Les égyptologues tchèques mettent au jour un vaste dépôt de matériel de momification
Près de 400 grands récipients, dont quatre vases canopes, et un certain nombre d’objets de plus petite taille, tous liés à la pratique de la momification dans l’Egypte ancienne ont été mis au jour il y a un an par l’équipe égyptologique tchèque à Abousir, à 25 km au sud-ouest du Caire. Cette découverte est la plus importante du genre à ce jour.
Les archéologues tchèques de la mission égyptologique à Abousir n’ont pas chômé : alors qu’au printemps 2021 traînait encore une énième vague de Covid-19, l’équipe de l’Université Charles était déjà engagée dans sa campagne de fouilles du début de l’année dans le cadre de son intervention sur ce site, pré carré de la mission tchèque depuis les années 1960.
C’est dans la partie ouest de la nécropole égyptienne, lors des fouilles d'un ensemble de grandes tombes à puits, qu’a été mise au jour une importante collection de grands récipients en céramique – 370 en tout. Tous ces récipients contenaient des résidus de divers matériaux utilisés dans le cadre des rituels de momification par les anciens Egyptiens.
Ce dépôt, constitué de 14 couches dont la première se trouvait à 4,5 mètres sous la surface du sol, remonte au VIe siècle avant J.-C., soit à l’époque des 26e et 27e dynasties. Outre ces grands récipients en forme d’amphore, il contenait également d’autres objets de plus petite taille, comme le décrit Jiri Janak, de l’Institut tchèque d’égyptologie qui a participé aux fouilles :
« Parmi les objets que nous avons retrouvés, il y avait aussi des récipients plus petits, et même des restes de cendres issues d’un feu qui avait dû brûler non loin de l’endroit où la personne avait été momifiée. Nous avons également retrouvé des traces de natron, un minéral utilisé par les Egyptiens anciens pour assécher la dépouille du mort. »
Les archéologues ont également retrouvé des résidus de résines, d'huiles ou de myrrhe dans ces récipients. En outre, le dépôt contenait également quatre vases canopes en calcaire. Ces contenants, dont le bouchon présente une tête de divinité, étaient utilisés pour conserver les viscères retirés du corps pendant le processus d'embaumement. Ils étaient ensuite déposés près du sarcophage, dans la chambre funéraire, pour accompagner le défunt dans l’autre monde.
« Nous avons trouvé des vases canopes vides, qui n'avaient pas encore été utilisés. Il est intéressant de noter qu'ils portaient des inscriptions, notamment le nom du propriétaire. C'est ce qui nous a permis d'identifier la personne à qui appartenait ce dépôt. »
Le temps long de la recherche et des analyses explique évidemment les mois écoulés entre la découverte et son annonce au public, comme le rappelle Jiri Janak :
« Ce genre de découverte va de pair avec des analyses supplémentaires qui sont effectuées, soit en Egypte, soit à Prague en laboratoire. Il faut en effet déterminer si la découverte en question, que ce soit du matériel de momification, une tombe ou quoique ce soit d’autre, correspond à l’époque que nous supposons être la sienne. On la compare avec des découvertes équivalentes à Abousir ou Saqqarah. »
Les égyptologues tchèques n’ont pas ouvert l’intégralité des près de 400 récipients : les analyses vont donc se poursuivre encore cette année, avec peut-être de nouvelles révélations à venir :
« La deuxième partie de notre équipe va étudier sur place la structure attenante qui se trouve à côté du dépôt. Il est fort probable qu’il s’agisse de la tombe du propriétaire de ce dépôt qui, d’après les inscriptions déchiffrées sur les vases canopes s’appelait Wahibre-meri-Neit. »
A la tête de la mission archéologiques tchèque à Abousir, le professeur Miroslav Bárta rappelle que la saison de fouilles 2021 s'inscrivait dans le cadre des activités et des projets à long terme de l'Institut tchèque d'égyptologie qui s’efforce de découvrir et d’interpréter les monuments d’une époque particulière où la société égyptienne antique cherchait de nouveaux moyens de maintenir sa propre identité tout en contrant l'invasion des armées étrangères.
Avec ses deux kilomètres carrés de superficie, la concession de la mission tchécoslovaque dans les années 1960, relayée par la mission tchèque depuis le début des années 1990, est une des plus importantes accordées à des étrangers par les autorités égyptiennes. Le site funéraire d'Abousir a été utilisé sans discontinuer tout au long de l'histoire de l'Egypte ancienne et les égyptologues tchèques estiment que cette nouvelle découverte pourrait permettre également de mieux comprendre la thanatopraxie des anciens Egyptiens, source de fascination depuis les débuts de l’égyptomanie au XIXe siècle.