Psychiatrie : « Quand c’était encore possible, nous avons ouvert l’hôpital au public »
Chaque automne, de nombreux événements sont organisés partout dans le monde à l’occasion de la Journée mondiale de la santé mentale, célébrée le 10 octobre. Cette année, les conférences, rencontres, happenings et concerts ont été annulés en Tchéquie à cause de la pandémie de Covid-19, alors que les spécialistes s’inquiètent des conséquences de celle-ci sur le bien-être des gens. Peu avant le reconfinement partiel du pays, l’Hôpital psychiatrique de Kosmonosy a ouvert ses portes au public, à l’occasion des Journées de la santé mentale, organisées dans ses locaux pour la 9ème année consécutive, avec l’objectif de déstigmatiser les troubles psychiques.
Tournois de pétanque et de tennis-ballon, jeu de quilles, quiz et exercices de mémoire : toutes ces activités, et bien d’autres encore, ont été proposées aux patients et aux visiteurs. « Des manifestations comme celle-ci ouvrent nos esprits », estime l’un des organisateurs, le plasticien et art-thérapeute Michal Segert. Il explique :
« Les Journées de la santé mentale proposent chaque année un programme riche : des compétitions, jeux, conférences et habituellement aussi des visites de différents services de l’hôpital, ainsi que des ateliers. Les patients participent, dans le cadre du traitement, à des thérapies qui se présentent à cette occasion au public. Celui-ci est habituellement nombreux à se rendre chez nous, même si cette année, il est bien sûr venu en nombre limité. Pour les visiteurs, c’est souvent une belle expérience à laquelle ils ne s’attendaient pas. »
Situé à une cinquantaine de kilomètres à l’est de Prague, la petite commune de Kosmonosy est reliée à la ville de Mladá Boleslav. L’hôpital psychiatrique qui a été aménagé, il y a 150 ans, dans les bâtiments de l’ancien collège des Piaristes, est un des plus vieux établissements du genre en République tchèque. Il prend en charge pas mois de 600 patients atteints de différents troubles mentaux. Leur traitement inclue des activités thérapeutiques multiples : l’ergothérapie manuelle et artistique, ainsi que l’hippothérapie. Les séances de celle-ci sont organisées par Kamila Petrová :
« Nous avons ici sept chevaux, deux chèvres, un mouton, quatre lapins et deux cochons d’Inde qu’on utilise pour la zoothérapie, dans les services où les patients ne peuvent plus sortir ou ont des difficultés motrices. Presque tous les patients de notre clinique participent aux séances d’hippothérapie. Pour les patients géronto-psychiatriques, qui sont assez nombreux, nous avons deux poneys. Lors des séances, on promène les chevaux, on s’en occupe aussi, on les monte parfois. Le patient le plus âgé à être monté à cheval ici avait 93 ans. »
« Cela apporte aux patients des sensations réjouissantes. Les chevaux en particulier sont beaux à voir et agréables à toucher, aussi parce que leur température est plus élevée que celle de l’homme. Ils sont gracieux, ils sentent bon… Même si quelqu’un a peur des chevaux, ce qui arrive de temps en temps, on peut surmonter cela grâce aux poneys. »
Touché par l’épidémie de coronavirus, tout comme les autres établissements de santé du pays, l’Hôpital psychiatrique de Kosmonosy est désormais fermé au public et les visites n’y sont autorisées que dans des cas particuliers. L’art-thérapeute Michal Segert évoque les problèmes qu’implique cette situation :
« La crise sanitaire, la manière dont elle est traitée dans les médias, et le confinement sont un facteur de stress et d’anxiété pour tout le monde, ce n’est pas nouveau. Cette situation peut avoir de lourdes conséquences sur la santé mentale en général. Pour l’instant, nous n’apercevons pas une aggravation notable de l’état de santé de nos patients. Mais nous sommes confrontés à une multitude de problèmes relatifs au fonctionnement de la clinique, nous ne pouvons pas assurer toutes les thérapies par exemple. »
« Nous essayons de trouver des solutions alternatives aussi pour rassurer les patients qu’on reste là, qu’on ne renonce pas même dans cette situation difficile. C’est aussi une des raisons pour lesquelles, quand c’était encore possible, nous avons organisé les Journées de la santé mentale. Même si cela a demandé beaucoup d’effort de notre part. »