6) Logement étudiant à Prague : colocation ou chambre universitaire ?
En mars, des étudiants pragois ont lancé une pétition pour protester contre la hausse des prix des chambres universitaires dans la capitale tchèque. Si ceux-ci avaient déjà augmenté au début de l’année universitaire de plus de 15 % en lien avec le fort taux d’inflation et les prix de l’énergie, certains établissements ont continué de faire grimper les tarifs au deuxième semestre. Cette solution de logement étudiant qui pouvait être avantageuse financièrement risque à terme de le devenir de moins en moins pour les petits budgets. Autre solution, déjà prisée par de nombreux étudiants, notamment étrangers, la colocation – et ce, quand bien même les prix à la location ont aussi augmenté. Mais le partage des frais et la possibilité de louer non loin de son établissement universitaire, reste un avantage pour ces étudiants que nous avons interrogés.
Charlotte Glorieux est étudiante en journalisme à la faculté des lettres de l’Université Charles. Originaire du Québec, séjournant à Prague dans le cadre du programme Erasmus Mundus, elle nous fait part de son expérience :
« Je vis dans un appartement avec une Américaine et une Espagnole. Pour le trouver, ça a été assez compliqué, mais je pense que c’est une expérience universelle, pas seulement pour des étudiants non-européens. Quand on a signé le contrat, on nous a dit qu’on avait de la chance d’avoir une Européenne avec nous parce que c’est plus facile de faire ça entre ressortissants de l’UE. Moi, si j’avais voulu le faire en mon nom, ça aurait été beaucoup plus compliqué. Je sais d’ailleurs qu’il y a des bailleurs qui n’ont pas envie d’avoir à gérer ce genre de situations. Dans ma classe, il y avait quatre personnes, toutes non-européennes, qui n’ont rien pu trouver : à chaque fois que quelque chose leur plaisait, le bailleur ne voulait pas louer à des non-européens. On leur demandait de payer trois mois de loyer en avance, ou de payer une caution deux fois plus importante que les Européens. C’est assez pénible. Nous nous en sommes plutôt bien sortis. Finalement les autres ont en général trouvé une chambre dans une colocation où il manquait quelqu’un. »
Vous a-t-on proposé une résidence universitaire ?
« Oui, mais même l’université nous a un peu dissuadés parce que les chambres ne sont pas géniales, très loin. Une personne dans ma classe avait opté pour cette solution, mais a fini par changer car c’était trop loin. Il mettait une heure, une heure et demie pour venir à la fac. Moi, je vis à Mala Strana et je mets dix minutes à pied. Bien que ces chambres restent relativement peu chères, cela veut dire qu’on doit dormir avec une autre personne. A notre âge, c’est un peu désagréable. »
« On m’a déconseillé la résidence universitaire »
Qu’ils soient en échange Erasmus ou en stage professionnel, Grégory et Gabrielle partagent un point commun : ils ont opté pour la colocation, tous deux dans le quartier de Smíchov, au sud-ouest de Prague. Gabrielle est en échange Erasmus avec l’Université tchèque des sciences de la vie de Prague. Après son admission, l’établissement n’a pas tardé à lui envoyer des propositions de logement dans l’un de ses dortoirs. Pourtant, cette étudiante française, arrivée dans la capitale tchèque en janvier dernier, a préféré opter pour une colocation dans un appartement.
« Je suis venue à Prague pour mon échange Erasmus. On est obligés de partir à l’étranger, mais ‘obligé’ est un bien grand mot parce que c’est une chance ! J’ai choisi Prague parce que je ne connaissais pas le pays, ni les pays de l’Est de l’Europe. On n’en parle jamais. Donc, j’avais envie d’en savoir plus. Ce n’est pas trop loin de la France. Au début, je voulais tenter l’Amérique du Sud, mais je ne suis pas forte en espagnol. C’est pourquoi j’ai choisi Prague. »
Pourquoi as-tu choisi Smíchov comme quartier ? Est-ce qu’on te l’a conseillé ?
« Je suis allée consulter des groupes Erasmus. Des anciens étudiants de notre école sont également venus à Prague. Ils m’ont dit quels quartiers étaient les plus adaptés et m’ont déconseillée d’aller à l’internat car c’était loin de l’école, la chambre est partagée avec quelqu’un d’autre, et le dortoir est éloigné du centre-ville. Sur les groupes Erasmus, on m’a recommandé Prague 5 (Smíchov). Avec une amie, on a donc cherché un site internet et elle en a trouvé un. Il ne restait plus beaucoup d’appartements disponibles dans ce quartier, et je faisais attention aux prix. »
Pourquoi voulais-tu vivre en colocation ?
