Une toile du peintre tchèque Vojtěch Hynais prêtée au Centre Pompidou-Metz

L'allégorie de la vérité par Vojtěch Hynais

Une toile du peintre tchèque Vojtěch Hynais (1854-1925), qui a vécu pendant plusieurs années à Paris, vient d’être prêtée par la galerie d’art régionale de Jihlava au Centre Pompidou-Metz. Elle y est à voir à partir du 15 avril dans le cadre de l’exposition dédiée à la peintre Suzanne Valadon qui a servi de modèle pour cette allégorie de la vérité. Jana Bojanovská est commissaire d’exposition à la galerie d’art de Jihlava. Elle nous en dit plus sur cette coopération franco-tchèque et sur l’histoire de la toile.

« Nos collègues français ont appris l’existence de cette toile tout simplement grâce à notre site web. Nous l’avons entièrement refait il y a un an et demi et on peut y trouver une base de données complète de nos collections. On y trouve en ligne les photos de toutes nos œuvres et les informations relatives. Tout ceci est d’ailleurs en plusieurs langues, dont le français. »

Qu’est-ce qui intéressait le Centre Pompidou-Metz dans cette toile en particulier ?

« Quand ils nous ont contactés, ils voulaient tout d’abord savoir si c’était bien la peintre Suzanne Valadon qui était représentée dessus, dans l’optique de demander un prêt pour leur exposition. »

L'allégorie de la vérité par Vojtěch Hynais | Photo: František Jirků,  ČRo

Comment se sont déroulées les négociations pour ce prêt ?

« Ils nous ont écrit pour en savoir davantage et, suite à nos échanges, nous ont très vite fait part de leur intérêt pour un prêt. Il a donc fallu ensuite régler tous les problèmes administratifs liés à ce genre de prêts et obtenir des autorisations, à la fois de la région de la Vysočina mais aussi du ministère de la Culture qui in fine, décide des prêts d’œuvres à l’international. »

Qu’est-ce que ce type de coopération internationale avec une institution importante comme le Centre Pompidou Metz signifie pour la galerie de Jihlava ?

« Pour nous, c’est un événement très important. Ce n’est pas tous les jours que nous faisons un prêt à l’étranger. Je crois que la dernière fois remonte à une dizaine d’années. Nous sommes donc très heureux que cette toile qui fait partie de notre exposition permanente et qui est importante dans l’histoire de la peinture tchèque, puisse être vue par des amateurs d’art hors des frontières de la Tchéquie. »

Pouvez-vous nous décrire plus en détail ce tableau ?

Suzanne Valadon vers 1885 | Photo: Ville de Paris/Bibliothèque Marguerite Durand/Wikimedia Commons,  CC0 1.0 DEED

« Il s’agit d’une allégorie de la vérité. Les allégories sont un thème récurrent chez Hynais qui peignait des scènes historiques et mythologiques. On y voit une femme nue, une représentation classique pour exprimer le fait qu’elle n’a rien à cacher. Elle a un miroir pour attribut. On la voit de face, assise auprès d’un puit. Ce tableau est par ailleurs connu pour avoir eu plusieurs variantes. Hynais est connu pour avoir souvent fait plusieurs versions d’un même sujet. Il existe ainsi un tableau de 1891 dont on a perdu la trace, où la femme est représentée de profil, debout, pour lequel l’Académie des sciences tchèque lui a remis un prix. De ce tableau dérivent une toile d’une même composition qui se trouve à la Galerie nationale, et notre tableau conservé dans nos collections à Jihlava. Il existe aussi un ensemble de photographies prises dans l’atelier parisien de Hynais, qui ont capturé la création de cette œuvre et qui prouvent que c’est bien Suzanne Valadon le modèle. »

Est-ce qu’on sait comment Vojtěch Hynais a rencontré Suzanne Valadon ?

Suzanne Valadon sur la toile 'Des parapluies',  1881 -86 | Source: National Gallery,  London/Wikimedia Commons,  public domain

« Elle a eu une vie assez mouvementée. Elle a exercé différents métiers, elle a aussi fait du cirque et après une blessure, elle est devenue modèle pour différentes peintres. Renoir et Toulouse-Lautrec l’ont représentée sur leurs toiles. Elle était donc connue dans les cercles artistiques pour son travail de modèle et c’est sans doute ainsi que Hynais l’a découverte. »

Il semblerait que Suzanne Valadon soit également représentée sur le grand rideau de scène du Théâtre national à Prague…

« Tout à fait. Hynais a préparé son projet pour le rideau du Théâtre national avant même de réaliser son allégorie. On peut en effet y voir Suzanne Valadon sous les traits d’un ange ailé. »

Le rideau du Théâtre national | Photo: Théâtre national