Une vaste affaire de corruption ébranle un des partis de la coalition gouvernementale tchèque
Une affaire de corruption autour de la société des transports pragois impliquant, entre autres, un adjoint au maire de Prague, membre d’un des partis de la coalition au pouvoir, ébranle le gouvernement à moins de deux semaines du début de la présidence tchèque de l’UE. Alors que la police a inculpé la semaine dernière onze personnes, le ministre de l’Education Petr Gazdík (STAN) a fait savoir dimanche qu’il démissionnait de son poste.
Le parti des maires et indépendants STAN est dans la tourmente avec l’arrestation vendredi dernier de l’adjoint au maire Petr Hlubuček dans le cadre d’une vaste affaire de corruption. Cette arrestation a entraîné la décision du ministre de l’Education Petr Gazdík de démissionner de son poste ministériel au 30 juin, ainsi que de la vice-présidence de son parti (sans renoncer à son siège de député), en raison de ses liens avec Michal Redl, un homme d’affaires accusé et également arrêté dans cette même affaire. S’il a déclaré « ne se sentir coupable de rien, ni dans les faits, ni sur le plan juridico-pénal », Petr Gazdík a admis être conscient que ses « liens avec certaines personnes (jetaient) une ombre sur le parti STAN ».
Un coup dur pour ce parti, membre de la coalition gouvernementale formée entre autres de l’alliance SPOLU, alors que STAN comme ces autres partis ont fait de la rupture avec l’ère Andrej Babis et des affaires de conflits d’intérêts le cœur de leur campagne électorale faisant la promotion de dirigeants aux mains propres.
Si Le Premier ministre Petr Fiala (ODS) ainsi que le ministre de l’Intérieur et chef du mouvement STAN Vít Rakušan ont salué la démission de Petr Gazdík, ce même Vít Rakušan se retrouve sur la sellette, avec l’opposition appelant à sa démission, et des critiques émanant même du Parti pirate dans la coalition. Sa fonction même à la tête d’un ministère dont dépend la police qui dirige l’enquête sur les membres de son propre parti le met dans une situation plus que délicate, même si, pour l’heure, il estime ne pas avoir à renoncer à son poste.
La crise actuelle au sein de STAN a entraîné le bouleversement de son proche agenda : son assemblée générale, qui devait avoir lieu à l’automne, a été avancée au milieu du mois de juillet, alors que le parti se retrouve quasiment sans direction, plusieurs vice-présidents devant être remplacés, soit en raison d’une démission dans le cas de Gazdík et Hlubuček, soit d’un décès.
Un de ces vice-présidents démissionnaires est donc Petr Hlubuček, celui par qui la tempête est arrivée. Mercredi dernier, une descente de police à la mairie de Prague et à la société des transports publics de la capitale a conduit à l’arrestation de 11 personnes sur les 13 suspects identifiés par la Centrale nationale de lutte contre le crime organisé, deux se trouvant à ce moment-là à l’étranger.
Toutes ces personnes ont été inculpées pour corruption et participation à une organisation criminelle, dont Petr Hlubuček, arrêté, selon le procureur de la République, Adam Borgula, par crainte d’une fuite à l’étranger ou de tentatives d’influencer des témoins.
Dans le dossier de près de 90 pages consulté par la presse tchèque, résultat de deux ans d’enquête, de filatures et d’écoutes téléphoniques, les enquêteurs décrivent en détail le fonctionnement de ce groupe informel, composé de dirigeants de la société de transports, de politiciens, d’hommes d’affaires et de lobbyistes.
La police estime que ce groupe avait mis en place un système lui permettant de placer des proches à des postes clés au sein de la société de transports afin que ces derniers puissent exercer une influence sur les différents appels d’offres et ainsi obtenir des pots-de-vin des entreprises gagnantes.
Selon les enquêteurs, à la tête de cette association informelle se trouvait Michal Redl, un homme d’affaires et lobbyiste de Zlín, qui au début des années 2000 a également été lié avec Radovan Krejčíř, importante figure du crime organisé ayant fui la justice tchèque et aujourd’hui emprisonné en Afrique du Sud.
En République tchèque, les activités d’un groupe criminel organisé peuvent entraîner jusqu’à dix ans de prison et la confiscation des biens, tandis que les chefs de ce gang encourent une peine encore plus lourde de deux ans supplémentaires. La corruption est également passible d’une peine pouvant aller jusqu’à dix ans de prison.