Pas de quotas et plus (ou presque) de réfugiés irakiens
La République tchèque l’a déjà fait savoir à maintes reprises : elle ne veut pas des quotas de répartition des réfugiés parmi les pays membres de l’Union européenne. L’annonce, mercredi, par la Commission européenne, des propositions de réformes de la politique en matière de droit d’asile, et notamment de la règle connue sous le nom de règlement de Dublin, a été l’occasion pour le Premier ministre Bohuslav Sobotka de rappeler la position de son gouvernement : si la République tchèque accueille des réfugiés, ce sera uniquement de sa propre volonté, et non sous le dictat de Bruxelles. Selon le ministre de l’Intérieur, l’affaire des vingt-cinq réfugiés irakiens arrêtés en Allemagne le week-end dernier après avoir été accueillis en République tchèque confirme d’ailleurs que le système que la Commission européenne souhaite mettre en place ne peut pas fonctionner.
Bohuslav Sobotka pouvait difficilement être beaucoup plus clair dans ses propos : la République tchèque ne soutiendra aucune des réformes qui ont été présentées mercredi. La Commission envisage notamment de réviser le règlement dit de Dublin qui définit les règles de répartition des demandeurs d’asile dans l’UE. Concrètement, ce règlement prévoit que le traitement des demandes d’asile est du seul ressort de l’Etat par lequel le réfugié est entré en Europe. Or, le Premier ministre tchèque estime que « la politique migratoire doit rester sous le contrôle des différents Etats membres ». Ce discours sans la moindre allusion à la solidarité ne plaira certainement pas à la Grèce et à l’Italie, les deux principaux pays dans lesquels la grande majorité des migrants font leurs premiers pas et leurs premières démarches administratives sur le sol de l’UE, mais ce n’est pas là la principale préoccupation tchèque.
Ce qui l’est en revanche, c’est la suite à donner au programme d’aide aux réfugiés irakiens de confession irakienne, après que vingt-cinq des quatre-vingt-neuf personnes accueillies en République tchèque depuis le début de l’année ont été arrêtés en Allemagne par la police locale samedi dernier. Lundi, à la surprise générale, les autorités allemandes avaient informé dans un premier temps leurs homologues tchèques que les vingt-cinq réfugiés en question pouvaient rester sur le territoire allemand et y faire une demande d’asile. Mais mercredi, le ministère de l’Intérieur tchèque informait que les personnes arrêtées seraient finalement bien renvoyées dans le premier pays où elles étaient arrivées en Europe, à savoir donc la République tchèque. Une République tchèque dans laquelle ils avaient refusé de faire une demande d’asile avant de demander à ce que leurs passeports leur soient restitués. Une attitude qu’a très modérément goûtée le ministre de l’Intérieur, Milan Chovanec :« La police tchèque a informé la police allemande en temps voulu que ces gens s’apprêtaient à se rendre en Allemagne. Selon les standards du droit européen, ils auraient donc dû être renvoyés en République tchèque après leur arrestation. Ce cas de figure concret dont nous sommes les témoins confirme on ne peut mieux que le système de quotas ne peut donc pas fonctionner. Les réfugiés ne veulent pas rester sur les territoires de pays qui leur sont imposés, dans lesquels ils sont répartis et dans lesquels ils sont censés rester. Ces propositions de la Commission européenne me font penser à de l’ingénierie sociale, mais, encore une fois, cela n’a aucune chance de succès, car on ne tient pas compte de la volonté des migrants. Les réfugiés ne veulent pas vivre en République tchèque et, comme je l’ai déjà dit et redit, nous ne sommes pas en mesure de les retenir éternellement. » Ce jeudi, le gouvernement a finalement décidé, comme cela était plus ou moins attendu, de mettre un terme définitif à l’accueil prévu cette année de trente-sept familles et 153 réfugiés irakiens, un programme qui a été mis sur pied par Generace 21, une organisation tchèque qui s’efforce d’aider les chrétiens d’Orient. Tandis que les vingt-cinq réfugiés « fugitifs » devraient pouvoir choisir entre formuler une demande d’asile en République tchèque ou être rapatriés au Kurdistan, région dont ils sont originaires dans le nord de l’Irak, une famille de huit autres dont les grands-parents avaient le mal du pays a quitté la République tchèque pour de bon ce jeudi. Quant aux cinquante-six réfugiés restants, eux aussi accueillis depuis le début de l’année, ils pourront continuer à prendre leurs cours de tchèque pour poursuivre une intégration tout sauf évidente dans le contexte actuel.