L’art tchèque et slovaque de la marionnette inscrit au patrimoine de l’UNESCO
Les théâtres de marionnettes tchèques et slovaques ont été inscrits, jeudi à Addis-Abeba, sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’UNESCO. Il s’agit là de la reconnaissance d’une longue et riche tradition encore bien vivante en République tchèque.
Ce n’est pas la première fois que l’art de vivre, le savoir-faire ou des traditions tchèques sont mis à l’honneur. Les carnavals de la région de Hlinsko, la Chevauchée des Rois de Vlčnov, la fauconnerie et le « Slovácko Verbuňk », une danse improvisée exécutée par les garçons et les hommes des régions de Moravie du Sud, figurent également sur cette liste depuis quelques années.
L’art des marionnettes possède une histoire qui remonte au XVIIIe siècle en République tchèque et en Slovaquie. Leur expression par le théâtre est non seulement une forme de divertissement traditionnel populaire, mais aussi une manière de traduire sa vision du monde ainsi qu’un outil éducatif par lequel on fait passer des messages sur les valeurs morales. Marionnettiste et commissaire d’une grande exposition qui s’était tenue il y a quelques années de cela à Prague sur la tradition et le présent des marionnettes tchèques, Pavel Truhlář – dont le nom de famille signifie « menuisier », ce ne peut être un hasard – explique comment vivait cette tradition des théâtres de marionnettes, essentiellement confectionnées en bois, dans les pays tchèques au XIXe siècle :« Il y avait ici beaucoup de troupes ou de familles de marionnettistes qui voyageaient de ville en ville, de village en village et qui jouaient pour les adultes. Ils jouaient une semaine dans la même ville, avant de se rendre dans la ville suivante. Il y avait à cet effet une certaine variété de marionnettes. Il y avait des marionnettes utilisées par les théâtres itinérants pour attirer les gens à la représentation du soir. Il s’agit de marionnettes qui ne sont pas faites pour des représentations classiques mais qui sont fabriquées avec des effets spéciaux ; par exemple, un squelette qui perd ses os, des jongleurs, ou un acrobate avec une chaise. C’étaient donc des marionnettes qui étaient faites pour séduire les gens avant la représentation, ou elles étaient utilisées comme un supplément, après une représentation. Quand il y avait beaucoup d’applaudissements, on sortait une de ces marionnettes pour divertir les spectateurs. »A l’époque, ces spectacles de marionnettes, qui représentent des personnages réels ou imaginaires, n’étaient pas destinés uniquement aux enfants, comme cela est davantage le cas aujourd’hui. C’était même plutôt l’inverse, comme le rappelle Pavel Truhlář :
« Au XIXe siècle, avec les marionnettes que nous voyons autour de nous, que ce soient ces chevaliers ou ces diables, se jouaient des pièces classiques comme des pièces de Shakespeare. Il s’agissait vraiment de théâtre plus pour adultes que pour enfants. Puis c’est devenu quelque chose plus destiné aux enfants mais au début, il s’agissait de représentations plutôt pour les adultes qui s’intéressaient à des thèmes tchèques, et peut-être parfois avec une certaine satire politique. »Actuellement, selon le Centre national d’information et de conseil pour la culture, neuf théâtres de marionnettes professionnels existent encore, ainsi que des centaines de groupes indépendants et amateurs. Des chiffres éloignés des quelques 3 000 ensembles qui proposaient des spectacles au milieu du XXe siècle, mais qui n’en démontrent pas moins tout l’intérêt encore porté par les Tchèques, petits et grands, à leurs chères marionnettes.