Législatives simulées : le cœur des jeunes bat pour le prince et les Pirates
Depuis 2010, l’ONG Člověk v tísni (L’homme en détresse) organise des élections simulées dans les collèges et lycées du pays. A un peu plus de trois semaines des élections législatives des 25 et 26 octobre, 50 000 étudiants âgés de plus de 15 ans ont eu l’occasion de s’exprimer lors d’un scrutin simulé mercredi et jeudi. Et l’analyse des résultats n’est pas inintéressante. C’est en effet un parti de droite de l’ancienne coalition gouvernementale, TOP 09, et le Parti pirate qui sont arrivés en tête, pratiquement à égalité, tandis que les partis de gauche, donnés grands favoris pour les élections réelles, doivent se contenter de quelques miettes.
« Les élections étudiantes sont une des composantes de notre programme, qui est destiné à sensibiliser les étudiants de l’enseignement secondaire aux principes et instruments démocratiques et à les intéresser aux problématiques auxquelles est confrontée la société civile. On les invite à participer davantage aux débats publics, et à engager ces débats avec leurs parents et leurs enseignants. Notre objectif est également d’augmenter la participation des jeunes dans les véritables élections législatives. »
Concernant les résultats, on constate que les jeunes ont favorisé à parts égales le parti de droite néolibéral TOP 09 avec 17,80 % des suffrages et le Parti pirate avec 17,73 %, soit une différence minime d’une quarantaine des voix. Contrairement à ce que l’on peut observer dans d’autres pays européens, comme en France, les élèves tchèques préfèrent donc la droite à la gauche (le parti social-démocrate n’a recueilli que 8 % des voix). Il s’agit là d’une orientation politique moins prononcée que par le passé, mais néanmoins toujours très marquée.
TOP 09 bénéficie notamment de l’aura de son président et candidat malheureux au second tour de l’élection présidentielle en début d’année, le prince Karel Schwarzenberg. En revanche, si la popularité des Pirates est devenue une particularité des élections étudiantes, dans la réalité, le parti n’est encore jamais parvenu à franchir le seuil de 5 % pour accéder à la Chambre des députés. Et à en croire les sondages, il n’en sera pas autrement cette année. En revanche, les jeunes ont reproduit les tendances observées dans l’ensemble de la société, avec de faibles préférences pour le parti civique démocrate (ODS), qui n’a recueilli que 6,19 % des suffrages, et l’émergence du parti ANO du milliardaire Andrej Babiš, qui a fini troisième du scrutin avec un score honorable de 13,4 %.Les médias se sont bien évidemment empressés d’interpréter toutes ces données, mais pour Karel Strachota, l’important est surtout la motivation des jeunes, désireux de s’exprimer :
« L’image des jeunes élèves qui ne font que profiter de la vie, qui sont passifs et indifférents, est véhiculée notamment par les médias tchèques. L’expérience qu’a Člověk v tísni est très différente. Il y a des centaines de jeunes qui collaborent avec nous sur différents projets et l’organisation des élections étudiantes dans leur école se fait souvent sous leur impulsion. »Člověk v tísni a proposé l’organisation des élections à toutes les écoles en République tchèque. Une sur quatre s’est jointe au projet pour un total de 434 établissements. Leur nombre a sensiblement augmenté par rapport aux 150 écoles qui avaient pris part aux premières élections simulées en 2010. Karel Strachota remarque que son association doit parfois justifier l’organisation de débats politiques dans les écoles, et ce en raison de la loi sur l’éducation restrictive à cet égard :
« La loi sur l’éducation interdit la propagation d’un parti politique à l’école, ce qui contribue à disqualifier un débat quelconque sur la politique. Mais Člověk v tísni estime que les écoles tchèques devraient savoir raisonner sur des sujets politiques qui font partie intégrante de l’éducation, parce qu’ils familiarisent les jeunes aux principes démocratiques. »Même si les résultats des prochaines élections législatives ne seront pas identiques à ceux des élections étudiantes, l’opinion des jeunes élèves constitue néanmoins un indicateur de l’atmosphère dans la société. Et si non pour les politologues, au moins pour les parents, ils apportent une information de ce que pensent ces teenagers parfois inconnus qui vivent sous le même toit qu’eux.