La Communauté du Chemin Neuf depuis 1997 en République tchèque
Merci d’être avec nous, sur Radio Prague, à l’écoute d’un programme spécial préparé pour la troisième journée des fêtes de Noël pour lequel nous avons invité au micro Kamil Novak, vicaire, qui vous fera visiter l’église Saint-Apollinaire à Prague, qui vous dira quelle signification ont pour lui les fêtes de Noël, comment il les passe, vous apprendrez aussi dans quelle église à Prague les messes sont célébrées en français pour les francophones. Mais avant tout, Kamil Novak vous présentera la communauté du Chemin Neuf qu’il a fondée en République tchèque, après sept années passées à Lyon, en France, où cette communauté catholique à vocation œcuménique a été fondée, en 1973.
Vous êtes parti en France tout récemment, au mois d’octobre dernier. C’était un retour « au bercail », à Lyon ?
« C’est vrai, souvent, on part à Lyon, on était à Lyon aussi pendant cet été, toute la communauté : cela fait, avec les enfants, une cinquantaine de personnes, exactement pour voir les lieux où la communauté est née et pour voir les lieux où elle habite aujourd’hui, c’est autour de Lyon, surtout. En Tchéquie, la Communauté du Chemin Neuf s’est créée en 1997, à Tuchomerice, près de l’aéroport de Prague-Ruzyne. Parmi ses fondateurs il n’y avait pas que les Tchèques, il y avait aussi des Français, une Brésilienne, une ou deux Polonaises, notre communauté est donc internationale, ouverte au monde. »Votre action s’oriente autour du principe de l’unité ?
« C’est ça, en effet, notre appel principal à préciser dans chaque pays c’est faire, créer, travailler pour l’unité - l’unité des personnes, des couples, l’unité entre les Eglises aussi, l’unité entre les différentes cultures. Il dépend des besoins, de la situation concrète dans chaque pays, dans chaque région et d’après ce besoin, on s’adapte, on concrétise cet appel : faire l’unité dans la différence. »Vous pouvez donner quelques exemples concrets de vos actions ?
« Ce qui est le plus important, à mon avis, c’est le travail pour les couples, cela s’appelle une session Cana, c’est tout un programme qui propose des sessions, des week-end de formation et des rencontres mensuelles destinées aux couples, occasion notamment pour ceux qui vivent un moment plus difficile de renouer le dialogue. Les sessions sont organisées surtout pendant l’été. Nous proposons aux couples de venir avec les enfants qui sont gardés dans une colonie de vacances et on se centre sur la vie des couples. Le but, c’est qu’ils trouvent du temps pour eux, pour qu’ils puissent à la fin de la session se dire, oui, moi, je le choisis, je te rechoisis comme mon époux, comme mon épouse. C’est quelque chose comme les noces, les noces de Cana. On essaie vraiment de faire une ambiance pour qu’ils puissent revivre les noces et rechoisir les uns les autres dans les couples pour leur vie… »
En République tchèque, la Communauté du Chemin Neuf a trouvé des locaux dans un ancien couvent des Jésuites à Tuchomerice, utilisé sous le régime précédent en tant que foyer de long séjour pour les personnes malades. Après 1990, vous l’avez visité et vous avez décidé que ce sera ici, le siège de la Communauté du Chemin Neuf ?
« Oui c’est exactement comme ça et c’était, je crois, un des miracles après le communisme, que l’Etat lui- même a proposé cette maison à l’Eglise gratuitement presque. Donc après avoir proposé cette ruine à l’Eglise, parce qu’à l’époque c’était pratiquement une ruine, la communauté a dit oui, tout de suite. Par ses dimensions, la maison convenait à tout ce qu’on fait, mais aujourd’hui, il est vrai qu’elle est devenue un peu petite pour nos sessions… »Quel est le rapport de votre communauté avec l’église Saint-Apollinaire à Prague ?
« C’était le cardinal Miloslav Vlk par qui on a reçu cette mission, la mission de s’occuper d’un centre missionnaire. C’est ainsi que nous nous sommes retrouvés ici : le presbytère de la paroisse de Saint-Apollinaire est, dans le même temps, un centre missionnaire chargé d’essayer de rapprocher la foi et Dieu à la société aujourd’hui. Notre recherche, notre mission est d’essayer de reformuler, de montrer aux gens qui ne sont pas croyants qu’est-ce que ça veut dire croire en Dieu, qu’est-ce que ça veut dire l’Eglise, qui sommes-nous, en fait. »
Vos sessions se passent toutes les semaines ?
