Les Tchèques attachés à leur couronne

La couronne tchèque peut-elle devenir un deuxième franc suisse ? La question peut prêter à sourire. A en croire pourtant certaines informations reprises par les médias jeudi, la couronne, dont le taux de change reste relativement stable, pourrait devenir une valeur sûre en temps de crise et d’incertitude, comme cela est le cas actuellement. En attendant, une chose est sûre : jamais le gouvernement tchèque n’a paru aussi peu pressé d’adopter l’euro.

Photo: Štěpánka Budková,  Radio Prague Int.
Mercredi, le Premier ministre a déclaré qu’arrêter aujourd’hui une date pour l’adoption de l’euro ne serait pas une bonne décision pour la République tchèque. Petr Nečas a justifié sa position en expliquant que la crise financière actuelle dans la zone euro faisait de la monnaie européenne « autre chose » que ce qui figurait dans le traité d’adhésion à l’Union européenne signé à Athènes en 2003. Autrement dit, le gouvernement tchèque n’entreprendra les démarches pour l’introduction de l’euro que lorsque les avantages prévaudront sur l’abandon de la couronne. Pour l’heure, c’est une évidence, ce n’est pas le cas.

Pourtant, quelques jours avant les déclarations de Petr Nečas, la Banque nationale avait publié une analyse selon laquelle la République tchèque devrait remplir, dès l’année prochaine, tous les critères de Maastricht nécessaires à l’adoption de l’euro. Si tel était le cas, cela signifierait que la monnaie unique européenne pourrait être introduite dès 2016… Mais pour qu’un tel scénario se réalise il faudrait une décision que, contrairement aux entreprises et au secteur industriel, ni les responsables politiques, ni la majorité de l’opinion publique (selon un sondage CCVM réalisé en juin, 68 % des Tchèques se disent contre l’adoption de l’euro) ne semblent aujourd’hui enclins à prendre.

Outre la crise dans la zone euro, une des raisons à cet attachement à la couronne est la relative bonne santé de celle-ci, comme l’explique l’économe Jan Bureš :

« La couronne tchèque profite de la relative stabilité dans la région. C’est d’ailleurs pourquoi elle est comparée au franc suisse, pour l’instant uniquement dans un sens positif. C’est plutôt une bonne nouvelle pour les exportateurs, surtout si l’on pense au zloty polonais ou au forint hongrois, qui sont beaucoup plus sensibles à toutes les informations, et surtout les mauvaises, en provenance de l’économie mondiale. La couronne tchèque, elle, reste relativement stable, elle faiblit certes un peu en ce moment, mais pas aussi fortement et aussi vite que le zloty polonais, et c’est vraiment plutôt une bonne chose tant pour les exportateurs que pour les importateurs. »

Les importants déficits de plusieurs pays appartenant à la zone euro et le ralentissement de la croissance économique dans le monde, ajoutés à l’endettement relativement faible de la République tchèque, pourraient entraîner un intérêt grandissant des investisseurs pour les obligations tchèques. De là à faire de la couronne tchèque un deuxième franc suisse, il y a un pas que même les plus optimistes des économes tchèques ne veulent pas franchir. Et ce même si selon la Banque de République tchèque, la couronne devrait encore se renforcer par rapport à l’euro dans les deux prochaines années, la monnaie européenne pouvant s’échanger à 22,50 couronnes en 2013 (contre 24,45 actuellement).