Presse : dans l’histoire ukrainienne aussi, des épigones de Jan Palach
En lien avec l’anniversaire de l’immolation par le feu de l’étudiant tchèque Jan Palach, cette nouvelle revue de presse rappellera que l’histoire moderne ukrainienne a également connu de tels sacrifices. Parmi les autres sujets traités : la recherche d’une nouvelle marque pour la Tchéquie, l’égoïsme comme une cause de la pénurie de logements, la suppression de l’enseignement du russe dans les écoles primaires, les perspectives de l’économie tchèque.
Le 16 janvier, 56 ans se sont écoulés depuis le jour où Jan Palach, un étudiant de 20 ans, s’est immolé par le feu, en haut de la place Venceslas à Prague, pour protester contre la léthargie croissante de la société face à l’occupation soviétique et le début de la normalisation du pays. Le journal Deník N rappelle que cinq autres Tchécoslovaques ont suivi son exemple et que des torches vivantes ont aussi existé dans des pays voisins. Il indique que des prédécesseurs et des disciples de Jan Palach figurent également dans l’histoire moderne de l’Ukraine. Il y en a au moins quatre parmi lesquels :
« Le 5 novembre 1968, Vasyl Makuch, un homme de 40 ans, s’est aspergé d’essence et s’est immolé par le feu dans la principale rue de Kyiv pour protester contre l’assujettissement de l’Ukraine par le régime soviétique et contre l’occupation de la Tchécoslovaquie en août de la même année. Il est ainsi devenu une sorte de ‘Palach ukrainien’, mais avant l’acte de l’étudiant tchèque de janvier 1969. Comme un autre Ukrainien, Mykola Didyk, qui s’est immolé par le feu devant le siège des services de renseigments soviétiques à Moscou le 7 avril 1966, ou comme Ryszard Siwiec, un Polonais qui s’est immolé par le feu en septembre 1968 lors des célébrations officielles de la Fête des moissons à Varsovie, en signe de protestation contre l’occupation de la Tchécoslovaquie et le communisme en général. Ces torches vivantes ne se connaissaient probablement pas, car leurs actions étaient tenues strictement secrètes par le régime communiste. »
Deník N rappelle également que dix ans plus tard, le 21 janvier 1978, un autre Ukrainien, Oleksa Hirnyk, âgé de soixante-cinq ans, s’est immolé par le feu. Un personnage qui, toute sa vie, avait milité pour la cause ukrainienne et avait passé de nombreuses années en prison :
« Comme d’autres torches vivantes du bloc de l’Est, Oleksa Hirnyk n’a attiré l’attention du grand public que dans les années 1990, après la naissance d’une Ukraine indépendante. Son cas doit nous intéresser non seulement en lien avec Jan Palach, mais pour nous rappeler que les activités des membres de l’Organisation des nationalistes ukrainiens à laquelle Hirnyk appartenait à l’époque et de l’Armée insurrectionnelle ukrainienne ne peuvent pas être automatiquement mises dans un même sac et lues de la même manière, comme cela arrive encore aujourd’hui. »
La Tchéquie à la recherche d’une nouvelle « marque »
La Tchéquie cherche sa marque et une identité visuelle unifiée, afin de se débarrasser de l’étiquette d’un pays connu notamment pour sa bière et sa nourriture bon marché, qui nuit à la renommée du pays et au monde des affaires. C’est ce dont fait part un article publié sur le site Seznam Zprávy selon lequel la diplomatie entend réagir au fait que la réputation internationale de la Tchéquie, à en croire différents sondages, est en baisse :
« En premier lieu, il s’agit de lancer un débat public sur ce qui devrait définir la Tchéquie. Il faut trouver un large consensus sur les valeurs représentées par la marque nationale. Ce sont donc les citoyens qui devraient décider, et pas seulement l’Etat. Ce qui pourrait caractériser la Tchéquie, selon les initiateurs du projet, ce sont par exemple la cohésion et la solidarité qui ont fait leurs preuves durant les dernières inondations. De même, il serait souhaitable de faire valoir la créativité des Tchèques qui se manifeste à différents niveaux, au niveau familial comme au niveau communal et national. »
La création d’un style visuel unifié pour l’administration représente une première étape vers une meilleure image de la Tchéquie. Evidemment, les symboles d’Etat ne changeront pas. Le moteur de la nouvelle image de la marque, comme le note encore Seznam Zprávy, ce sont les hommes d’affaires qui se déclarent prêts à apporter des idées tout comme une contribution financière.
L’égoïsme, cause de la pénurie de logements ?
