Mémoire rom : la porcherie de Lety disparaîtra-t-elle enfin ?
Après des années de protestations, l’exploitation porcine située sur l’ancien camp d’internement de Lety, considérée comme une insulte à la mémoire de l’holocauste rom, pourrait bientôt disparaître. Le gouvernement tchèque a en effet annoncé lundi sa volonté d’acquérir la porcherie. Les militants restent toutefois prudents.
Après des années d’impuissance des autorités publiques, il faut croire que le gouvernement de Bohuslav Sobotka s’est finalement décidé à passer à l’action. Lundi, il a validé le projet visant à déterminer la valeur du terrain et des bâtiments qui se trouvent sur place afin que l’Etat en devienne le propriétaire. La tâche a été confiée au ministre de la Culture, le chrétien-démocrate Daniel Herman :
« Evidemment, des discussions avec les représentants des actionnaires de la ferme ont déjà eu lieu et, sur la base de ces négociations, ils ont admis la possibilité de discuter de l’achat du complexe. C’est une grande avancée. Nous sommes désormais dans le cadre de la deuxième étape avec l’évaluation de sa valeur. Bien sûr, des chiffres existent mais je pourrais les compromettre en les rendant aujourd’hui publics. Nous verrons bien ce qu’apportera l’expertise. »L’affaire est loin d’être entendue et le gouvernement parle d’un horizon de plusieurs mois pour voir le bout du tunnel. La prudence est de mise également du côté des propriétaires de l’exploitation porcine réunis au sein de la société AGPI.
L’achat n’est pas la seule option sur la table et eux privilégient d’ailleurs toujours la possibilité d’échanger ce bien immobilier contre un autre. Vice-président du conseil d’administration de la firme AGPI, Jan Čech laisse entendre que les négociations seront encore difficiles :
« Je pense que le prix de négociation sera simplement une introduction. D’autres discussions et d’autres conditions seront ensuite importantes. Si le prix d’achat est intéressant, nous pourrons passer à une nouvelle étape. Si ce n’est pas le cas, il est probable que nous remettions sur la table nos demandes. »Les discussions durent en fait depuis le début de l’année dernière d’après le ministre en charge des Droits de l’homme Jiří Dienstbier. Annoncé comme l’une des possibles victimes du remaniement ministériel voulu par le premier ministre, le social-démocrate a fait de l’affaire de Lety l’une de ses priorités :
« Je pense que c’est une dette énorme de la République tchèque à l’égard des victimes de l’holocauste rom en même temps qu’un problème international. Je pense que nous devrions insister sur sa résolution. »Les personnes qui militent de longue date pour que disparaisse l’exploitation porcine de Lety sont pourtant loin d’exulter. Il suffit de se plonger dans les archives de Radio Prague pour constater qu’on parle de résoudre le problème depuis plus de dix ans. Et sur le réseau social Facebook, un groupe de militants rappelle que nombreuses sont les promesses faites par le passé restées lettre morte.