Des écrivains et artistes biélorusses trouvent refuge en Tchéquie
Ce lundi, quatre membres de l’organisation biélorusse de défense des droits de l’homme Viasna, tous arrêtés par le régime autoritaire de Loukachenko, reçoivent à Prague le prix Homo Homini, à l’occasion de l’ouverture de One world, le festival international du film documentaire consacré aux droits humains. Le Centre littéraire tchèque, quant à lui, organise en mai et juin des résidences pour six artistes biélorusses en République tchèque. Une manière de soutenir la création libre dans un pays où les artistes ont figuré en première ligne, il y a quelques mois, dans la mobilisation contre la réélection du président biélorusse.
Plusieurs institutions culturelles, dont le Théâtre national de Prague et la Maison des Arts de Brno, se sont réunies pour offrir à six écrivains, dramaturges et plasticiens biélorusses des bourses de résidences artistiques en République tchèque. C’est le Centre littéraire tchèque et la Bibliothèque morave de Brno qui sont les principaux organisateurs de ces séjours, comme l’explique Tomáš Kubíček, le directeur de la Bibliothèque morave :
« Etant témoins de ce qui se passe en Biélorussie, nous avons voulu nous montrer solidaires avec leurs artistes, leur faire savoir qu’on ne les oublie pas. Nous nous sommes mis d’accord assez rapidement sur l’organisation de ces résidences avec nos partenaires, ainsi qu’avec Syarhey Smatrytchenka qui représente l’ambassade de la culture indépendante biélorusse en République tchèque, fondée l’année dernière à Brno auprès du Centre du théâtre expérimental. Nous avions d’abord envisagé des résidences littéraires, mais finalement, le Théâtre national de Prague accueille deux femmes dramaturges et la Maison des Arts de Brno a offert des bourses à deux plasticiens. Le Centre littéraire, quant à lui, accueille deux écrivains qui se rendront à Brno le 15 mai. »
Parmi les bénéficiaires des bourses figurent la dramaturge, actrice et metteuse en scène Axana Hayko, menacée d’arrestation pour avoir fondé un centre de culture indépendante à Brest, ou encore l’artiste Uladzimir Hramovitch et la photographe Aleksja Ptcholka, persécutés tous les deux en Biélorussie et installés désormais en Ukraine et en Pologne.
Parmi la cinquantaine de candidatures reçues pour les résidences d’écrivains, deux ont été retenues par le Centre littéraire tchèque. Tomáš Kubíček nous en dit plus :
« Nous allons d’abord accueillir Syarhey Kalenda, écrivain et journaliste qui publie également une revue littéraire. C’est une personnalité bien établie sur la scène culturelle biélorusse, il publie des œuvres prosaïques depuis vingt ans. Malheureusement, il n’est pas connu du public tchèque qui, globalement n’a qu’une très vague idée de la création littéraire biélorusse. En fait, les lecteurs tchèques connaissent uniquement Svetlana Alexievitch, prix Nobel de littérature, qui est le seul écrivain biélorusse publié en Tchéquie. Nous espérons donc que la situation évoluera lorsque le public aura l’occasion de connaître Syarhey Kalenda, ainsi que la poétesse Nasta Koudasovova qui sera également en résidence en Tchéquie et dont les recueils de poésie ont reçu plusieurs prix. Tous les écrivains et artistes resteront un mois. Pendant cette période-là, ils rencontreront les journalistes et les lecteurs. Ils participeront aussi à des événements culturels organisés par plusieurs théâtres tchèques, ainsi que par la Bibliothèque Václav Havel. »
Accéder aux résidences et bourses n’est pas une évidence pour les artistes biélorusses, puisque le pays coincé entre l’Europe et la Russie n’est pas membre de l’Union européenne. Mais pour le directeur de la Bibliothèque morave de Brno, soutenir la culture biélorusse est presque une obligation pour les Tchèques, compte tenu de leur propre expérience d’un régime autoritaire :
« Plusieurs mois après les grandes manifestations qui ont suivi la réélection d’Alexander Loukachenko, l’intérêt des médias tchèques pour la Biélorussie a diminué. Nous espérons le raviver avec ces résidences littéraires et artistiques. Sous le régime communiste, la Tchécoslovaquie et sa culture bénéficiaient de ce même soutien des intellectuels étrangers. »
Le Théâtre national de Prague a déjà fait savoir qu’il lancerait un nouvel appel à candidatures pour les résidences destinées aux artistes biélorusses à l’automne.