Presse : les eurosceptiques plus visibles que les politiciens pro-européens ?

Tomio Okamura

Cette nouvelle revue de presse s’intéresse au soutien exprimé à Marine Le Pen par le principal parti nationaliste tchèque. Le choix difficile des candidats pour l’élection présidentielle tchèque prévue en janvier prochain est un autre sujet abordé. Quelques mots aussi sur la position du chef russe de l’Orchestre philharmonique tchèque à l’égard de l’invasion russe en Ukraine. Une remarque enfin au sujet de l’intérêt des Tchèques pour la « semaine comprimée ».

Dimanche 24 avril, jour du deuxième tour de l’élection présidentielle en France, Tomio Okamura, le leader du parti tchèque d’extrême-droite SPD (Liberté et démocratie directe) s’est rendu à Paris pour soutenir la candidate du Rassemblement national Marine Le Pen. Le journaliste du site Seznam Zprávy a resitué cette visite dans un contexte plus large :

« La situation paraît paradoxale. Tout indique que les partis eurosceptiques collaborent avec des partis frères dans les autres pays membres beaucoup plus visiblement que les formations pro-européennes. Le leader nationaliste tchèque, quant à lui, a rencontré déjà à plusieurs reprises non seulement Marine Le Pen, mais aussi les populistes Geert Wilders et Matteo Salvini. Mais où en sont les politiciens pro-européens tchèques ? Pourquoi n'y avait-il personne dans le pays à soutenir ouvertement Emmanuel Macron, au vu de l’importance de l’élection présidentielle française et de son résultat tant pour l’ensemble de l’Union européenne que pour l’Europe centrale ? »

Le commentateur rappelle que dès le début de la guerre en Ukraine, la diplomatie tchèque a pratiqué une politique raisonnable, conceptuelle et courageuse. « Désormais, c’est aussi aux partis pro-européens ou euro-réalistes d’apprendre rapidement à se faire valoir dans l’espace européen et à soutenir activement leurs alliés politiques », souligne-t-il. Et de remarquer sur un ton ironique :

« Si même Tomio Okamura y arrive, cela ne doit pas être si compliqué. »

Les candidats pour l’élection présidentielle tchèque : un choix difficile

A quelque huit mois de l’élection présidentielle tchèque, le journal en ligne Deník Referendum signale que « les plus forts candidats présidentiels du gouvernement et de l’opposition représentent aussi leur talon d’Achille. » Il explique :

Photo: Bazi,  Wikimedia Commons,  CC BY-SA 3.0

« On discute non seulement de la probable candidature de l’ex-Premier ministre Andrej Babiš, leader du mouvement ANO, mais aussi de l’éventualité de celle de l’actuel chef du gouvernement Petr Fiala. Ce dernier est très reconnu sur la scène politique locale, notamment en rapport avec sa position déterminée à l’égard de l’invasion russe en Ukraine. En très peu de temps il a ‘grandi’ pour devenir un politicien de format européen. »

Toutefois – du moins d’après ce qu’estime le commentateur du journal – l’annonce de la candidature de Petr Fiala porterait un préjudice fatal à la coalition gouvernementale. C’est en effet en grande partie à lui-même que celle-ci doit les actuelles sympathies des électeurs. En plus, en cherchant un nouveau leader, elle risquerait une forte déstabilisation. De son avis, le même dilemme concerne également le mouvement ANO :

« Ce mouvement est à tel point lié à Andrej Babiš que son éventuel déplacement au Château (siège présidentiel) déboucherait sur la baisse de son soutien. On peut supposer qu’en votant dans le passé pour le mouvement ANO, c’est tout simplement Babiš qu’une importante partie des électeurs a voté. Le même scénario se produirait au cas où ce dernier perdrait la course à la présidence. »

« La coalition gouvernementale et le mouvement ANO sont alors appelés à bien réfléchir à leur tactique présidentielle », insiste le commentateur avant de conclure : « L’expérience des dix dernières années du mandat présidentiel de Miloš Zeman met en relief l’importance de cette élection pour la politique tchèque ».

