De Barrandov à Hollywood - rencontre avec BB

Troisième volet aujourd'hui de notre entretien réalisé avec Norbert Auerbach. Dès les années cinquante, il travaille pour Columbia, une des plus importantes sociétés de production cinématographique. Il participe à la production de plusieurs des grands succès de l'époque et côtoie les nouvelles vedettes du grand écran, comme Brigitte Bardot, sur le tournage de Et Dieu créa la femme :

'Et Dieu créa la femme'
« Brigitte Bardot... L'histoire commence quand Raoul Lévy - qui était à ce moment-là un producteur très important - est venu chez nous à la Columbia en disant qu'il avait découvert une fille extraordinaire qu'il fallait absolument voir. Il voulait produire un film, Et Dieu créa la femme, avec Roger Vadim à la mise en scène. On a regardé ça puis on lui a dit : 'Ecoute Raoul, il n'y a pas assez d'éléments importants dans ce film, mais si pour le rôle principal masculin tu peux engager Curd Jürgens - qui était un nom bien connu à l'époque - alors on te finance'. Une semaine plus tard, Raoul est revenu et nous a dit qu'il avait Curd Jürgens... C'est comme ça que nous sommes arrivés à tourner Et Dieu créa la femme. »

Quels souvenirs gardez-vous de Brigitte Bardot ?

« Pour moi, elle a toujours été une fille un peu drôle, dans le sens d'étrange, si on la compare à des gens normaux... Elle n'aimait pas beaucoup de gens autour d'elle, elle était entourée d'un petit cercle d'amis. Comme vous le savez, elle s'est installée dans la Madrague. De temps en temps elle tombait amoureuse d'un homme et après c'était la folie complète. On ne la voyait plus, elle était avec ce monsieur au lit, sur la plage, etc... Mais ce n'était pas quelqu'un qui communiquait beaucoup en privé. Elle était très tranquille, toujours dans un coin, et à part ses grandes passions pour quelques hommes et les animaux, ce n'était pas quelqu'un avec qui on pouvait sortir dîner et parler de théâtre, littérature ou de ce genre-là... Je ne sais pas si vous avez lu son livre, mais selon moi c'est une fantaisie complète. Elle y parle de ses amours et de sa vie : c'est comme ça qu'elle se l'imaginait, mais ce n'était pas comme ça en réalité. »

Vous avez parlé de folie... Est-ce que ses prises de positions extrêmistes ces dernières années vous ont étonné ?

« Non, rien ne m'étonne avec Brigitte Bardot. On ne savait jamais ce qu'elle allait faire. Par exemple, elle avait une grande passion pour un jeune photographe dont on n'a pas beaucoup parlé - un garçon très très gentil - mais tout d'un coup elle tombe sur Günther Sachs, qui était à mon avis un personnage odieux. On n'aurait pas attendu que Brigitte se jette dans ses bras comme elle l'a fait. Surtout qu'elle n'était pas pauvre et pas d'une famille pauvre, ce n'est pas le luxe que lui a offert cet homme-là qui l'attirait. On ne sait pas... »


Suite de cet entretien demain. Au programme notamment, la rencontre avec Louis Malle et la production du film Le Voleur avec J.P Belmondo