Aider la zone euro ou s’isoler : le gouvernement tchèque dans le doute
Que va donc faire la République tchèque ? Réticent face aux plans de l’Union européenne de renflouer le Fonds monétaire international (FMI) afin que celui-ci ait les moyens de secourir la zone euro, son gouvernement va-t-il finalement apporter sa contribution ? Tandis que le ministre des Affaires étrangères s’est déclaré en faveur d’un prêt tchèque, le Premier ministre, Petr Nečas, indécis, rencontrait, lui, ce mardi, le président de la République, un Václav Klaus fermement opposé à l’idée de toute aide en provenance de Prague.
Le ministre des Affaires étrangères, Karel Schwarzenberg, a été le premier membre d’un gouvernement divisé, dimanche, à se prononcer clairement et publiquement en faveur d’une contribution tchèque au plan de sauvetage de la zone euro. La Banque centrale tchèque devrait renflouer le FMI à hauteur de 90 milliards de couronnes (environ 3,5 milliards d’euros), une somme qui représente un peu plus de 10 % de ses réserves en devises.
Lundi, le chef de l’Etat a défendu une position diamétralement opposée. Václav Klaus a expliqué pourquoi à la Radio tchèque :
« La République tchèque elle-même vit avec un déficit qu’elle n’est pas capable, comme nous pouvons le constater, de résorber. Dans cette situation, il serait irresponsable d’aggraver notre endettement en accordant un prêt pour des pays extrêmement endettés, auxquels cela permettra seulement de repousser encore un peu plus l’adoption et l’application des mesures réellement nécessaires. »« Le devoir élémentaire du gouvernement est de maintenir les finances publiques et le montant de la dette publique à un certain niveau. C’est pourquoi le gouvernement augmente les impôts, c’est pourquoi il procède à des coupes budgétaires qui ont de lourdes retombées pour les Tchèques, et notamment pour ceux socialement plus faibles. »
Le ministre des Finances estime lui aussi qu’une participation tchèque au renflouement du FMI est une décision risquée et désavantageuse pour les intérêts nationaux. Toutefois, Miroslav Kalousek est bien conscient que la République tchèque ne pourrait se permettre d’adopter une position négative qu'à la condition qu’elle ne soit pas l’unique pays en Europe, avec la Grande-Bretagne, à dire « non ». Dans le cas contraire Miroslav Kalousek est plutôt favorable à un rattachement à la cause commune, même si la décision finale ne lui appartient pas, comme il l’a précisé :
« Même si nous décidions d’accorder un prêt au FMI, je souhaiterais que nous soyons capables de négocier le versement d’une somme inférieure à 3,5 milliards d’euros. C’est une discussion vraiment très importante qui dépend des priorités de la politique étrangère du gouvernement. Bien entendu, la banque centrale a aussi son mot à dire, car il s’agit de ses réserves en devises. Le gouvernement ne commande pas la banque centrale, c’est une décision qui est uniquement de son ressort. »Réticente comme son ministre des Finances, la République tchèque s’interroge donc. Là où certains appellent à faire preuve de pragmatisme de peur de voir le pays s’isoler, le président de la République, Václav Klaus, considère, comme souvent en matière de questions européennes, les choses différemment :
« Je suis convaincu que notre gouvernement prendra la décision la plus raisonnable. Mais c’est une décision que nous devons prendre seuls. Limiter à l’avance notre libre arbitre avec l’argument selon lequel nous nous retrouverons isolés si nous n’acceptons pas le plan de Bruxelles est une erreur. Agiter le spectre de l’isolation est une chose à laquelle nous sommes habitués ces dernières années, et le résultat est que nous nous retrouvons aujourd’hui confrontés à un problème européen difficilement résoluble. »Bien que tout le monde reconnaît que la zone euro, dont la République tchèque ne fait pas partie, se trouve effectivement dans une situation épineuse, pour l’heure toutefois, au sein du gouvernement, seul le chef de la diplomatie, Karel Schwarzenberg, n’envisage pas de voir Prague rester à l’écart de ses partenaires européens :
« En aucun cas nous ne devrions rester isolés en Europe, uniquement aux côtés de la Grande-Bretagne. Il ne faut pas oublier que nous sommes un pays situé au centre de l’Europe. Tous nos voisins sont des Etats membres de l’UE. Choisir une voie différente de celle des autres reviendrait à nous isoler et pourrait être très dangereux pour nous. »Mardi, en début d’après-midi, le Premier ministre a fait savoir que la décision serait prise prochainement par le gouvernement et qu’il n’entendait pas faire porter la responsabilité à la banque centrale. Petr Nečas a également précisé que, personnellement, il était plutôt opposé à une aide de la République tchèque.