« On a un programme chaque jour dans la semaine, on a, en effet, plusieurs programmes destinés surtout aux jeunes qui viennent soit ici ou nous-mêmes, notre équipe part régulièrement une fois par semaine dans les écoles qui sont dans les alentours pour leur parler justement de la foi. »
Quel est l’intérêt des jeunes pour ces sessions ?
« Il faut que vous demandiez de l’autre côté /rire/ - mais moi je dirais que c’est vraiment assez difficile, compliqué, de parler de Dieu aujourd’hui, parce que c’est tellement inhabituel, c’est tellement fou, cela dépasse souvent la pensée des gens qui ne pensent plus à la vie spirituelle où à des choses qui dépassent le matériel. Mais, en même temps, si l’on commence par ce côté de la vie, si l’on parle du sens de la vie, du sens de la mort, de tout ce qui est dans notre vie, tout ce qu’on peut rencontrer, et si on peut ensuite aller plus loin, essayer d’élargir les questions, de parler du vécu de l’homme dans la vie spirituelle, de la création du monde, très vite on passe dans une ouverture au spirituel, au transcendantal qui est en nous et qui est, finalement, recherché par la majorité des gens. »Nous sommes dans la paroisse à côté de l’église Saint-Apollinaire, voulez-vous nous faire faire une petite visite de celle-ci ?
« Cette église a été fondée par Charles IV au début du XIVe siècle. Sa fondation s’inscrit dans tout un projet de Charles IV de bâtir un nouveau quartier, la Nouvelle-Ville de Prague. Sa partie importante, c’est cette église Saint-Apollinaire et une autre, juste à côté, à Karlov. Charles IV a conçu son projet comme si c’était Jérusalem, en s’inspirant du temple de Jérusalem et donc, la montée c’est ici, au Saint-Apollinaire, alors que le pic, le but du chemin c’est à Karlov, à l’église de la Vierge-Marie de Karlov. »
L’église Saint-Apollinaire s’est conservée dans son état originel ?
« L’église est gothique, elle n’a pas été baroquisée comme c’était le cas de nombreuses églises gothiques à Prague. Si elle a été épargnée de cela et conservée son aspect gothique, elle n’a pas évité des remaniements néo-gothiques datant du début du XXe siècle. L’architecte Jan Mocker, auteur de remaniements du château de Karlstejn, a refait notre église dans ce style, en sorte que, finalement on n’a pas vraiment des pierres d’origine, l’église a été refaite un peu autrement. Les fresques sur les murs sont originales, mais les voûtes sont en partie remaniées dans le style néo-gothique du début du XXe siècle. Seules les voûtes dans le presbytère, le lieu où le prêtre célèbre, sont originales. »Vous m’avez dit qu’une collecte a été faite au profit de la restauration de l’orgue dans cette église ?
« Oui c’est vrai, malheureusement l’orgue dans cette église n’est pas un instrument très ancien, il est donc assez difficile de trouver une aide financière de l’Etat. Nous avons essayé de demander au 2e arrondissement de Prague d’ouvrir une collecte pour trouver l’argent qui permettrait de restaurer l’orgue pour qu’on puisse l’utiliser pour les concerts. En ce moment il n’est pas possible de jouer de cet instrument… »
Les Pragois aiment faire des promenades pendant les fêtes de Noël, est-ce qu’ils pourront visiter également votre église ?
« Notre église est ouverte dimanche, le 23 décembre et dimanche le 6 janvier pour la messe qui commence à 18 heures. Pour les visiteurs qui veulent se promener, visiter l’Eglise, la crèche de Noël ainsi qu’une exposition de photos qui y est installée, l’église est ouverte les jours de fêtes, jusqu’au 26 décembre, entre 16 et 17 heures. »La dimension spirituelle des fêtes de Noël, il parait qu’elle reste à l’écart d’une commercialisation, d’une consommation de plus en plus excessive, qu’est-ce que vous en pensez ?