Aider les autres, demander une aide pour soi-même

« Il faut s'aider et s’entraider. » Tel est le titre de l’éditorial de la dernière édition de l’hebdomadaire Respekt qui paraphrase celui du célèbre film tchèque du réalisateur Jan Hřebejk. L’auteur de l’article constate : « S’agissant de l’aide accordée à l’Ukraine, les Tchèques sont étonnamment généreux. Ils figurent parmi les donateurs financiers les plus actifs et il y a également beaucoup de ceux qui ont accueilli des réfugiés ukrainiens chez eux. Même sur les réseaux sociaux où toutes sortes de trolls s’affichent, on voit prédominer la voix de la solidarité. D’un autre côté, il est tout aussi légitime de voir les gens exprimer, en lien avec la guerre en Ukraine, des craintes, des inquiétudes, des angoisses et des doutes ou, le cas échéant, de demander une aide. »

Photo: Gabriela Hauptvogelová,  ČRo

L’important, selon l’éditorialiste, c’est de ne pas transformer en tabou certains sujets qui, comparé à la tragédie ukrainienne, peuvent paraître insignifiants. « L’empathie est de rigueur non seulement à l’égard des Ukrainiens en détresse, mais aussi à l’égard des gens qui affrontent des problèmes, aussi incomparables ceux-ci soient- ils », souligne-t-il.

Le chef russe de l’Orchestre philharmonique tchèque contre la guerre en Ukraine

Comment se sentent les artistes russes par rapport à la guerre en Ukraine et à l’isolement de la Russie ? Cette question a été posée, comme l’indique le journal Lidové noviny, à Semyon Bychkov, chef d’orchestre et directeur musical de l’Orchestre philharmonique tchèque, à l’occasion de la présentation de son programme pour la prochaine saison. Selon l’artiste d’origine russe, aucune des réponses et de décisions auxquelles cette question invite ne semble être facile. A ce propos, le journal a précisé :

Semyon Bychkov | Photo: Orchestre philharmonique tchèque

« Semyon Bychkov quant à lui a choisi une voie radicale il y a près d’un demi-siècle, à l’âge de 22 ans, en prenant le chemin de l’émigration pour les Etats-Unis. Il a réussi à développer son talent et son zèle sans avoir contesté ses origines et son respect à l’égard de ses racines. Mais il n’a pas pour autant perdu sa sensibilité permettant de distinguer le mal. Pour cette raison, déjà les premiers jours de l’invasion russe en Ukraine, il a publiquement condamné cette dernière, déclarant qu’il y a des moments où ‘on ne peut se taire pour ne pas devenir un allié du mal et pour ne pas s’identifier avec lui’ ».

Le journal souligne que la situation actuelle n’amoindrit pas la conviction du chef d’orchestre de l’Orchestre philharmonique tchèque concernant l’apport de la musique russe à la culture mondiale. Outre des œuvres d’autres génies de la musique, il continue à présenter admirablement celles de Chostakovitch, Tchaïkovski, Stravinsky, Rachmaninov. La production du Sacre du printemps de Stravinsky sous sa baguette, la semaine dernière à Prague, et devant une salle comble, en est une des dernières preuves.

L’intérêt pour la « semaine comprimée » en Tchéquie augmente

Le site echo24.cz rapporte que le phénomène de la «  semaine comprimée » est de plus en plus populaire en Tchéquie. Selon un récent sondage de l’association ABSL en effet, deux tiers des Tchèques préfèrent travailler quatre jours par semaine au lieu de cinq :

Photo illustrative: derschoeneali,  Pixabay,  Pixabay License

« De premières démarches en vue de l’introduction de cette innovation se déroulent dans le domaine des services d’entreprises qui sont hautement automatisés et numérisés. La principale motivation des entreprises qui l’envisagent est d’attirer de nouveaux talents et des employés qualifiés, et d’augmenter la satisfaction et la loyauté de ceux qui y travaillent déjà. Une ambition que les données des entreprises qui effectuent des tests en la matière confirment. »

Dans ce contexte, le site echo24.cz a encore rappelé :

« C’est en 1968 que la Tchécoslovaquie a abandonné la semaine de travail de six jours pour celle de cinq jours. Ainsi, l’ancienne fédération tchécoslovaque a devancé beaucoup de pays occidentaux, qui n’ont pris une décision similaire que quelques années plus tard ».