Après les Roms, le député Tomio Okamura s’en prend à l’Islam

Tomio Okamura, photo: Filip Jandourek, ČRo

La nouvelle année a « bien » commencé en République tchèque. Homme politique parmi les plus controversés du pays, Tomio Okamura, leader du mouvement Úsvit (l’Aube), un des quatre partis de l’opposition à la Chambre des députés, a soulevé un tollé en publiant sur sa page Facebook en fin de semaine dernière un texte radicalement islamophobe.

Tomio Okamura,  photo: Filip Jandourek,  ČRo
Homme d’affaires tchéco-japonais coutumier des déclarations populistes et douteuses, Tomio Okamura n’en est pas à son coup d’essai. L’an dernier déjà, le député avait fait naitre une vive polémique en affirmant au sujet du camp de Lety (Bohême du Sud) réservé aux Roms pendant la Deuxième Guerre mondiale, que « le mythe d’un camp de concentration rom était un mensonge selon les informations disponibles ». Selon lui, Lety n’était rien d’autre qu’un camp de travail destiné aux personnes refusant d’être employées en bonne et due forme. Le Premier ministre, Bohuslav Sobotka, avait alors réagi en estimant que Tomio Okamura employait la langue de la propagande du protectorat d’avant 1945, tandis que le ministre en charge des droits de l’homme, Jiři Dienstbier, avait réclamé sa démission de toutes ses fonctions politiques pour sa rhétorique nazie.

Avant cela, Tomio Okamura avait également axé la campagne de son parti pour les élections européennes sur le thème de l’immigration et du danger que représentent les étrangers pour les travailleurs tchèques. Dans les rues du pays ou encore le métro de Prague étaient alors apparues des affiches sur lesquelles, en dessous d’un troupeau de moutons blancs et d’un autre noir sur fond de drapeau tchèque, on pouvait lire : « Du travail pour les nôtres, pas pour les immigrés ».

Cette fois, c’est aux musulmans que le leader du mouvement de l’Aube de la démocratie directe s’en est pris. Sur sa page Facebook samedi dernier, Tomio Okamura a publié un texte d’un des vice-présidents de son parti dans lequel il est affirmé par exemple que « chaque kebab acheté est un pas supplémentaire vers la burqa ». Dans le même texte est proposé un ensemble de mesures pour protéger « notre mode de vie démocratique et protéger le patrimoine de nos ancêtres contre l’Islam ». Parmi ces mesures, se promener avec des cochons de compagnie aux alentours des mosquées. Ces propos ne pouvaient pas rester sans réaction et ont déjà divisé le mouvement de l’Aube. Responsable des questions de politique étrangère au sein du parti de l’opposition et ancien ambassadeur en Algérie, au Mali, en Indonésie et à Brunei, le député Milan Šarapatka a ainsi manifesté son désaccord avec son chef :

Milan Šarapatka,  photo: Archives de la Chambre des députés
« Je pense qu’il s’agit de jugements et de déclarations extrêmement simplifiés. Or, c’est un sujet délicat et sérieux, on ne peut donc pas se limiter à des propos de ce type sur le kebab ou des cochons autour des mosquées. C’est pour moi absolument inacceptable. »

S’il a reconnu que certaines bornes avaient peut-être été dépassées dans le choix du vocabulaire, Tomio Okamura n’en démord cependant pas. Pour lui, rien de ce qui figure dans le texte n’est contraire à la loi :

« Cette contribution est conforme sur le principe, et j’insiste bien pour dire sur le principe, au programme du mouvement de l’Aube. Néanmoins, je reconnais que je suis d’accord avec Milan Šarapatka sur le fait qu’il convient d’utiliser un langage plus diplomatique. Si j’avais écrit le texte moi-même, j’aurais évité des mots comme kebab et cochons. »

De son côté, l'Union des musulmans de République tchèque a réagi par la voix de son président Mohamed Abbas en indiquant que ce type de campagne ne servait pas à grand-chose en République tchèque. Le dépôt d’une plainte est cependant envisagé contre un homme qui, tout en rejetant toute accusation d’incitation à la haine, affirme seulement refuser que le radicalisme islamique s’enracine dans « son » pays, une République tchèque qui ne compte en tout et pour tout que deux mosquées, une à Prague et une à Brno.