Les Lions tchèques consacrent le film « Kobry a užovky »
La série des remises de prix dans le monde du cinéma se poursuit. La semaine dernière, en France, les Césars, suivis des Oscars à Hollywood. Et ce samedi, les Lions tchèques qui ont vu la consécration du film « Kobry a užovky » (Les Cobras et les couleuvres en français), et une moisson bien moindre qu’attendue pour le long-métrage « Ztraceni v Mnichově » (Perdus à Munich). Tour d’horizon des grandes lignes du palmarès de cette 23e édition.
Peut-être le jury des Lions tchèques a-t-il estimé que ce film avait déjà été largement récompensé lors de la récente cérémonie des Prix de la critique tchèque, dont il était sorti grand vainqueur. Malgré cette relative déception, il n’en reste pas moins que Perdus à Munich fait partie des grandes sorties cinéma de l’année 2015 et qu’il a été acclamé par la critique. Actuel directeur de l’Institut français de Pologne, Stanislas Pierret, qui connaît bien les pays tchèques pour y avoir débuté sa carrière à la fin des années 1980, a participé à ce long-métrage. Il était revenu sur le tournage et sur sa préparation pour son rôle, au micro de Radio Prague, au moment de la sortie du film à l’automne dernier :
« Je ne me suis pas vraiment préparé. J’ai bien lu le scénario, j’ai lu pas mal de choses autour d’Edvard Beneš, notamment la biographie d’Antoine Marès, qui est très bien mais où il n’y a pas, je crois, l’interprétation des accords de Munich de l’historien Jan Tesař. Et c’est aussi l’un des aspects du film très important. Il revient sur ces accords et les interprète un peu différemment. Pour lui, Edvard Beneš a fait des accords de Munich une victoire diplomatique. Je n’en dis pas plus parce qu’il faut que les gens aillent voir le film. Bien sûr, la France a trahi. Ce n’est pas le seul pays qui a trahi. On parle assez peu des Anglais alors qu’ils étaient pourtant en première ligne. L’interprétation de Tesař est intéressante parce qu’il dit que Beneš a fait de sa faiblesse une force diplomatique et que c’est finalement une victoire diplomatique pour les Tchèques. Il interprète également la non-activité des Tchèques en 1948 et en 1968 à partir de cette lecture. C’est assez intéressant je crois. » Grand vainqueur de la 23e cérémonie des Lions tchèques, « Kobry a užovky » de Jan Prušinovský, qui repart avec pas moins de six récompenses (soit une bien honorable moitié de ses nominations), dont le Lion du meilleur film et celui du meilleur réalisateur, qui met en scène deux visages bien connus du cinéma tchèque, réunis exceptionnellement sur un même projet : Kryštof et Matěj Hádek (sacrés respectivement Meilleur second rôle et Meilleur interprète masculin), frères à la ville, mais aussi à l’écran pour les besoins du scénario. Autre favori de cette édition 2016, le film « Domácí péče » (Soins à domicile), premier long-métrage du réalisateur Slávek Horák, qui loin de ses neuf nominations, a dû se contenter du prix de la meilleure interprète féminine pour Alena Mihulová. Cette dernière peut toutefois se féliciter d’avoir été en quelque sorte « redécouverte » par ce film où elle assure le rôle principal et qui lui a déjà valu de recevoir la même récompense aux Prix de la critique tchèque et au Festival du film de Karlovy Vary l’été dernier. A noter qu’une des nouveautés de cette 23e édition était l’attribution d’une récompense à la Meilleure œuvre originale dans le domaine audiovisuel. C’est la mini-série diffusée sur internet, « Kancelář Blaník » (Bureau Blaník) qui a été distinguée. Petits sketches satiriques de moins de dix minutes menés tambour battant par l’acteur Marek Daniel, « Kancelář Blaník » met en scène le peu scrupuleux lobbyiste Tonda Blaník, épaulé par ses deux acolytes, comme étant à l’origine d’à peu près toutes les magouilles et affaires louches les plus médiatiques de la politique tchèque.De nombreux autres films ont été distingués dans différentes catégories, comme le Meilleur film télévisé, le Meilleur documentaire ou le Meilleur premier film.
On notera encore que traditionnellement une personnalité du cinéma tchèque a été récompensée pour sa contribution exceptionnelle à ce dernier : cette année, il s’agissait du caméraman Stanislav Milota, signataire de la Charte 77 et interdit d’exercer son métier sous la normalisation après 1968. On lui doit notamment les images du film « L’incinérateur de cadavre » (Spalovač mrtvol) de Juraj Herz, un des films emblématiques des années 1960.