Peu d’enthousiasme lors des célébrations du 24e anniversaire de la révoluton de Velours
Le 24e anniversaire de la révolution de Velours, dont la première manifestation, le 17 novembre 1989, a constitué le point de départ du processus ayant abouti à la chute du régime communiste dans l’ancienne Tchécoslovaquie, a trouvé un large écho dans la presse de la semaine écoulée. Par ailleurs, dans les pages économiques, des analyses se sont penchées sur des données peu favorables concernant le taux de croissance en République tchèque.
« Il s’avère que les jeunes âgés aujourd’hui de vingt-quatre ans ne pensent pas que l’évolution observée depuis la révolution de Velours ait entièrement rempli les rêves de leurs parents. Ils ne pensent pas non plus que la Tchéquie, telle qu’elle se présente aujourd’hui, réponde à l’idée qu’ils se font d’un endroit idéal pour vivre... »
« L’aspiration à vivre dans un pays libre a été assouvie, c’est vrai, mais les éléments négatifs qui l’accompagnent prévalent ». Voilà ce qu’estiment une grande partie des jeunes interrogés dans cette enquête. Ceux-ci portent en général un regard critique sur les vingt-quatre années écoulées, tout en appréciant les avantages de la liberté. S’agissant des principales caractéristiques de cette nouvelle génération, le journal remarque également que le cœur des jeunes bat prioritairement à droite, comme l’ont confirmé l’élection présidentielle en début d’année et les récentes élections législatives anticipées.
Les célébrations de ce 24e anniversaire de la révolution de Velours ont été dépourvues d’enthousiasme, tout comme elles l’étaient d’ailleurs déjà les années précédentes. Selon certains, beaucoup ne savent pas s’il y a bien lieu de célébrer quoi que ce soit. Jeune activiste engagé dans l’initiative appelée « Reconstruction de l’Etat », Martin Kamenik ne partage pas cependant cet avis. Dans l’hebdomadaire Respekt, il a répondu à la question de savoir pourquoi les Tchèques ne célèbrent presque plus cet anniversaire :
« On a tendance à oublier. Nous considérons désormais le régime et la société démocratiques comme une évidence. Dans un sens, cette évolution est même positive, car cela signifie que les gens trouvent normal de vivre dans une société normale. Pour moi, c’est un des signes confirmant que ‘Novembre’ a été une réussite. »
Toujours selon Martin Kamenik, l’anniversaire du 17 novembre devrait servir à rappeler que sous des formes toujours nouvelles, le danger reste bien présent. Il précise :
« Cet anniversaire devrait être un memento pour ne pas oublier que les menaces ne disparaissent jamais. Il devrait nous permettre de réaliser que, souvent, nous donnons nos voix à des personnes qui peuvent représenter un risque sécuritaire pour notre Etat... Ces menaces ne sont pas moindres que celles du passé. Aujourd’hui, il n’y a plus de risque de nationalisation, mais le risque par exemple d’une infiltration du capital russe ou encore celui d’une trop grande tolérance à l’égard des régimes totalitaires demeurent. Le danger prenant des formes toujours nouvelles, il y a un risque qu’il nous prenne au dépourvu comme lors du putsch communiste en 1948. »
Les économistes critiqués pour leur prétendu pragocentrisme
« Au cours du troisième trimestre de cette année, l’économie tchèque a enregistré le plus faible taux de croissance à l’échelle européenne, à l’exception de Chypre, avec un recul de 1,6 % par rapport au troisième trimestre 2012. Dans la région, cette tendance dépressive ne se manifeste dans aucun autre pays. ».C’est ce que signale un commentaire signé de la plume de Jan Macháček publié sur le site économique ihned.cz. Sur un ton ironique, l’auteur constate que, comme d’habitude, cette tendance est source de surprise générale. Elle aurait effectivement surpris les économistes tchèques, la Banque nationale, le ministère des Finances et d’autres institutions. Jan Macháček poursuit :
« Les économistes tchèques sont coupés de la réalité et perdent leur intuition élémentaire. Leur pragocentrisme en est responsable. A Prague, on peut facilement croire que la crise économique n’existe et n’existera pas. De nouveaux restaurants et cafés, ainsi que de nouvelles brasseries et discothèques y apparaissent, pendant que les salaires des habitants de la capitale augmentent ou demeurent élevés. Dans les petites villes, c’est souvent le contraire qui est vrai. Or, il ne serait pas déplacé de transférer les économistes et analystes solidement établis dans leurs tours de verre en dehors de Prague pour qu’ils discutent avec la population locale, voient quelle est la situation et quelles sont les frustrations des gens. »
Selon Jan Macháček, il est nécessaire de reconnaître les erreurs commises. Cinq ans après la chute de Lehman Brothers, il s’agit avant tout d’admettre que la non adhésion du pays à la zone euro était une mauvaise décision. Il rappelle dans ce contexte qu’une écrasante majorité d’économistes tchèques partageaient les opinions eurosceptiques voire europhobes de l’ancien président Václav Klaus, avant d’accepter plus tard la « rigueur fiscale » de l’ex-ministre des Finances Miroslav Kalousek. Et de conclure :
« Il est toujours vrai que nous avons des finances publiques relativement saines, que nos banques sont fortes et saines et que nous disposons d’un taux d’épargne élevé. Mais compte tenu des résultats indiqués, jusqu’à quand cet état est-il maintenable ? »
Les beautés naturelles et historiques du pays source de fierté pour les Tchèques
Quels sont les trois principaux motifs de votre fierté d’être Tchèque ? Cette question a été posée dans une enquête effectuée par l’agence CVVM. Les réponses n’ont pas apporté de résultats surprenants. L’hebdomadaire Týden a donné à ce sujet quelques précisions. Nous citons :« Pour plus de 30 % des personnes interrogées, la Tchéquie représente avant tout un pays doté de remarquables beautés naturelles et historiques, d’où le principal motif de fierté de ses habitants vis-à-vis de leur pays natal. Les succès des sportifs tchèques sont le deuxième motif de fierté. En troisième position, on retrouve l’histoire et ses grandes figures. Les arts, la culture, les traditions, les produits, la science, le savoir-faire artisanal ou l’ingéniosité, autant de domaines et de qualités qui suscitent également une certaine fierté nationale, même si tous ces motifs figurent cependant à l’arrière du peloton. »
Selon les personnes interrogées, ce sont en revanche la politique locale, la corruption et la criminalité, autant d’éléments qui caractérisent négativement la situation actuelle en Tchéquie, qui étouffent le plus le sentiment de fierté nationale. Un grand nombre porte en outre un regard critique sur la morale et les rapports sociaux entre les gens. Toujours en ce qui concerne les mauvaises caractéristiques des Tchèques, les personnes interrogées ont pour la plupart évoqué le caractère envieux, querelleux et méchant de certains de leurs compatriotes.