Nouveau procès contre une organisation néo-nazie
Le président Miloš Zeman avait vu juste, en affirmant le jour de son investiture que la lutte contre les groupes néo-nazis devait être une des priorités de l’Etat. Plusieurs procès ont récemment eu lieu contre des membres d’organisations d’extrême-droite, révélant un réseau limité mais organisé.
Le tribunal de Děčín a donc annoncé l’inculpation de quinze jeunes femmes, la plupart d’entre elles n’ayant pas trente ans, pour propagande néo-nazie. Entre 2007 et 2009, elles auraient organisé pas moins de treize rassemblements pour la propagation d’idées d’extrême-droite à travers le pays, et publié du matériel de propagande sur internet.
Il s’agit d’un groupe plutôt restreint dans les faits, mais que la justice cherche tout particulièrement à cibler pour ses liens supposés avec le noyau dur du milieu néo-nazi tchèque. Spécialiste de l’extrémisme de droite à l’Université Charles de Prague, Jan Charvát explique :
« C’est un groupe relativement petit et assez fermé. Pour lui, il s’agissait essentiellement de rendre service au groupe appelé Résistance nationale, pour lequel il faisait une sorte de ‘travail auxiliaire’, plutôt que des mesures d’ampleur. »
Leur idéologie est directement héritée des organisations de femmes de l’Allemagne hitlérienne, qui défendaient la place de la mère aryenne dans un schéma familial traditionnaliste. Actualisant sa lutte, Resistance Women Unity cherchait à s’attaquer au féminisme et à l’émancipation des femmes, des tendances de société perçues par elles comme étant néo-marxistes.Il y a deux mois à peine, le procès de dix-huit membres de groupes de musique néo-nazis s’ouvrait à Brno, en Moravie. La procédure judiciaire pourrait se conclure le mois prochain. Tous risquent jusqu’à huit ans de prison pour avoir ouvertement vanté, en concert comme par la vente d’objets dérivés, l’idéologie du Troisième Reich.
Ces procès d’ampleur importante et relayés par les médias témoignent de la volonté de l’Etat dans la lutte contre le néo-nazisme à travers le pays. C’est aussi ce que souligne Pavel Hanták, porte-parole de l’unité de police qui a arrêté les néo-nazies de Děčín :
« Le procès pénal actuel contre quinze personnes a ses racines dans la mise en œuvre de toute une série de poursuites contre la scène d’extrême-droite tchèque. »
Les procès témoignent aussi de l’organisation dont font preuve les mouvements d’extrême-droite. D’après les spécialistes, leur nombre reste limité : environ 4 000 militants selon les estimations, dont 400 pour le noyau dur. Mais ils se professionalisent et leur capacité d’action se renforce, ce qui se ressent notamment par des attaques contre la communauté rom.
Une questions se pose donc : l’agitation des forces de police et des tribunaux a-t-elle une quelconque efficacité dans la lutte contre les organisations néo-nazies ? Pour Jan Charvát, si les victoires obtenues se font par petits pas, leur effet est indiscutable :
« Pour le fonctionnement de telles organisations, c’est dans la plupart des cas absolument fatal. Nous pouvons d’ailleurs affirmer que, aujourd’hui, le groupe Resistance Women Unity n’existe plus vraiment. Même leur site web s’est évaporé. »En 2010, la justice avait dissout le Parti ouvrier (Dělnická strana), un parti politique nationaliste que soutenaient nombre d’organisations fascisantes tchèques. Depuis, leur tentative d’investir le jeu démocratique est un chemin parsemé d’embûches et les groupuscules informels restent les plus puissants. C’est le cas du plus actif d’entre eux, Résistance nationale, qui poursuit encore sa nuisance aux yeux et à la barbe de la police.