« Anti-Babiš », la loi sur les conflits d’intérêts a été adoptée
Les membres du gouvernement ne pourront plus être les propriétaires de médias. De plus, même s’ils seront autorisés à rester à la tête des entreprises qu’ils dirigeaient déjà avant leur entrée au gouvernement, celles-ci ne bénéficieront plus de subventions et de commandes publiques. Tels sont deux des principaux points qui figurent dans la loi relative aux conflits d’intérêts, adoptée par les députés ce mercredi en troisième lecture. Le texte a obtenu la majorité malgré le désaccord du mouvement ANO, qui considère ces différentes mesures comme une attaque personnelle contre son leader, le milliardaire Andrej Babiš.
Mais une discorde est apparue entre les trois partis gouvernementaux (social-démocrate, shrétien-démocrate et ANO) lorsque les députés ont voulu ajouter plusieurs amendements supplémentaires. Concrètement, il s’agit notamment des modifications apportées par le député social-démocrate Jan Chvojka, qui visent à interdire aux ministres d’être les actionnaires majoritaires d’entreprises et de posséder des médias, ainsi que du projet du législateur Martin Plíšek du parti TOP 09 pour limiter l’accès aux subventions de l’Etat et aux commandes publiques aux sociétés dont 25 % ou plus du capital appartient à un membre du gouvernement.
Si la première modification concernant la participation majoritaire a été rejetée, les deux autres en revanche ont été approuvées ce mercredi, et cela malgré le désaccord du mouvement ANO qui les estime dirigées contre son leader, le ministre des Finances et vice-Premier ministre, Andrej Babiš. Le milliardaire d’origine slovaque est en effet à la tête d’Agrofert, un groupe agroalimentaire qui comprend différentes entreprises participant régulièrement aux appels d’offres, ainsi que de la société de médias Mafra qui regroupe les quotidiens Mladá fronta Dnes et Lidové noviny, la station de radio Impuls ou encore la chaîne de télévision Óčko. Avant le vote final, le président du groupe parlementaire du mouvement ANO, Jaroslav Faltýnek, a indiqué :« Notre opinion a été confirmée par la déclaration du chef du parti ODS, Petr Fiala, sur son compte Twitter. Il a indiqué que ‘La loi relative aux conflits d’intérêts résout avant tout les conflits d’intérêts d’Andrej Babiš. Il n’y a pas de raison d’affirmer le contraire. Une loi visant une seule personne n’est pas idéale, mais elle est toutefois nécessaire.’ Ce principe est donc la raison pour laquelle les députés d’ANO ont décidé de ne pas soutenir la version finale de la loi. »
Bien qu’il ait renoncé à l’idée de se présenter devant la Chambre des députés ce mercredi et de voter sur l’adoption de la loi, parfois désignée comme « lex Babiš», Andrej Babiš a pour sa part constaté :« Il s’agit d’un mauvais exemple sur la manière de dissuader les personnes qui réussissent de faire de la politique à la place de ceux qui sont là depuis vingt ans et ne font que papoter. Bien sûr, le fait que je possède des médias n’est pas idéal et j’en suis désolé. Mais d’un autre côté, on voit des médias qui ont différentes influences… »
Les autres partis considèrent, eux, ces changements d’un bon œil. Pas moins de135 des183 députés ayant voté se sont prononcés en faveur de la loi. C’est le cas aussi du Premier ministre, Bohuslav Sobotka, qui s’est félicité de son adoption sur son compte Twitter. Le député du parti d’opposition ODS, Zbyněk Stanjura, a ajouté :
« Ce projet de loi n’empêche pas les chefs d’entreprise de participer à la politique. La seule restriction que cela apporte est que dans ce cas, les membres du gouvernement n’auront plus accès aux finances publiques et ne pourront plus posséder de médias. Il ne s’agit pas nullement d’une limitation de l’entrée des personnes riches dans la politique. »La loi, qui introduit également l’obligation pour tous les politiciens de déclarer leur patrimoine lors de leur prise de fonctions, sera prochainement examinée par le Sénat. Selon Jaroslav Faltýnek, du mouvement ANO, son éventuelle adoption définitive pourrait néanmoins encore faire l’objet de plaintes auprès de la Cour constitutionnelle.