Le nerf de la culture
L’argent n’est pas seulement le nerf de la guerre. Il est aussi celui de la culture ! Et la culture à son tour peut devenir un enjeu économique ! Aujourd’hui, nous abordons le problème des subventions et des réactions du milieu artistique aux défis économiques. Avec, en toile de fond, les récentes polémiques qui n’ont fait qu’accentuer des problèmes récurrents.
Pas étonnant que le symbole vienne de Brno, qui possède une énergie culturelle propre et qui est aussi une ville de théâtre. Car le milieu du théâtre est à l’avant-garde des combats pour la culture. Retour à Prague : les rapports entre la mairie de Prague et les organisations d’art à but non lucratif comme les théâtres n’ont jamais été de tout repos, entre changements fréquents de loi et délais.
En 2006, une série de réformes avait provoqué une levée de boucliers de certains théâtres pragois. Ils y dénoncaient des atteintes à la juste concurrence économique entre théâtres. L’affaire aura été portée jusqu’à la Cour Européenne des Droits de l’Homme de Strasbourg ! En guise de représailles, la mairie suspendra même un temps les subventions, à tel point qu’en ce début d’année, certains théâtres travaillaient sans filet et avec tous les risques commerciaux possibles !
L’enjeu est important puisqu’il ne s’agit pas seulement des théâtres tchèques diffusant des œuvres destinées à une «élite» intellectuelle. Sont également concernés tous ces théâtres plus grand public. Certains, commes les célèbres Lanternes Magiques et autre Théâtre Fantastika, attirent chaque année des milliers de visiteurs étrangers, qui s’y rendent en famille. Ces théâtres sont au cœur d’un véritable business, qui implique également les agences de voyage et les tours opérators. Et on ne parle pas des festivals, également liés au tourisme.
Fin mars, suite à la crise que nous venons d’évoquer, la mairie de Prague a donné son accord pour le lancement d’un nouveau système de subvention à l’art, établi en novembre 2007. Surprise pour les organismes artistiques : cette année, ils recevront moins que l’année passée ! L’onde de choc a été particulièrement vive dans les milieux artistiques. Pour certains théâtres, la baisse des aides s’élève à 60 % par rapport à 2007 ! Le 1er avril, plus de 200 artistes se réunissaient pour une conférence de presse au théâtre Archa et une pétition a déjà été lancée.En outre, les organisations à but non lucratif critiquent les nouvelles modalités d’allocations. Celles-ci sont divisées en quatre groupes, dont le premier est destiné à la vente des tickets, ce qui désavantage nettement les organismes non commerciaux. Autre critique : des fonds plus importants seraient attribués aux spectacles à grand public, qui ne sont pas nécessairement les plus pertinents artistiquement parlant. D’après les nouveaux critères, 25 % des subventions seraient allouées aux ventes de ticket, 25 autres aux activités artistiques, 20 % aux étudiants en art et aux jeunes artistes et 30 % aux dons divers.
Le nouveau système rappelle la loi, aujourd’hui abrogée, sur le calcul des déductions sur les revenus des employés étrangers en République tchèque, et dont nous parlions récemment sur nos ondes. Un nouveau mode de calcul, qui, là aussi, faisait surtout des mécontents. Sauf que dans le cas des artistes, la perte est réelle. Le gouvernement essaie-t-il d’économiser sur la culture ?
Les critiques globales des organisations culturelles portent, depuis la création de subventions à la culture, sur la non-transparence et la corruption. Quelque soit la valeur des jugements, une chose est sûre, les sphères politiques et culturelles doivent renouer le dialogue. Car la question des subventions à la culture porte en elle des enjeux économiques importants, liés en premier lieu au tourisme.