Jiří Suchý célèbre sur scène son 90e anniversaire
« Je connais des gens encore plus vieux que moi » : c’est le titre du spectacle qu’animera ce vendredi soir Jiří Suchý dans sa « maison », le théâtre Semafor de Prague, pour son 90e anniversaire. A cette occasion, le chanteur, acteur, parolier, comique, musicien, dramaturge et écrivain interprétera des chansons qu’il a autrefois écrites pour d’autres artistes. Retour grâce à nos archives sur la carrière de cet artiste aux multiples talents dont le nom est inséparable de son alter ego Jiří Šlitr, mort en 1969, avec lequel il a formé un duo qui a marqué la culture tchèque et plusieurs générations.
Jiří Suchý en 2011 :
« Quand le théâtre était à ses débuts, un jour, lorsque nous avons vu la foule de gens se former à l’entrée, Jiří Šlitr m’a dit : ‘Ça ne va durer que cinq ans, c’est une question de mode’. Finalement, lui-même a vécu dix saisons et aujourd’hui, le théâtre en est à sa 53e année d’existence. Mieux encore, il semble que Semafor se porte très bien, il affiche complet presque tous les jours. »
« Au tout début de ma carrière, je ne voulais pas faire de théâtre, je rêvais plutôt de cinéma. Mais on ne pouvait pas se présenter dans les studios de Barrandov en disant : ‘Donnez-mois une bobine, j’ai envie de tourner un film.’ Par contre, fonder un petit théâtre, ça, c’était possible. La première pièce que nous avons jouée au théâtre Na zábradlí, c’était ‘Kdyby tisíc klarinetů’ (‘Si mille clarinettes’) qui a ensuite été portée à l’écran, avec beaucoup de succès. Je prenais toujours énormément de plaisir à participer au tournage de films. Même à ceux qui ont été tournés récemment, par la télévision, à l’occasion de cet anniversaire dont je me fiche un peu... Vraiment, j’adorais cela. »
Jiří Suchý en 2007 :
« La première chose que j'ai écrite, c'était un poème. J'avais sept ans. Et il est intéressant que, bien que ce soit un dicton naïf et enfantin, il ne pêche pas contre la rime et la mesure du vers. (...) Alors, c'était mon premier poème, mais par la suite j'ai cessé d'écrire les poèmes et je me suis mis à faire des chansons. Je voulais devenir un comique chantant. En ce temps-là je me modelais sur le comique britannique George Formby et plus tard aussi sur le duo de comédiens tchèques Voskovec et Werich. Ils étaient tous des comédiens qui chantaient... »
Toute l'existence de Jiří Suchý a été liée au théâtre. Il a vécu au théâtre et pour le théâtre tout en poursuivant son œuvre littéraire. Sa carrière lui a apporté de brillants succès, mais aussi des moments amers. Tombé en disgrâce sous le régime communiste, il a dû lutter pendant des années pour sauver son ensemble. Après la chute du communisme, le théâtre Semafor a dû quitter la salle située dans un passage de la Place Venceslas au centre de Prague et la troupe a été obligée de déménager à plusieurs reprises. Entre-temps l'art de Jiří Suchý évoluait et mûrissait. Aujourd'hui, quand on lui demande s'il se considère comme un classique, il répond :
« J'avoue ne pas réfléchir de la sorte. Je ne me dis pas : Tu es un classique, tu dois garder un certain niveau. Je me rappelle ce que m'a dit Miloš Forman après les projections des films « Amadeus » et « Vol au-dessus d'un nid de coucou ». Je lui disais de regretter ses premiers films, « Au feu les pompiers » et « Les Amours d'une blonde », leur style inimitable qui n'existait plus. Et il m'a répondu : 'Quand quelqu'un veut faire quelque chose, continuer à faire quelque chose, il doit aussi renoncer à quelque chose.' Je dirais que les paroles de chansons que je fais actuellement sont meilleures que celles que je faisais au début de ma carrière. Mais j'ai renoncé à la simplicité efficace de mes premières chansons qui émouvaient un public beaucoup plus large que ne le font les chansons que j'écris aujourd'hui. »