Bricolage érotique : un spectacle « fabriqué avec les moyens du bord »
Après la Serre l’an passé, l’Atelier Lefeuvre & André est de retour au festival du nouveau cirque Letní Letná avec un nouveau spectacle intitulé Bricolage Erotique. Avant de parler du spectacle Radio Prague a demandé aux deux comparses comment ils avaient ressenti les réactions du public tchèque.
DA : « J’aime bien que le public réagisse. C’est vrai qu’en venant ici, présenter Bricolage Erotique, j’avais un peu peur. Parce que la Serre qu’on a présentée l’année dernière était sur une thématique simple et facile d’accès. Là, j’avais un peu peur que le titre rebute pour un festival de cirque, ici, à Prague, où le nouveau cirque est paraît-il encore peu connu. Mais ils sont là, c’est rempli tous les soirs. Et en plus ils rigolent à toutes les bêtises qu’on fait, ils ont beaucoup moins peur de rigoler qu’en France. En France, ils réfléchissent trop ! »
Vous pensez que c’est des ‘pisse-froids’ en France ?
JPL : « Ils peuvent l’être. Et puis il y a une histoire et une connaissance du cirque en France qu’il n’y a pas ici. En France on est parfois confronté à un public qui cherche des solutions, des réponses, des interprétations là où il n’y a rien... »DA : « On intellectualise beaucoup en France. Ca dépend évidemment des régions. Mais parfois, on a l’impression de passer une audition ! »
Bricolage Erotique, c’est a priori deux termes qu’on ne mettrait pas côte à côte... Pourriez-vous nous expliquer ce titre, Didier André ?
DA : « J’avais eu l’idée de faire un spectacle érotique et j’avais pensé le faire comme au cabaret, avec des filles etc. Puis on s’est dit qu’on pourrait le faire tous les deux. D’abord on s’est dit qu’on ne pouvait pas, mais en y réfléchissant c’est ça qu’il fallait faire : quelque chose à l’inverse de ce qui se fait normalement. Après, c’est devenu ‘bricolage’ parce qu’on a commencé à travailler avec des machines, des visseuses etc. On a abandonné ça et on a préféré utiliser d’autres objets... »
Quels types d’objets ?
DA : « Des chaises, des choses très simples, des objets usuels. Je ne veux pas le dévoiler parce que c’est mieux que les gens les voient. Mais c’est vraiment très simple. Le terme bricolage, on l’a conservé, pour ne pas avoir un spectacle uniquement avec une terminologie érotique. Dans le dictionnaire, bricolage, ça veut dire ‘fabriquer avec les moyens du bord’. C’est en effet un spectacle, de l’érotisme fabriqué avec les moyens du bord. »C’est visible à partir de 7 ans, donc c’est accessible à tous les publics...
JPL : « Oui, c’est de l’érotisme d’enfant... Nous on n’est jamais que des vieux enfants, enfin...des enfants vieux. Mais oui, je trouve que c’est du jeu. Je n’aime pas le terme ‘ludique’ parce que c’est très à la mode. D’ailleurs on parle de manière générale des jeux de l’amour, du sexe... C’est une sensualité très positive. C’est de la poésie. »
DA : « C’est ouvert à tout le monde, il y a beaucoup d’images qui sont uniquement interprétés par le public. C’est-à-dire que le public voit l’image, le titre du spectacle et se dit : ‘ah, mais c’est ça qu’ils ont voulu montrer’. C’est vrai qu’on a travaillé cet aspect-là, on a toujours été à la frontière avec des choses qui font un peu érotiques, mais qui ne le sont pas. Ou qui le sont, mais dont on donne l’impression qu’on n’a pas voulu le faire. Donc si des enfants voient certaines choses, ils ne verront peut-être rien d’érotique dedans. Parce qu’ils n’ont pas les codes. »Vous jouez donc sur tous les niveaux d’interprétation... C’est quelque chose que vous essayez d’avoir dans tous vos spectacles ?
JPL : « Oui, je pense qu’on aime bien (rires). On aime faire croire qu’on emmène les gens sur un terrain et puis on les emmène sur un autre. Il y tous les cas de figure. On aime bien ces frontières. »
DA : « On aime bien leur montrer des choses qui semblent simples, qui le sont, mais qui ont demandé beaucoup temps à être mises en place. »