Un Tchèque bientôt avocat général à la Cour européenne

La Cour de justice de l’Union européenne, photo: G. Fessy / CJUE

En 2015, la République tchèque enverra son premier avocat général à la Cour de justice de l’Union européenne. Grâce à la modification introduite par le traité de Lisbonne, le premier avocat tchèque partira au Luxembourg trois ans plutôt que prévu. C’est pourquoi la procédure de sélection vient d’être lancée par le ministère de la Justice. Michal Tomášek, directeur du département de Droit européen à la Faculté du droit de l’Université Charles, a répondu aux questions de Radio Prague.

La Cour de justice de l’Union européenne,  photo: G. Fessy / CJUE
La fonction d’avocat général tire son origine du droit français. A la Cour de justice de l’Union européenne l’avocat général a vocation à assister les juges en présentant son avis juridique sous la forme de « conclusions ». Professeur de droit européen, Michal Tomášek revient sur la genèse de ce poste, inscrit dans le droit communautaire depuis les années 1950 :

« A l’époque, il y avait six pays membres de l’ancienne Communauté européenne. On pensait qu’avec six juges, cela pourrait créer des situations difficiles, quand trois sont pour et trois sont contre. On proposait comme solution d’augmenter le nombre de juges pour certains pays, mais cela était politiquement très compliqué. Au final, certains pays ont obtenu un juge et un avocat général et certains petits pays ont eu seulement un juge. Cela a abouti à un système où il y avait cinq avocats généraux, un nombre qui a ensuite été porté à neuf. »

De ces neuf avocats généraux, six permanents appartiennent aux grands Etats de l’Union – l’Allemagne, l’Espagne, la France, l’Italie, le Royaume-Uni et plus récemment, la Pologne. Puis les autres avocats généraux non permanents alternent dans l’ordre alphabétique des autres Etats. Ainsi, la République tchèque et la Bulgarie allaient envoyer leurs experts au Luxembourg en 2018, mais l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne a permis une augmentation du nombre d’avocats à la Cour, qui seront à présent onze. A partir de 2015, il y aura donc six avocats permanents et cinq alternants, pour un mandat de six ans renouvelable. Michal Tomášek justifie l’existence de ce système qui pourrait cliver les petits pays moins représentés dans les rangs des avocats généraux :

« Cela relève d’un développement historique. Il s’agit des pays qui ont participé à la formation de la Communauté européenne à son origine dans les années 1950. Alors cet état de choses reflète l’ancienneté des pays fondateurs, les autres pays peuvent avoir un certain ressentiment négatif par rapport à cela, mais c’est un fait historiquement donné. »

La Cour de justice de l’Union européenne,  photo: Commission européenne
La désignation de l’avocat général relève de la compétence de chaque Etat membre de l’Union. Les critères de sélection du juge sont les mêmes que pour devenir magistrat dans la juridiction suprême du pays en question. Le candidat doit avoir la citoyenneté tchèque, au moins dix ans de pratique dans le domaine juridique, être impartial, et parler français. Michal Tomášek décrit la tâche principale du futur juge :

« Sa mission principale est d’émettre une opinion sur des cas qui sont envoyés à la Cour. Les opinions des avocats généraux ont traditionnellement une grande valeur. L’avocat général a souvent des opinions très courageuses ce qui n’est pas toujours le cas des juges parce qu’ils sont parfois très conservateurs. »

La Cour de justice compte un juge par État membre, ainsi la République tchèque est déjà représentée au Luxembourg par le juge Jiří Malenovský. Les candidats au poste d’avocat général ont jusqu’au 15 août pour postuler à cette fonction prestigieuse, qui, pour la première fois, sera donc occupée aussi par un Tchèque. Selon les calculs du professeur Michal Tomášek, la prochaine occasion se présentera dans vingt-huit ans.