des députés a refusé de lui accorder la confiance. Face à ce « fiasco », selon les mots de l’opposition, Andrej Babiš va désormais devoir négocier pour former une coalition gouvernementale…
Dès la nomination de son gouvernement minoritaire composé de quatorze ministres, le 13 décembre dernier, l’affaire semblait en fait entendue : il n’obtiendrait pas la confiance à la Chambre des députés. Mercredi, c’est précisément ce qui s’est produit. Seuls les 78 députés que compte le mouvement ANO ont voté la confiance. Les 117 parlementaires des autres formations se sont tous prononcés contre, tandis que cinq élus étaient aux abonnés absents. Tout ce temps perdu laisse un goût amer à l’opposition. Le leader du parti civique-démocrate ODS, Petr Fiala, parle « d’échec » et de « fiasco ». Du côté du parti conservateur TOP 09, la députée Markéta Pekarová Adamová est tout aussi sévère :
« Depuis l’élection, ce sont des semaines, presque trois mois, que nous avons passés en vain avec une situation qui a traîné dans le temps tout à fait inutilement. La République tchèque n’a pas de gouvernement disposant de la confiance des députés. On peut donc considérer que toutes les décisions qu’il prendra ne sont pas légitimes et qu’il devrait se garder d’en prendre de sérieuses. »
Car, en attendant la nomination d’un nouveau gouvernement, le cabinet de M. Babiš est bien aux affaires. Ce mercredi matin, il a par exemple annoncé que la Tchéquie ne se joindrait pas à la plainte de la Pologne contre l’UE sur la pollution ou bien qu’une position neutre avait été adoptée vis-à-vis de la proposition de loi constitutionnelle du parti d’extrême-droite SPD visant à introduire un référendum d’initiative populaire.
Andrej Babiš doit maintenant œuvrer à trouver des partenaires pour constituer une coalition parlementaire susceptible d’obtenir la confiance des députés, sans quoi la Tchéquie s’acheminerait probablement vers l’organisation de législatives anticipées. Le leader du mouvement ANO se dit toutefois confiant, même s’il n’exclut pas la possibilité de devoir céder son poste de Premier ministre :« Nous allons entrer en négociation. Des signaux nous ont été envoyés, car, en réalité, le parti social-démocrate ČSSD avait d’abord dit qu’il irait directement dans l’opposition. Maintenant, il est question de leur part dans les médias de ‘conditions’. Alors nous allons discuter. Le parti SPD s’est plaint que nous n’avions pas étudié l’ensemble de leur programme, dont c’est là aussi une question de programme. »
L’affaire semble toutefois complexe. Les sociaux-démocrates, comme les chrétiens-démocrates, accusent le mouvement ANO de ne pas avoir mené de négociations sérieuses après les législatives. Il était question d’une possible alliance avec l’ODS, mais il faudrait encore trouver un troisième partenaire pour avoir la majorité. Les communistes, pour leur part, ne veulent pas « donner de blanc-seing » à Babiš, et, si ce dernier envisage même des discussions avec le SPD de Tomio Okamura, certains membres d’ANO ont déjà fait savoir qu’ils ne tolèreraient pas de collaborer avec cette formation d’extrême-droite…
L’ère du gouvernement du social-démocrate Bohuslav Sobotka, qui a correspondu à quatre années de stabilité, semble en tout cas révolue. Avec ce nouvel épisode, qui s’additionne à l’affaire dite du nid de cigognes, dans laquelle M. Babiš fait l’objet de poursuites et pourrait bien perdre son immunité parlementaire, les Tchèques pourraient bien être condamnés à retrouver le goût des crises gouvernementales à répétition.