Condamné à 20 ans de prison au Soudan, un missionnaire tchèque a été libéré
C’est un beau succès de la diplomatie tchèque. Missionnaire condamné à vingt ans de prison au Soudan en janvier dernier, Petr Jašek est de retour dans son pays. Après quatorze mois de détention, il a atterri à Prague dimanche soir, accompagné du ministre des Affaires étrangères, Lubomír Zaorálek, qui s’était rendu à Khartoum pour négocier sa libération.
Qui est donc Petr Jašek ? Arrêté par la police soudanaise en décembre 2015, ce médecin et missionnaire tchèque âgé de 53 ans avait été accusé de sept crimes, dont ceux d’espionnage ou d’activités dirigées contre l’Etat. Au terme d’un procès long de plusieurs mois, le tribunal de Khartoum l’avait condamné, en janvier dernier, à une peine de vingt ans de prison (cf. : http://radio.cz/fr/rubrique/faits/au-soudan-un-missionnaire-tcheque-condamne-a-20-ans-de-prison).
Le verdict avait provoqué une vague de mécontentement parmi les politiciens et diplomates tchèques, comme dans les rangs de plusieurs organisation non gouvernementales selon lesquelles Petr Jašek s’était rendu au Soudan pour aider les chrétiens de la région, et notamment un jeune Soudanais gravement brûlé lors d’une manifestation. Plusieurs centaines de milliers de personnes de toute l’Europe ont signé une pétition réclamant sa libération. Les efforts entrepris par le ministère des Affaires étrangères ont abouti, puisque le président soudanais Omar el-Béchir a donc gracié Petr Jašek, comme s’en félicite Lubomír Zaorálek :
« Depuis le premier moment, nous avons essayé d’intervenir dans cette affaire. Nous avons lancé des négociations et déployé tous nos efforts pour faire libérer Petr Jašek. Nous sommes persuadés qu’il est innocent, il n’a fait qu’aider les autres. Mais la conviction de la partie soudanaise était différente. Nous avons été confrontés à un autre système juridique que le nôtre, un système qui ne pouvait réagir que difficilement à notre demande de libération. Nous avons voulu résoudre ce problème le plus rapidement possible, mais les premiers résultats n’étaient pas convaincants. Une grâce présidentielle était devenue la dernière solution. Il fallait donc trouver un accord commun avec Khartoum, ce à quoi nous sommes parvenus. »
Pour parvenir à ses fins et à la libération de Petr Jašek, le ministre a conclu, durant sa visite un accord de coopération bilatérale avec le Soudan :
« L’accord avec les autorités locales repose sur la reprise des relations tchéco-soudanaises qui avaient été interrompues après l’arrestation de Petr Jašek. Dans les faits, cela signifie un retour à nos projets communs dans le domaine de l’économie, ainsi qu’à une coopération dans la lutte contre le terrorisme et dans les questions liées à la migration, le Soudan étant un pays de transit pour les migrants. »Petr Jašek, qui a passé au total un peu plus de quatorze mois dans les prisons soudanaises, est en relative bonne santé. A son retour à Prague, il a raconté aux journalistes une partie de ce qu’il a vécu lors de son enfermement dans cinq établissements différents, en se plaignant notamment des mauvaises conditions hygiéniques :
« Les conditions changeaient selon le type de prison. La situation a été la plus difficile quand j’ai été enfermé pendant quatre mois dans un petit cachot de la police d’une vingtaine de mètres carrés, avec une quarantaine d’autres personnes. Ce sont des moments lors desquels il m’a fallu déployer de nombreux efforts pour rester en bonne santé mentale. Mais les deux premiers mois ont été les pires. J’ai partagé un cachot avec des membres de l’organisation de l’Etat islamique. Comme je suis chrétien, ils m’humiliaient, tout d’abord psychiquement. Puis ces humiliations se sont transformées en violences physiques, ils me battaient et me torturaient… »
Petr Jašek entend à présent passer différents examens médicaux et consacrer son temps libre à sa famille. Il envisage toutefois de témoigner à l’avenir de son expérience, et de continuer à aider les chrétiens persécutés dans ce pays, le Soudan, très majoritairement musulman.