« Je voulais être avec des gens qui ne parlent pas français, pour améliorer mon anglais et pour m’ouvrir aux autres. Egalement, je ne voulais pas me sentir seule et je souhaitais partager des repas, des moments avec eux. Ça permet de sortir de sa zone de confort et de partager des moments ensemble. »
Quelles nationalités sont présentes dans l’immeuble ?
« Beaucoup de Français. Dans ma colocation, il y a deux Taïwanaises, une Japonaise, et une Italienne. Sinon, il y a des Allemands, des Espagnols, des Irlandais, des Néerlandais et des Indiens. »
Que penses-tu du rapport qualité-prix ?
« J’ai été surprise parce que je pensais que ce serait moins cher qu’en France. On est sur les mêmes prix qu’à Montpellier, qui est une des villes les plus chères pour les étudiants après Paris. On ne nous a pas laissé beaucoup de choix parce qu’il restait peu de logements disponibles, contrairement à la France où il y a plus de choix. C’est compliqué parce qu’on est à distance, on ne connait pas le pays, la devise est en couronne tchèque. On doit faire des conversions. C’est stressant parce qu’on verse de l’argent à des personnes qu’on ne connait pas. Tout passe par l’agence. »
L’inflation a-t-elle impacté ta recherche ?
« Non. Le prix n’a pas augmenté, c’est toujours le même depuis janvier quand je suis arrivée. Certains bailleurs indexent le prix sur l’inflation, mais ce n’est pas mon cas. »
Les locations à Prague, presque aussi chères qu’en Suisse
Comme Gabrielle, Grégory, doctorant en virologie originaire de Suisse, a choisi de vivre en colocation pour sa mobilité à Prague. Il nous explique sa décision :
« Je suis venu à Prague car je fais actuellement un stage dans le cadre de mon doctorat en virologie. On a actuellement une collaboration avec un professeur à Prague. Je suis donc venu pour trois mois afin d’apprendre de nouvelles techniques pour mon doctorat. »
Pourquoi avoir choisi le quartier de Smíchov ? Était-ce par pur hasard ou as-tu été conseillé ?
« Je dirais que c’est par pur hasard parce que c’est là que j’ai trouvé mon appartement. Aussi, une doctorante habitait à Prague 5 et elle me l’a conseillé parce que c’est raisonnablement proche de l’université, des transports et des lieux de dépenses quotidiennes. »
Est-ce que vivre en colocation était un choix ou envisagez-tu autre chose ?
« Vivre en colocation est une solution des plus simples en tant qu’étudiant. Le coût est moindre. Et comme je suis à Prague pour une courte période, je savais qu’une colocation serait très bien. Mais je ne pense pas que ce soit l’idéal pour un séjour long. C’est une bonne alternative pour quelques mois. »
Quelles nationalités as-tu rencontré dans ton lieu de résidence ?
« À ce jour, uniquement des Français. »
Comment s’est passée ta recherche de logement ? Etait-ce compliqué de trouver un appartement ?
« J’ai entrepris mes recherches en janvier pour mon stage en mars. J’ai consulté beaucoup de sites internet comme Airbnb. Mais cela ne concordait pas avec mes dates de stage. L’ancienne doctorante m’a conseillé un site sur lequel j’ai finalement trouvé un appartement qui me convenait en fonction des dates. »
Que penses-tu du rapport qualité-prix de ton appartement ?
« En tant que Suisse, je suis habitué à voir des prix élevés. Mais en ce qui concerne Prague et la République tchèque dans son ensemble, j’ai été surpris par le coût élevé des logements même s’il s’agit d’une destination plutôt bon marché. Le prix est relativement cher et comparable à celui que l’on peut trouver en Suisse. »
Penses-tu que l’inflation a eu beaucoup d’impact ?
« Il peut y avoir un effet. Mais je pense que ce coût est dû au fait que les étudiants étrangers sont les premiers à choisir ces appartements parce qu’ils ont un revenu plus élevé, que ce soit grâce à leurs parents ou par eux-mêmes, que la population locale. Les prix sont donc potentiellement élevés pour cette raison. »
As-tu reçu des propositions de logements universitaires par mail ?
« On m’a dit que des dortoirs universitaires étaient accessibles. Mais comme je restais à Prague pour une courte période et que je commençais mon stage assez rapidement, les dortoirs étaient occupés. On me les a proposés, mais on m’a en même temps recommandé de trouver autre chose. »
Si toutefois un dortoir était disponible, l’aurais-tu accepté ?
« J’aurais envisagé cette possibilité, tout en comparant les autres offres. »
Comment trouves-tu la vie en colocation ?
« C’est toujours une bonne expérience parce qu’on doit s’ouvrir aux autres et se confronter à des styles de vie différents du nôtre. J’avais l’habitude de vivre en colocation avec des personnes âgées. C’est très différent avec des étudiants, mais ce n’est pas dérangeant non plus. »