300e anniversaire de la béatification de Jean Népomucène
Vous connaissez peut-être saint Jean Népomucène (svatý Jan Nepomucký) pour avoir vu sa statue sur le pont Charles de Prague, peut-être même avez-vous touché du doigt les plaques en bronze aux pieds de la statue, ou encore la croix fixée dans la balustrade du pont, là où le futur saint a été jeté dans la rivière Vltava à la fin du XIVe siècle. Il paraît que toucher ces reliefs porte bonheur… A l’occasion du 300e anniversaire de la béatification du saint tchèque le plus connu dans son pays et à l’étranger, le 31 mai 1721, nous vous proposons de découvrir deux sites tchèques qui lui sont dédiés.
« Nous nous trouvons dans l'église Saint-Jean-Népomucène. C’est une église de pèlerinage dédiée à ce saint. Elle a été construite à l’emplacement de sa maison natale » explique Štěpánka Kodýdková, directrice du Musée Saint Jean Népomucène (Svatojánske muzeum, https://sites.google.com/view/museumsaintjohnnepomuk/home).
Nous nous trouvons donc à Nepomuk (Pomuk en allemand), une commune de 4 000 habitants située dans la région de Plzeň, dans le sud-ouest de la République tchèque. C’est là qu’est né vers la moitié du XIVe siècle Jean Népomucène, devenu juriste, puis vicaire général de l’archevêché de Prague, mort en martyr en 1393, après avoir été la victime d’un conflit entre l’Eglise et le roi de Bohême Venceslas IV.
Nous poursuivons notre visite de l’église du village, en compagnie de Štěpánka Kodýdková :
« La première pierre de l’église a été posée en 1639 par František Matyáš de Šternberk. L'église était initialement dédiée à saint Jean Baptiste, que l'on peut voir sur l'autel ci-dessus. Elle n'a été consacrée à saint Jean Népomucène qu'après sa canonisation en 1729. Sur l'autel central se trouve sa statue grandeur nature. L'autel abrite également les reliques du saint. Dans la partie centrale de l'église est situé un autre autel qui, selon la légende, se trouve à l'endroit où était placé le berceau de saint Jean. Nous pouvons admirer quatre peintures intéressantes inspirées de la vie et de la légende de saint Jean Népomucène : elles représentent sa naissance, puis nous le voyons en tant que confesseur de la reine Žofie et enfin comme un martyr, torturé et jeté dans la Vltava. Récemment, un nouveau lustre a été installé dans l’église, en forme d'auréole à cinq étoiles, qui fait partie des attributs de saint Jean Nepomucène. »
A l’époque baroque, Jean Népomucène a fait l’objet d’un véritable culte populaire dans les pays tchèques, pour être plus tard rejeté, par certains, en tant qu’icône de la Contre-Réforme menée en pays tchèques par l’ordre des jésuites. Ses statues sont omniprésentes dans le pays, dans les églises et sur les ponts ou dans de petites chapelles ou oratoires de campagne.
En République tchèque, un lieu de pèlerinage lui est également dédié et pas n’importe lequel : il s’agit de l’église de Zelená Hora (la Montagne Verte), située près de Žďár nad Sázavou, dans la région de Vysočina, et classée depuis 1994 au patrimoine mondial de l’UNESCO.
Edifiée selon un plan en étoile, c’est l’œuvre la plus originale de l’architecte Jan Blažej Santini Aichl dont le style extrêmement personnel se situe entre le gothique et le baroque. On écoute la guide Marie Dubová :
« L’architecte de cette église, l’artiste de génie Jan Blažej Santini Aichl, est issu de la troisième génération d’architectes et tailleurs de pierre italiens fixés depuis le XVIIe siècle à Prague. Santini a eu la chance d’être reconnu et recherché déjà de son vivant. Bien que mort relativement jeune, à l’âge de 46 ans, il est l’auteur de plus de 60 constructions et reconstructions. Nombre d’entre elles se trouvent dans la région de Žďár, comme le couvent cistercien remanié en château et propriété de la famille Kinský. »
Du haut de la Montagne Verte, nous bénéficions d’un beau panorama sur les bâtiments du couvent entouré d’un étang. La fondation du couvent remonte à 1252, année où les moines de Zelená Hora près de Nepomuk, dans la région de Plzeň, arrivent à Žďár pour y fonder un nouveau couvent qui hérite du rôle de couvent-mère et adopte son nom. Après la mort en martyr de Jean de Népomucène, l’engouement pour son culte commence au couvent de Žďár.
En 1719, les restes de Jean Népomucène font l’objet d’une étude demandée par l’archevêque de Prague.
La même année, soit dix ans avant la canonisation effective de Jean Népomucène, l’abbé du couvent de Žďár, Václav Vejmluva, décide de construire une église de pèlerinage à la gloire du futur saint qui montrerait en même temps le lien entre les deux maisons cisterciennes. Les travaux sont confiés à Jan Blažej Santini Aichl qui conçoit l’église comme un reliquaire monumental. Son travail est fondé sur le symbole représenté par la langue du saint et la valeur numérologique des chiffres 3 et 5 (le saint est mort à l’âge de 53 ans). La conception originale et la technique de construction parfaite sont typiques pour l’œuvre de Santini, comme nous le raconte Marie Dubová :
« Maître du jeu d’ombres et de lumières, Santini a aussi un sens parfait des proportions géométriques de l’espace. En plus de tout cela, l’église de pèlerinage de la Montagne Verte a un contenu spirituel extraordinaire. L’impression majeure suscitée par l’intérieur de l’église, c’est son ampleur. L’espace central s’ouvre sur cinq niches : celle à l’Est est occupée par le maître-autel dessiné par Santini et représentant la montée au ciel de saint Jean Népomucène. Les cinq chapelles de l’intérieur sont des chefs-d’œuvre de la sculpture baroque ainsi que les chapiteaux de la nef de 21 mètres de hauteur. L’abbé Václav Vejmluva, de même que Santini auquel il a confié la construction de l’église, étaient tous deux fascinés par la kabbale, soit un courant ésotérique et mystique qui s’est développé à partir la période du second Temple, et ils ont utilisés ces éléments dans cette construction. Ainsi, la nouvelle église devait représenter un temple céleste parfait descendu du ciel sur la terre. Le prélat et son architecte ont créé une œuvre sans précédent. »
Les traces de Jean Népomucène se trouvent partout dans le monde. A l'occasion du 300e anniversaire de sa béatification, Radio Prague International a invité ses auditeurs à envoyer sur Facebook, une photo d'une des églises portant son nom ou d'une de ses statues.
Nous avons reçu au total plus de 900 photographies dont nous vous présentons une sélection sur notre site et sur les réseaux sociaux. Elles proviennent, entre autres, des Philippines, d’Argentine, de Colombie, de Portugal, d’Italie, d’Autriche, de Serbie, de Croatie, de Pologne et d’autres pays encore.