Salut à tous les tchécophiles de Radio Prague – Ahoj vám všem, milovníkům češtiny Radia Praha ! Nous allons entamer une nouvelle petite série consacrée à quelques mots très particuliers de la langue tchèque, des mots qui n’existent qu’en tchèque et intraduisibles. Pour cette fois, nous allons donc nous intéresser plus précisément aux mots « čecháčkovství » et « čecháček ». Et essayer de comprendre, à travers ces deux mots, qui est ce Tchèque moyen que les Tchèques eux-mêmes présentent comme « malý český člověk », soit littéralement « le petit homme tchèque ».
Commençons donc par les deux premiers de ces mots « čecháčkovství » et « čecháček ». Deux mots très intéressants, comme nous allons nous efforcer de vous l’expliquer, et indissociables. Première constatation, leur racine est composée du mot « čech », soit « Tchèque » ; et il ne s’agit pas là de l’adjectif, mais du nom désignant la personne vivant ou étant originaire de la République tchèque. Bien plus encore que des mots, « čecháčkovství » et « čecháček » sont une notion, ou plus précisément une idée que les Tchèques se font d’eux-mêmes. Et avant de développer cette idée, notons encore que dans le mot « čecháčkovství », on retrouve le mot « čecháček » (le « e » entre le « č » et le « k » ayant disparu uniquement pour une raison pratique, très courante dans la langue tchèque, afin de pouvoir mieux prononcer le mot « čecháčkovství »). En fait, ce mot « čecháček », composé donc du mot « čech » - Tchèque, et du suffixe « -ček » signifie « le petit Tchèque », le suffixe « -ček », comme le suffixe « -et » ou « -ette » en français, étant utilisé pour signifier la taille réduite, plus petite de quelque chose ou de quelqu’un par rapport au mot d’origine.
Photo: Commission européenne
Cependant, les Tchèques eux-mêmes parlent plutôt, et très souvent, de celui u’ils appellent « malý český člověk », soit littéralement « le petit homme tchèque ». Ce « petit Tchèque », comme on dirait plutôt en français, désigne en quelque sorte un Tchèque non pas petit de taille, mais plutôt quelqu’un que l’on pourrait qualifier de « Tchèque moyen », en référence bien entendu au célèbre « Français moyen », ou plus précisément de « Tchèque dans la moyenne ». Dans les faits, ce « petit Tchèque » - « malý český člověk », ou ce « Tchèque moyen » est « petit » parce qu’il souffre d’un complexe d’infériorité par rapport aux représentants des grands pays. Dans ses grands lignes, le « petit Tchèque » n’est donc pas sûr de lui et se contente de ce qu’il a. A la différence d’un Français, d’un Anglais ou d’un Italien, le « petit Tchèque » ne se sent pas être le représentant d’une grande nation dont il peut être fier de l’histoire. On peut supposer que ce sentiment d’infériorité provient de l’époque quand Bohême et Moravie n’étaient encore que des provinces de l’Empire austro-hongrois. Mais peut-être s’agit-il également d’un trait de caractère national, dont on peut toutefois penser qu’il tend à s’effacer ces dernières années. Tel est donc « le petit homme tchèque », qui, au bout du compte, nous est plutôt sympathique.
Photo: Commission européenne
En revanche, le mot « čecháček » possède, lui, une connotation plus négative. Il s’agit presque d’une insulte. Pour résumer grossièrement, disons que le trait qui le caractérise le mieux est la « petitesse d’esprit » ou encore le manque d’ouverture. Il y a de cela quelque temps, quelque part sur Internet, nous avons lu que l’actuel président de la République tchèque, Václav Klaus, dans son euroscepticisme, avec entre autres son opposition farouche au Traité de Lisbonne, était le meilleur exemple de ce que peut être un « čecháček » : c'est-à-dire, toujours en forçant le trait, un Tchèque convaincu que tout est mieux chez lui en République tchèque, convaincu d’avoir toujours raison, et qui critique presque systématiquement tout ce qui vient de l’étranger et de l’extérieur. En quelque sorte, le « čecháček » ne se distingue guère du Français moyen qui n’est jamais sorti de son pays, ou qui, lorsqu’il en sort, critique tout ce qu’il découvre dans un pays étranger, tout simplement parce que tout est mieux et plus beau en France.
De ce « Tchèque moyen petit d’esprit » provient donc le mot « čecháčkovství ». Il existe toutefois une petite nuance entre les deux mots. Car le « čecháčkovství », en effet, correspond plus à un commentaire sarcastique du caractère national tchèque. Disons qu’il s’agit d’une image négative que les Tchèques ont d’eux-mêmes, ou plus précisément de ces Tchèques qu’ils regrettent de devoir désigner comme des « čecháček ».
Ainsi donc pour la nuance entre le « petit Tchèque » - « malý český člověk » et le « Tchèque moyen » - « čecháček », cousin du « Français moyen », sur laquelle s’achève ce « Tchèque du bout de la langue ». Dès la semaine prochaine, nous nous pencherons sur d’autres mots très particuliers de la langue tchèque. D’ici-là, portez-vous du mieux possible – mějte se co nejlíp !, portez le soleil en vous – slunce v duši, salut et à bientôt – zatím ahoj !