Père Václav : « Comme les Français rentrent chez eux, Noël est un peu triste ici »

L'église Saint-Joseph, photo: ŠJů, CC BY-SA 3.0 Unported

L’église Saint-Joseph est située dans la discrète ruelle Josefská, près du célèbre pont Charles, dans le quartier pragois de Malá Strana. Sur des plans de l’architecte Abraham de Parigi, l’église a été édifiée entre 1686 et 1692 à côté du monastère des Carmélites. Et c’est cette église, désormais inscrite au patrimoine culturel de l’Unesco, qui accueille la Communauté catholique francophone de Prague. Durant la période de l’Avent, nous y avons rencontré le père Václav Ventura pour qu’il nous en dise davantage sur la paroisse Saint-Joseph.

Václav Ventura,  photo: YouTube
Depuis combien de temps êtes-vous prêtre à la paroisse Saint-Joseph ?

« Je suis ici depuis treize ans, je crois. Au début, je n'étais que curé au sein de la paroisse. C'est le prêtre Petr Kolář, ancien jésuite, qui avait émigré. Il a servi la communauté tchèque à Paris. Il est revenu après la chute du mur de Berlin pour devenir le curé responsable de la communauté francophone ici à Prague. On peut dire que c'est lui qui l'a fondée. Il était mon ami et il m'a invité pour l'aider. Maintenant, il est retraité et il m'a remis la communauté francophone, mais il continue de m'aider. Alors, nous travaillons tous les deux pour la communauté francophone. »

Comment se fait-il que vous parliez français ?

« Je suis un autodidacte. J'ai appris le français par la lecture. La prononciation de la langue française, je l'ai apprise grâce à RFI que j'écoute et qui me donne la musique de la langue. »

Depuis combien de temps êtes-vous autodidacte ?

« Je le suis depuis plus de quarante ans ».

Depuis quand existe la communauté catholique francophone de Prague ?

« Elle existe depuis le changement politique, c'est à dire aux alentours des années 1990. »

Cette communauté est-elle importante, à Prague et en République tchèque ?

« Oui, on peut dire que la communauté catholique à Prague est très importante pour les Français qui travaillent ici, ou ailleurs en République tchèque, et qui ont la chance de se réunir et lier des amitiés, faire la route spirituelle disons. »

La communauté catholique francophone se réunissait à l'Eglise Panny Marie pod řetězem (L’église de la Vierge Marie-sous-la chaîne qui est l’église de l’ordre des chevaliers de Malte), mais ses messes sont désormais célébrées à l'Eglise Saint-Joseph non loin de là. Pourquoi cela a-t-il changé ?

L'église Saint-Joseph,  photo: ŠJů,  CC BY-SA 3.0 Unported
« Cela fait quinze ans que cela a changé. La cause est essentiellement d'origine pratique. Ici, il y a plus de place pour les enfants et nous sommes plus tolérés que dans l'Eglise Panny Marie pod řetězem. Parce que, avec les Français, la spiritualité ou le ‘comportement religieux’ est un peu différent de celui des Tchèques. Les Français sont plus dynamiques, les enfants parlent, la vie est vraiment vivace. Peut-être qu'il y a des Tchèques qui ne sont pas habitués à cette spontanéité. Alors, nous sommes ici bien reçus et tolérés. »

Justement, nous sommes en plein dans les fêtes de Noël. Comment la paroisse se prépare-t-elle et vit-elle le temps de l’Avent ?

« Aujourd'hui, comme vous le voyez, c'est la préparation spirituelle. Nous participons aussi à des œuvres caritatives. Nous collaborons avec la communauté Saint-Vincent de Paul. Chaque année, nous faisons des collectes pour les Roms en Slovaquie de l'est. Il y a également des centres familiaux qui organisent chaque année des camps de vacances pour les mères célibataires et leurs enfants. Toutes ces œuvres caritatives sont aussi des préparations pour Noël. »

Comment se déroulent ces fêtes ?

« Malheureusement, la majorité des Français qui vivent et travaillent ici partent en vacances. Nous commençons à célébrer Noël le 24 décembre, le jour de ‘Štědrý den’. Et comme les Français partent en France pour les vacances, alors les fêtes sont assez pauvres ici. »

Et comment se passent les fêtes les 25 et 26 décembre ?

« Nous célébrons la messe l'après-midi, et le soir, c'est la messe de minuit que nous célébrons. »

La messe est-elle complètement francophone ?

« Oui, ici, les messes sont complètement francophones. Pendant l'année, il y a plusieurs messes que l'on appelle 'messes de famille'. Ce sont en quelque sorte les enfants qui organisent ces messes, qui procèdent à des lectures, qui chantent, qui prient. C'est une grande occasion d’être plus nombreux que d’habitude. Les enfants amènent leurs parents à la messe. C'est quelque chose que j'aime beaucoup. »

Selon vous, la perception des fêtes de Noël a-t-elle changé depuis le temps ? L'esprit de Noël est-il toujours le même ?