« C’est vrai que, si des gens trouvent le temps de s’arrêter et de réfléchir un peu je crois que s’ils le trouveront, ce sera vraiment un temps d’ouverture justement à tout ce qui dépasse les frontières du matériel, de tout ce qui est visible, de tout ce qui est audible et ça, à mon avis, c’est le début de quelque chose qui pourrait vraiment aider les hommes, même pour ce qui est du sens des fêtes de Noël : trouver de la saveur, ce qui va dans les profondeurs, qui peut les nourrir aussi, qui peut leur donner la joie et la paix profondes. Et moi, je le vois quotidiennement, il suffit de peu, il suffit juste de réfléchir tout simplement, réfléchir sur soi, d’avoir l’habitude, au moins une fois par mois, une fois par semaine, de s’arrêter, de se dire qu’est-ce que j’ai fait pendant la semaine. Est-ce que tout ce que j’ai fait, est-ce que vraiment j’ai concrétisé les priorités de ma vie, est-ce que j’ai investi dans les relations. Est-ce que vraiment je peux dire à la fin de la semaine que j’ai fait un pas en avant, ou en arrière ? Et là, si on est capable d’avoir ce temps privilégié pour s’arrêter, tout pourra changer dans notre vie, et on pourra aller vraiment dans la profondeur… »
Et peut-être que les fêtes de Noël sont une occasion pour le faire… Comment vous les passez, d’ailleurs, les fêtes ?
« Pour nous, c’est divisé, une partie de notre groupe qui habite dans la maison à Tuchomerice va partir pour la France, à l’abbaye de Hautecombe qui accueille une rencontre des célibataires, donc ceux qui se sont consacrés à Dieu et qui ne sont pas mariés. Puis, moi, en tant que prêtre, je reste avec cinq ou six autres personnes ici pour animer les messes, pour animer notre programme culturel conçu pour les fêtes de Noël. Le principal, c’est qu’on reste ensemble, que nous allons vivre Noël aussi dans une famille qui s’est créée entre nous. On va tout préparer bien sûr, on va se faire le repas, décorer le sapin de Noël, tout cela c’est à nous de le faire. Pour moi, en tout cas, Noël est toujours aussi un temps privilégié de la paix, de la fraternité, de la rencontre avec les autres. Et même si je suis un prêtre en mission, j’ai toujours ce temps pour moi et pour être avec les autres. »
La troisième journée des fêtes de Noël dans le calendrier tchèque est celle de saint Etienne. Qui était ce saint, pourquoi une fête lui est-t-elle consacrée ?
« Saint Etienne est un personnage très important pour toute l’Eglise parce que c’est un premier martyre. Après la résurrection de Jésus c’est lui, le premier à montrer aux Juifs que Jésus n’était pas mort mais qu’il est ressuscité. C’est lui, le premier qui l’a dit face à face aux Juifs qui avaient crucifié Jésus qu’ils s’étaient trompés parce que ce Jésus, il est ressuscité, il l’a vu dans ses yeux restés ouverts. Après qu’il a dit cette phrase, les Juifs ont pris des pierres, les ont jetées et l’ont tué. Saint Etienne a donc était le premier martyr du christianisme. »
Et pourtant dans les croyances populaires la fête de la Saint-Etienne c’est l’occasion de se réjouir, de donner et de recevoir des étrennes ?
« C’est vrai que, dans le christianisme, la question de la mort et du martyre est, d’un côté, triste, c’est quelque chose qui montre la brutalité des hommes capables de tuer quelqu’un pour leur foi, mais de l’autre côté, la mort, ça veut dire aussi que c’est une entrée dans la résurrection, dans la vie éternelle. C’est donc tout une espérance qui est montrée par le martyre : que cette vie, ici, sur la Terre, n’est qu’une partie de notre vie, que la vie continue après la mort. »
Avant de terminer, j’ai voulu vous demander, parce que vous dites vos messes en tchèque, est-ce qu’on trouve une église à Prague où les messes sont célébrées en français ?
« Chaque dimanche, à 11 heures, dans le quartier de Mala Strana, à l’église Saint-Joseph, il y a les messes pour les français et pour les francophones qui se trouvent à Prague. Il y a tout une communauté qui est assez vivante : des Français, des familles françaises qui habitent à Prague et qui s’organisent pour les fêtes, pour la préparation des enfants pour la première communion, pour les sacrements. Donc vivement, je vous invite, si quelqu’un qui est à Prague a envie, d’y participer. »