Quelle est la cause de la crise du logement en Tchéquie qui n’a de cesse de s’approfondir ? L’éditorialiste de l’hebdomadaire Respekt constate que le débat sur ce sujet dure depuis longtemps, les partis politiques y apportant des réponses diverses. Ils se mettent d’accord sur ce qui doit être construit, mais aussi sur le fait que la procédure d’obtention d’un permis de construire est trop compliquée. D’autre encore soulignent que de nombreux appartements neufs restent vides et ne servent à leurs propriétaires qu’à déposer efficacement leur l’argent. Tout cela, comme il l’indique, est probablement vrai, mais il faut commencer à réfléchir à une toute autre raison, que les gouvernements et les parlements peuvent difficilement contrôler, à savoir simplement, l’égoïsme humain :
« Ceux qui habitent déjà ou qui possèdent un logement ne souhaitent pas avoir autour d’eux plus de maisons, de logements et de nouveaux propriétaires qui occuperaient des places de parking. Ils ont intérêt à conserver des espaces ouverts autour d’eux. Après la privatisation d’une majeure partie des logements dans les années 1990, les nouveaux propriétaires qui les ont acquis réalisent que les environs qui ne sont pas occupés contribuent à faire monter la valeur de leur propriété. Et encore, pour eux, la pénurie de logements est bénéfique car la forte demande fait également augmenter la valeur de leur propriété. Voilà pourquoi ils s’opposent à toute mesure visant à résoudre le problème. Ils le perçoivent d’une perspective foncièrement différente de celle qu’ont les gens qui sont dans une situation précaire. »
L’éditorialiste de Respekt considère que la résistance de ceux qui ont déjà un logement à la moindre perturbation de leur zone de confort est un signe d’égoïsme. « Mais un pays ne peut pas bien fonctionner si ses habitants ne se respectent pas et ne prennent pas en considération les besoins des autres », avertit-il.
Fini l’enseignement du russe dans les écoles primaires
Le ministère de l’Education nationale a annoncé de supprimer l’enseignement de la langue russe comme deuxième langue étrangère dans les écoles primaires tchèques. L’éditorialiste du quotidien Hospodářské noviny estime que c’est une mauvaise décision et pas seulement parce qu’il faut bien connaître son adversaire :
« Ainsi, on fait savoir que nous n’aurons pas besoin de personnes qui comprennent la Russie à l’avenir. Nous pensons que tout va s’arranger d’une manière ou d’une autre et que nos alliés vont s’en occuper, que nous n’avons pas besoin de comprendre le monde nous-mêmes. L’argument selon lequel ces experts seront ensuite formés par les universités ne tient pas. Cultiver l’intérêt pour un sujet commence généralement dès le plus jeune âge. Nous faisons savoir aux plus jeunes que l’intérêt pour la Russie ne vaut pas la peine d’être cultivé. Or, nous réduisons le nombre de talents dont nous pourrions éventuellement tirer profit. »
L’éditorialiste du quotidien économique estime encore que la suppression de l’enseignement du russe s’inscrit dans la lignée du mépris pour les sciences humaines, un phénomène répandu en Tchéquie.
2025, une année pleine de défis pour l’économie tchèque
« La vie chère en Tchéquie persiste et elle ne va pas disparaître ». Tel est le titre d’un texte publié dans le quotidien Mladá fronta Dnes qui examine les perspectives de l’économie tchèque pour cette année qui, selon son auteur, sera tout sauf ennuyeuse :
« La principale vague inflationniste est déjà derrière nous. La Banque centrale vise une inflation de 2 %, celle-ci tournant actuellement autour de 3 %. De ce fait, la période de cherté va continuer, bien que les prix n’augmentent pas aussi vite que précédemment. Une politique monétaire prudente est pourtant de rigueur, afin qu’elle puisse répondre aux pressions inflationnistes inattendues. La grande inconnue, qui existe depuis longtemps, est l’évolution du cours de la couronne tchèque. Les prévisions actuelles tablent sur son affaiblissement ce qui rend plus chers les produits importés et augmente l’inflation. Par ailleurs, au cours de l’année, la couronne s’est affaiblie de plus de 7 % par rapport au dollar américain. »
L’entrée dans la zone euro aiderait-elle l’économie tchèque? Le tout au moment où plus de la moitié des entreprises contractent déjà des prêts en euros ? L’éditorialiste du quotidien confirme qu’il s’agit là d’une question politique avant d’ajouter :
« L’évolution du PIB tchèque est étroitement liée à celle de l’économie allemande, qui est le principal partenaire commercial de la Tchéquie. Le chômage devrait rester faible, bien qu’il puisse augmenter légèrement en raison du ralentissement de l’économie. A l’instar de l’année écoulée, le marché du travail aura à faire face à la pénurie de main-d’œuvre qualifiée. Or, l’économie tchèque a devant elle une année intéressante et pleine de défis. »