Tomas Bata demande la réhabilitation de son oncle
Tomas Bata, fils du fondateur de l'empire de la chaussure Bata, demande la révision du procès de 1947 au terme duquel l'ancien chef de l'entreprise familiale et son oncle, Jan Antonin Bata, a été condamné à 15 ans de prison pour collaboration avec les nazis. Il ne demande pas la restitution des biens familiaux confisqués, mais la réhabilitation de l'honneur de la famille.
C'est en 1894 que l'un des premiers self-made-man du pays, Tomas Bata senior, a ouvert à Zlin, ville de Moravie centrale, son premier atelier de chaussure. Dans les années 1920, ses usines vivent un boom, mais la mort de Tomas Bata, en 1932, dans un accident d'avion, est un premier coup dur. C'est alors que son frère, Jan Antonin Bata, devient l'héritier de la firme et continue l'expansion, jusqu'au début de la guerre où il est arrêté par la Gestapo et s'enfuit au Brésil. Pendant la guerre, les activités familiales sont reprises par Tomas Bata junior, installé au Canada. Après la guerre, les usines Bata à Zlin sont étatisées. Jan Antonin Bata, qui les a dirigées après la mort de son frère, est condamné dans un procès s'appuyant sur les décrets du président Benes à 15 ans de prison pour collaboration.
Aujourd'hui, son neveu, Tomas Bata, 91 ans, demande au Parquet général tchèque que le procès de son oncle soit révisé. Il le fait dans le but de réhabiliter l'honneur de toute la famille Bata : comme il dit, « la condamnation injuste de Jan Antonin constitue une tâche à sa réputation. » Et il vient avec de nouvelles pièces devant prouver que le procès était manipulé. Dans sa cause, il est appuyé par le préfet de la région de Zlin, Libor Lukas, lui-aussi convaincu que le procès était manipulé. Les plus récentes recherches ont révélé que le procès a été préparé par un communiste fanatique, Bedrich Pokorny. Le tribunal dit « national révolutionnaire » constitué pour punir les traîtres et collaborateurs et dont les verdicts étaient sans appel a condamné, en 1947, Jan Antonin Bata à 15 ans de réclusion par contumace. Sa culpabilité consistait dans le fait qu'il ne s'était pas déclaré publiquement partisan du gouvernement tchécoslovaque exilé à Londres.
La reprise du procès est incertaine. Les experts judiciaires sont très prudents dans leurs évaluations puisqu'il s'agit du thème sensible des décrets Benes qui pourrait créer un précédent pour d'autres demandes. Le médiateur de la République Otakar Motejl qui, il y a dix ans, exerçait les fonctions de juge de la Cour supérieur et avait refusé la plainte soumise par les filles de Jan Antonin Bata, se déclare prêt à réexaminer le verdict. Or les chances de révision du procès sont, d'après lui, minimes, compte tenu l'impossibilité d'appliquer la législation actuelle à la juridiction exceptionnelle des années d'après-guerre.