La musique dans le cinéma tchèque des années 1960
Rubrique musicale un peu particulière ce dimanche puisque c’est vers le cinéma que nous allons nous tourner pour une série d’émissions mêlant les quatrième et septième arts. Puisqu’il faut bien débuter quelque part, ce sont les années 1960 qui vont nous intéresser aujourd’hui. L’industrie cinématographique tchèque y connaît alors un âge d’or plus tard surnommé la Nouvelle vague tchécoslovaque. Célèbre critique francophile, Antonin Liehm parle lui de « Miracle tchécoslovaque » alors que le pays sort d’une décennie de dogmatisme en matière d’art où le réalisme socialiste est appliqué au cinéma. Les années 1960 voient au contraire un bouleversement fondamental dans la plupart des disciplines artistiques. Aussi les avant-gardes s’invitent dans les œuvres de ces nouveaux cinéastes amateurs de jazz et d’une contre-culture qui parvient tant bien que mal en territoire tchécoslovaque.
Dans ses films, Konkurz, sa première œuvre ou Au feu les pompiers, la musique est très présente en arrière-plan. Comme Cerny Petr (L’as de pique), le long-métrage qui le fait connaître en 1963 et dont l’une des scènes se déroule dans un bal, des événements de la vie sociale toujours très important en pays tchèques. On y joue par exemple Nej Nej Nej, une chanson interprétée par Josef Zíma et Pavlína Filipovská.
La Nouvelle vague naît dans un contexte de libéralisation du régime politique. Une nouvelle génération de créateur apparaît et elle se construit en opposition avec les règles strictes et rigides du cinéma des années 1950. Au début de la décennie suivante, quelques œuvres dont le Monsieur Principe Supérieur de Jiří Krejčík sont récompensés dans des festivals internationaux. Cette reconnaissance de l’étranger renforce la position des professionnels du cinéma dans le cadre national qui, de plus, bénéficient d’un financement assuré, celui de l’Etat dont la censure se fait moins pressante. En effet, les studios sont aux mains des artistes et ils réussissent à imposer leur choix ; quand un film a été tourné et l’argent dépensé, il devient difficile de ne pas le diffuser.Jiří Menzel est l’un des cinéastes qui éclot durant cette période et qui deviendra ensuite l’un des plus importants représentants tchèques du genre. En 1968, il signe Zločin v šantánu, une comédie musicale en forme de satire politique dans une Tchécoslovaquie occupée par les troupes du Pacte de Varsovie.
Des comédies musicales, la période n’en est pas avare. On peut citer Starci na chmelu qui marque les esprits en 1964 et dont il existe encore aujourd’hui une version théâtrale. Est convoquée la fine fleur de la variété tchécoslovaque de l’époque : Karel Gott, Petra Jana ou encore Josef Zíma, le roi non couronné d’une certaine forme de musique folklorique.Comment ne pas citer également dans le style comédie musicale Kdyby tisíc klarinetů (Si un millier de clarinettes…), dans lequel des soldats voient du jour au lendemain leurs armes transformées en instruments de musique. Et ils prendront goût à leur nouveau matériel. On retrouve à nouveau la crème de la crème de la chanson tchécoslovaque et bien sûr l’inévitable Karel Gott.
Toujours dans ce genre quelque peu délaissé depuis, il faut noter la sortie sur les écrans en 1966 du film Dama na kolejích (La dame sur les rails) dont l’accueil critique est plus partagée mais qui offre un nouveau rôle à l’envoutante Jiřína Bohdalová.
Car en effet à côté des auteurs de la Nouvelle vague, il y a de la place pour des films populaires de qualité. Ces comédies en sont la preuve. Tout comme le Limonádový Joe aneb konská opera (Limonade Joe ou le cheval d’opéra) du très imaginatif Oldřich Lipský. Il s’agit d’un western tchèque loufoque et très drôle avec un jeu étonnant sur les couleurs. Une nouvelle preuve de l’attrait de la culture anglo-saxonne qui avec le jazz et le rock’n roll trouve un écho dans la jeunesse de la Tchécoslovaquie communiste.