L’optimisme, un trait de caractère rare et moqué en Tchéquie ?
Cette nouvelle revue de presse s’intéresse d’abord au pessimisme qui serait un trait caractéristique des Tchèques. Elle cherchera aussi une réponse à la question de savoir pourquoi l’automne qui arrive, s’annonce comme une saison angoissante. Autres sujets traités, enfin : l’intérêt que portent les Tchèques à la Slovaquie, et ce plus particulièrement à l’approche des élections législatives, ou encore l’absence à Prague d’un monument dédié à l’ancien président Václav Havel.
Être optimiste en Tchéquie ? Voilà bien quelque chose qui apparaît comme quelque peu étrange, qui serait même une marque de naïveté. C’est du moins ce qu’observe un commentateur de Hospodářské noviny, qui développe ainsi sa pensée :
« Une enquête internationale sur le pessimisme menée par World Atlas il y a six ans révélait que la Tchéquie faisait partie des dix pays les plus pessimistes au monde. Elle figurait même en deuxième position, derrière la Grèce, soit donc un pays qui, quelques années auparavant, avait connu un effondrement total de son économie et souffrait d’un taux de chômage extrêmement élevé. Or, rien de tel n’est encore arrivé aux Tchèques, qui vivent dans un pays avec un taux de chômage particulièrement faible, non seulement en comparaison avec les autres pays européens, mais aussi avec le reste du monde. »
L’auteur de cet article publié dans le quotidien économique constate que le pessimisme ambiant pouvait se comprendre à l’époque de l’ancien régime et du socialisme rigide, lorsque le pays était encore occupé par les troupes soviétiques et qu’aucun espoir ne se dessinait à l’horizon. L’Occident était alors très éloigné, tant en termes de prospérité économique que de libertés et de visions positives du monde. Mais aujourd’hui, la situation est foncièrement différente, peut-on encore lire :
« Nous ne sommes pas un pays occupé, nous sommes dans l’UE et dans l'OTAN, comme nous le souhaitions, et, plus généralement, tous les grands rêves que nous avions se sont réalisés. Nous pouvons voyager comme et où nous le voulons, nous pouvons acheter ce que nous voulons, nous pouvons dire ce que nous voulons et nous pouvons croire en ce que nous voulons. Malgré cela, nous sommes toujours enclins au pessimisme, nous continuons à froncer les sourcils dans la rue et à être renfrognés, et sourire semble toujours être considéré comme une insuffisance mentale. »
Un trait de caractère qui, de l’avis de l’auteur, serait en quelque sorte unique au monde. « Ne soyons plus ces pessimistes inutilement naïfs. Nous aurons tous une vie meilleure », appelle-t-il.
L’automne de toutes les angoisses
« Sur le plan politique, cet automne sera l’automne de l’angoisse ou, plutôt, l’automne de notre angoisse. » Voilà ce que prédit un éditorialiste du site Novinky.cz, en faisant référence à « L’hiver de notre mécontentement » de John Steinbeck, un roman qui, dans sa version tchèque, s’intitule « L’automne de l’angoisse ». Dans son texte, il précise sa vision des choses :
« Cet automne, il n’y aura pas d’élections en Tchéquie. En revanche, des élections auront lieu dans deux pays voisins, en Slovaquie et en Pologne, et les experts s’accordent sur le fait que ces scrutins constitueront pour eux des moments clés. Leurs résultats pourraient renforcer les tendances visant à se soumettre à Moscou (dans le cas de la Slovaquie) et, d’autre part, donner un nouveau souffle à la voie fondée sur la xénophobie et d’autres bas instincts. Si l’automne confirme ces inquiétudes, la Tchéquie sera alors entourée d’États qui ne seront pas compatibles avec sa configuration politique. »
L’auteur émet l’idée selon laquelle seule la société civique est en mesure de faire face au populisme agressif qui se transforme en autoritarisme. Et souligne que les dernières élections législatives et présidentielles ont démontré qu’une telle société existait déjà en Tchéquie :
« C’est donc cette société même qui peut dire que l’automne de notre angoisse se profile à l’horizon. Et l’hiver. Puis le printemps. Et l’été. C’est un constat, l’angoisse ne semble pas devoir s’estomper prochainement. »
Quand Václav Klaus soutient Robert Fico
À désormais moins de trois semaines de la tenue des élections législatives anticipées en Slovaquie, le quotidien Mladá fronta Dnes attire l’attention de ses lecteurs sur le soutien accordé par l’ancien Premier ministre et président tchèque Václav Klaus à Robert Fico, l’ancien Premier ministre slovaque aujourd’hui leader de l’opposition. Prêt à tout pour retrouver des fonctions de chef du gouvernement qu’il a été contraint d’abandonner en 2018 suite à l’assassinat du journaliste d’investigation Ján Kuciak, un événement qui avait alors bouleversé la société slovaque et entraîné un séisme politique, Robert Fico, qui apparaît comme le principal favori du scrutin à venir, critique notamment les sanctions contre la Russie et le soutien à l’Ukraine. L’occasion pour le journal de préciser :
« Dans sa lettre dans laquelle il exprime son grand soutien à Fico, Václav Klaus estime que sa victoire et celle de son mouvement Smer-SD donnerait à la Slovaquie la possibilité de rester un pays démocratique. Il tient également à l’assurer qu’il possède des sympathisants en Tchéquie aussi. »
Le journal précise que la lettre a été envoyée sur un papier à en-tête de l’institut qui porte le nom de Václav Klaus. Fondé en 2012 en tant qu’association à but non lucratif, cet institut a pour objectif d’étudier et de diffuser tout ce qui concerne la vie, l’œuvre et les idées de son créateur.
