Restauré, le plus ancien puits de bois au monde bientôt exposé en Tchéquie
Mis au jour en 2018 sur le site d’une future autoroute dans l’est de la Bohême, la structure en bois de chêne d’un puits datant du néolithique et considéré comme le plus ancien au monde, a subi d’importants travaux de restauration et devrait être bientôt présenté au public au Musée de Pardubice.
La nouvelle avait été signalée par de nombreux titres étrangers également : le plus ancien puits en bois au monde a été découvert en Tchéquie remonte à 5 526 ou 5 255 avant J.-C., une datation très précise qui a été permise grâce à la dendrochronologie. A ce jour, s’il existe déjà des troncs fossilisés vieux de 10 à 11 000 ans, impossible de savoir s’ils ont été travaillés par l’homme : ainsi, aucune autre structure en bois artificielle aussi ancienne que ce puits n’a été mise au jour, bien que cela puisse évidemment changer à l’avenir, comme tiennent à le rappeler les archéologues.
Construit à l’aide de quatre poteaux placés dans les coins et incisés pour y placer les planches, le puits fait 1,40 mètre de haut : jusqu’à présent, les scientifiques pensaient que ce type de technologie avait été utilisé plus tard, à l’âge du bronze, voire à l’époque romaine. Cette découverte majeure montre qu’au contraire, les hommes la maîtrisaient déjà dans la dernière période de l’âge de pierre, comme le relève Karol Bayer, vice-doyen de la Faculté de restauration de l’Université de Pardubice :
« Ce que nous avons trouvé intéressant, c’est qu’ils ne disposaient que d’outils en pierre très simples et qu’ils ont néanmoins réussi à utiliser de manière très efficace pour créer des formes bien précises. Si l’on regarde de plus près la surface du bois, on peut voir les marques d’ajouts ultérieurs faits par des objets en pierre tranchants. Il est fascinant de voir les traces du travail manuel d’un homme qui a vécu il y a 7 000 ans. »
Une centaine de pièces d’une extrême fragilité ont dû être transportées avec le plus grand soin à des fins de conservation puis de restauration. Plusieurs années auront été nécessaires à pas moins de cinq restaurateurs pour remettre en état ce puits néolithique qui a également fait l’objet d’analyses scientifiques poussées, comme le détaille un des archéologues à l’origine de la découverte, Tomas Zavoral :
« Nous avons pu identifier diverses traces microscopiques de plantes et de céréales. L’une des découvertes les plus importantes a été celle des premières traces de graines de pavot et de lin en République tchèque. »
Après avoir été soigneusement débarrassé des résidus de terre et traité avec un agent biocide, le bois a été imprégné pendant 16 mois d’une solution de saccharose destinée à le renforcer. Le sucre avait pour objectif de durcir le bois et l’empêcher de se rétracter. Ensuite, les chercheurs ont laissé sécher les parties en bois sur des grilles pendant un an.
Mais avant cela, les scientifiques ont largement pu apprécier les conditions naturelles de conservation du puits, qui ont permis de le découvrir dans un si bon état. L’humidité et l’absence d’air sont des conditions favorables à la conservation du chêne qui, d’une certaine façon, permettent de le fossiliser. C’est ce qui explique que le bois retrouvé est très dur et résistant, comme le note le restaurateur Karol Bayer :
« Il a été découvert dans un environnement où il y avait très peu d’oxygène et où il était protégé de l’eau. Les types de bactéries qui se nourrissent de matières organiques ne disposaient donc pas des bonnes conditions pour se développer, et c’est ce qui lui a permis de se conserver pendant si longtemps. »
Cette découverte permet aussi d’imaginer la vie de ces tous premiers agriculteurs qui se sont établis sur le territoire de la République tchèque durant le VIe millénaire avant notre ère. Ces populations sont composées de gens qui se sédentarisent et qui construisent les premiers sites d’habitation avec des maisons en longueur, parfois de 40 à 50 mètres. Ils domestiquent aussi les premiers animaux sauvages pour les élever et se lancent dans la culture de céréales.
Autrement dit, ce sont des hommes et des femmes qui adaptent le paysage dans lequel ils vivent à leurs besoins, qui maîtrisaient déjà la culture des blés d’hiver et de printemps telle que nous la connaissons aujourd’hui. Dans ce contexte, il est fascinant de se rendre compte que ces populations néolithiques ont mis au point, bien avant ce que les scientifiques supposaient, une technologie sophistiquée leur permettant un accès à l’eau, autre que celui d’une rivière ou d’un cours d’eau plus facile à utiliser pour leurs besoins quotidiens.
Début mai, une grande exposition consacrée à l’eau doit être inaugurée au Musée de Bohême de l’Est de Pardubice dans le cadre de laquelle sera présenté le puits pour la toute première fois au public.