Journée du souvenir des victimes du régime communiste, pour la 4e fois en Tchéquie
Le 27 juin est la Journée des prisonniers politiques et des victimes du régime communiste. Elle a été instaurée à la mémoire de Milada Horakova, politicienne démocratique, condamnée à mort pour haute trahison dans un procès monstrueux et pendue dans la prison de Pankrac le 27 juin 1950. Milada Horakova est devenue le symbole de la Résistance. Parmi les 241 personnes exécutées par le régime communiste pour des raisons politiques, elle était la seule femme envoyée à la mort, malgré les protestations venant du monde entier, malgré le fait qu'elle était mère d'une fille âgée alors de 16 ans...
Juriste, et députée du parti national - social, engagée dans la cause des femmes, active dans la Résistance après l'occupation nazie, Milada Horakova a été arrêtée par la gestapo, en 1940. Après avoir échappé à la peine de mort, à Berlin, elle n'a pas pu échapper à l'arbitraire communiste. Cherchant à sauver la démocratie et le pluralisme politique en Tchécoslovaquie d'après-guerre sombrant dans la dictature, elle a été arrêtée, après le putsch de février 1948, accusée de haute trahison et condamnée à mort.
En 2005, soit 55 ans après sa mort, le public a pu entendre les dernières paroles du plaidoyer prononcé par Milada Horakova. Trois bandes sonores portant la mention « Ne rien diffuser des dernières minutes du procès... » ont été sorties des archives nationales tchèques grâce à un documentariste de la TV tchèque. La voix claire et forte de Milada Horakova, surgissant d'un passé obscur, a suscité de nombreuses réactions remplies d'émotion :
« Messieurs les juges, il m'est difficile de trouver des raisons pour me défendre », affirme en introduction de son plaidoyer Milada Horakova, avant que la parole lui soit coupée. Comme il ressort de l'enregistrement du procès diffusé par la Radio en 1950, les parties dont la direction communiste a estimé qu'elles ne pouvaient être diffusées ont fait défaut pour être remplacées par des commentaires d'un animateur. Les documents découverts 55 ans après prouvent que ceux portés pour authentiques pendant de longues années par la propagande communiste ont été falsifiés. Milada Horakova n'a pas capitulé face au verdict de mort :
« Nous avons longuement discuté de ce qu'on appelle la conviction. Car c'est par ma conviction que mes actes étaient motivés. Je dois dire que la sécurité de l'Etat et ses organes ont manifesté plus de patience pour me convaincre, alors que moi, j'ai été beaucoup moins patiente, après février 48, pour me persuader que les violences et les injustices qui étaient à l'origine de mes actes étaient réelles ou passagères. Je mentirais en disant que j'ai changé, que je suis tout autre, que ma conviction a changé. Cela ne serait ni vrai, ni honnête. »
Et Milada Horakova d'ajouter qu'elle acceptera toute peine qui sera trouvée pour elle...
Ces derniers jours, l'Institut de documentation et d'investigation sur les crimes du communisme a publié une brochure intitulée « La vérité sur les prisonnières politiques des années 1950. » Des témoignages sur les cruautés subies dans des prisons communistes et la détermination de ne pas s'incliner sont fournis par les femmes devenues victimes de l'arbitraire politique. Pour Dagmar Skalova, l'une des prisonnières des années 1950 qui a échappé à la peine capitale, la prison n'était pas une humiliation, car elle était condamnée pour une juste cause :
« Beaucoup était emprisonnés sans savoir pour quelle raison, mais moi, je le savais exactement. Je me suis dit qu'il était de mon devoir de lutter contre le régime, car j'ai travaillé comme éducatrice dans un centre pour jeunes filles et il était de mon devoir d'assurer à nos enfants un meilleur avenir et donc de lutter contre les injustices de toute cette machine communiste... Les affaires personnelles ont été mises de côté. Les enquêteurs m'ont demandé pourquoi je suis allée contre le régime, car, d'après eux, rien ne m'a manqué. Non, rien ne m'a manqué, sauf la liberté. »
Hilda Cihakova est une autre prisonnière politique des années 1950. On écoute son témoignage:
« Nous étions très mal traités, torturés, battus, on me donnait des coups de pied. Dans la prison de Ruzyne, lorsque nous sommes allées aux interrogatoires, il a fallu avoir un bandeau sur les yeux pour que nous ne voyions pas nos enquêteurs. Lorsque nous sommes arrivées dans la salle des interrogatoires, nous étions attachées par une chaîne à une planche. »
Les femmes n'échappaient pas aux cruautés dans les prisons communistes. Albina Palkoskova, qui a passé 12 ans en détention, en sait aussi quelque chose:
« Lorsqu'ils m'ont dit d'ôter mes boucles d'oreilles, j'ai pensé que c'était pour me les prendre, mais c'était pour me donner des gifles. J'ai été attachée à une chaise pour ne pas tomber, tellement c'était dur, ma tête tournait de gauche à droite et de droite à gauche. Leur pratique préférée était de frapper les femmes sur le dessous des pieds, ce qui fait très mal, après il était impossible de marcher pendant plusieurs jours. »
L'objectif de la Journée de commémoration des prisonniers politiques, le 27 juin, est de ne pas oublier les victimes des représailles communiste. Le bilan est lourd : 240 hommes et une femme exécutés, plus de 8000 prisonniers politiques morts dans des mines d'uranium, des forges et des carrières, près de 600 détenus qui n'ont pas survécu aux interrogatoires. Environ 500 hommes ont été tués à la frontière. Plus de 250 000 personnes ont été condamnées et emprisonnées injustement. 70 000 personnes ont été déportées dans des camps de travaux forcés, près de 60 000 hommes ont travaillé dans des PTP - camps militaires de travaux forcés. Plus de 400 000 citoyens tchécoslovaques ont fui ou ont été chassés du pays.