Et si les liens entre Tchèques et Slovaques se distendaient ?
Concernant l’intérêt des Tchèques pour l’évolution de la situation en Slovaquie, le journal en ligne Forum24.cz remarque :
« La politique slovaque n’a longtemps suscité qu’un intérêt marginal chez nous. Les Tchèques considèrent les Slovaques comme un peuple très proche avec lequel ils s’entendent bien, grâce aussi à une barrière linguistique presque inexistante. Nombreux sont ceux qui continuent à voyager en Slovaquie pour rendre visite à leur famille, faire du ski ou passer les vacances. Parallèlement, peu regrettent vraiment la partition de la Tchécoslovaquie il y a un peu plus de trente ans. Cela dit, parmi les Tchèques, rares sont ceux à avoir une idée précise de ce que à quoi ressemble la scène politique slovaque. »
D’où la surprise, aujourd’hui, d’une majorité des Tchèques qui découvrent, comme l’explique encore l’auteur, que plus d’un Slovaque sur trois pense que l’Occident est responsable de la guerre en Ukraine et accepterait que la Slovaquie retourne dans la sphère d’influence russe. « La Slovaquie se trouve dangereusement à la croisée des chemins entre l’Est et l’Ouest, et personne ne sait quelle direction elle prendra finalement », peut-on lire en conclusion.
Václav Havel mériterait d’avoir une statue à Prague
« D’habitude, la sculpture dans l’espace public soulève des controverses. Le grand public a toujours une idée assez précise de ce à quoi devrait ressembler tel ou tel objet, et il apprécie particulièrement les dessins réalistes. » Voilà ce qu’on peut lire dans un article publié dans le quotidien Lidové noviny. Son auteur estime que Prague compte de nombreuses sculptures qu’elle qualifie de « bizarres » :
« Il existe des centaines de statues à Prague parmi lesquelles beaucoup, par leur images ou le thème qu’elles évoquent, sont sans aucun rapport avec la ville. Le VIe arrondissement de Prague, par exemple, où l’on trouve des monuments à la gloire des révolutionnaires sud-américains Simón Bolívar, Benito Juárez et Bernard O'Higgins, illustre bien ce propos. Les Turcs aussi tout récemment souhaitaient faire ériger à Prague une statue de leur ancien président Mustafa Emal Atatürk. Et ce bien que l’on ne voit pas bien pour quelle raison un tel monument de trois mètres de haut devrait voir le jour à Prague, et encore moins dans le quartier de Petřiny. »
Certes, certaines statues sont parfois problématiques, mais il est tout de même remarquable, comme le souligne encore l’auteur, qu’une ville comme Prague, où tout le monde ou presque peut donc en avoir une, ne possède pas de statue digne de ce nom du premier président de l’ère post-soviétique, Václav Havel :
« Il y a une dizaine d’années, une association avait été créée pour collecter des fonds pour la statue, mais sans succès. Les Pirates se sont récemment joints à l’initiative, mais là aussi sans effet particulier. Cela s’explique notamment par le fait que le premier modèle de sculpture envisagée présenté au public apparaissait comme trop caricatural. Or, si Václav Havel mérite une statue, il ne faut pas qu’il s’agisse d’une caricature qui agace ses partisans et réjouisse ses opposants. La mairie de Prague devrait en prendre la responsabilité et ne pas confier cette mission à des associations douteuses. Un appel d’offres en bonne et due forme parrainé par une institution sérieuse devrait être lancé. Jusqu’à présent, nous n’avons été les témoins que d’initiatives menées par des amateurs. »