« Nous n’étions pas prêts à la liberté, cela s’apprend »
Installée à Paris depuis plus de vingt ans, le médecin Lucie Slavíková-Boucher a fondé le réseau des Ecoles tchèques sans frontières qui, dans différents endroits du monde, proposent aux enfants bilingues un enseignement en tchèque. Pendant la Révolution de velours, Lucie Slavíková-Boucher a participé au mouvement étudiant à Plzeň, en Bohême de l’Ouest. Elle se souvient…
Comment s’est passée la transition post-velours ? A-t-elle été bien vécue ?
« Je pense que cela dépend pour qui. La majorité des gens dans le pays étaient ravis que le pays soit libre et ce sentiment était le même à travers les générations. Ensuite, l’évolution de la société a apporté beaucoup de problèmes liés à la pauvreté, au chômage, à l’insécurité sociale… Un changement aussi radical amène son lot de problèmes. Il faut se dire que la démocratie est encore jeune et que cela ira mieux après. »
Après la révolution, beaucoup de jeunes Tchèques se sont consacrés au commerce et se sont lancés dans les affaires en délaissant parfois leurs familles. Cela a pu entraîner un certain malaise chez les générations plus âgées…
« C’est un phénomène que je ne connais pas bien, mais il est vrai que nous n’étions peut-être pas prêts à cette liberté. Dans ma génération, beaucoup de couples ont éclaté suite à ces changements au sein de la société, car tout est devenu possible d’un seul coup et avec beaucoup plus d’argent en comparaison avec le précédent régime. C’était très difficile de maintenir des bases ‘raisonnables’ d’existence, alors que tout était possible. Je pense qu’il faut être bien éduqué à la démocratie et la liberté pour bien les vivre. »
Et les gens n’étaient pas éduqués pour…
« Absolument pas. La responsabilité et les avantages qu’un régime démocratique engendre, cela s’apprend. »