« Ce sont des fêtes exceptionnelles, parce que tout le monde sent quelque chose. Lorsque vous êtes dans les rues, vous voyez les lumières, vous voyez des gens qui s'occupent des autres, qui veulent faire plaisir aux autres. Je pense que c'est le signe que les gens sentent quelque chose de religieux. Dieu qui vient change nos vies. Des ténèbres à la lumière, de notre égoïsme, nous pensons aux autres. Je pense que les fêtes de Noël changent notre société. »

Est-ce une période de renaissance spirituelle ?

« Dieu est sensible dans cette période des fêtes de Noël, aussi pour ceux qui se déclarent athées. »

Quelles sont les différentes personnes, privées ou associations, qui participent également à l'organisation des événements à la paroisse Saint-Joseph ?

« La majorité, ce sont des familles qui habitent à Prague, qui travaillent dans différents domaines et qui se réunissent en amis. Il n'y a pas quelque chose d'officiel, ce sont des familles surtout. Ce qui est très important dans la communauté francophone, c'est qu'elle est exemplaire. Parce que la vie de la communauté est dirigée par des laïcs, surtout par les femmes, qui s'occupent des enfants, et cela se passe aussi au Lycée français, à Prague 5. Donc, ils organisent tout, ils préparent les enfants à leur première communion, à la confirmation, et pour les autres activités. L'Eglise cherche l'activité des laïcs ; on peut dire que c'est une activité qui est visible. »

Entretenez-vous des liens avec d'autres paroisses, que ce soit ici ou à l'étranger ?

« Oui, bien sûr, nous sommes en communion avec les paroisses qui sont autour de nous. Nous ne sommes pas une paroisse du point de vue juridique, car nous dépendons de la paroisse Saint-Thomas, des Augustins qui sont â côté. Nous collaborons avec cette paroisse et nous sommes toujours très heureux d'accueillir les Français d'autres paroisses de France. Cela arrive plusieurs fois par an. »

L'église du Petit Jésus,  photo: Archives de Radio Prague
Il y a également des messes françaises qui sont célébrées par les Carmes à l'église du Petit Jésus de Prague. Y participez-vous également ?

« L'Eglise des Carmes, c'est le centre de pèlerinage à Prague. Les Carmes célèbrent les messes dans différentes langues également, parmi elles, la langue française. Nous sommes amis avec les Carmes. »

Y a-t-il un message que vous voudriez faire passer pour les fêtes de Noël ?

« J'ai peut-être déjà évoqué mon expérience personnelle : Dieu, qui vient dans notre monde, est sensible lors de cette période. Je souhaite à tous vos auditeurs, qu'ils sentent et qu'ils expérimentent le fait que Dieu change nos vies. »

A l’occasion d’une veillée organisée par la Communauté catholique francophone de Prague quelques jours avant Noël, nous nous sommes entretenus avec Marion Mesrobien, qui habite Prague depuis deux ans et s'occupe de la diffusion auprès des paroissiens des informations relatives aux activités de la paroisse Saint-Joseph.

Depuis quand êtes-vous active au sein de la paroisse ?

« Depuis l'année dernière, en fait. La première année, j'étais plutôt un peu spectatrice, puis ensuite on prend des ‘responsabilités’ pour que la paroisse soit vivante. Et comme on est quand même beaucoup d'expatriés, qui sont là pour un temps court, il faut se lancer assez rapidement pour donner un peu de son temps. »

Quelles sont vos activités au sein de la paroisse ?

« Je suis responsable du site internet et de la communication, de l'envoi des mails aux abonnés pour les informer des différentes activités de la paroisse, comme la veillée de ce soir ou les messes des familles. »

La communauté catholique francophone est-elle importante à Prague ?

« On remplit l'église (rires). Mais je n'ai pas idée du nombre de personnes. Il y a des groupes de catéchisme à partir du CP jusqu'au lycée avec pas mal d'enfants inscrits, donc il y a du monde. Mais je ne peux pas vous donner de chiffres exacts. »

Comment vous préparez-vous aux fêtes de Noël ?

« Du côté des enfants, il y a eu des actions avec leurs groupes de catéchisme, et nous, du côté des adultes, il y a une veillée ce soir de prières, qui est faite de façon volontaire par certaines personnes de la paroisse, où on a la chance d'avoir des prêtres qui viennent pour proposer la confession à ceux qui la demandent. Il y a eu une messe des familles pour marquer le temps de l'Avent et puis ensuite la messe de Noël a lieu ici le 24 décembre. Ce n'est pas celle où il y a le plus de Français de la paroisse, puisqu'il y a beaucoup de gens qui rentrent en France dans leurs familles. »

Quel serait votre message pour ces fêtes ?

« J'espère un message d'espérance, car c'est quand même un moment de grande joie et de retrouvailles entre les personnes, la famille, les amis. J'espère surtout un message d'espérance et que chacun trouvera un endroit chaleureux le jour de Noël. »