Obama à Prague : un discours, une rencontre avec Havel et accessoirement un sommet UE-USA
Barack et Michelle Obama ont mangé et dormi à l’Hotel Hilton samedi soir – Non, ce n’est sûrement pas l’information principale de ce week-end, mais c’est une information qu’ont quand même recherchée la presse tchèque et la presse internationale pendant plusieurs jours. Alors qu’y a-t-il de réellement essentiel à retenir de la visite de Barack Obama à Prague ?
Son discours, d’abord. Son premier discours public en Europe depuis son élection et un discours parfois qualifié d’ « historique » par les commentateurs. Nous ne reviendrons pas sur les thèmes majeurs de ce discours – l’espoir d’un monde sans armes nucléaires, l’énergie et l’environnement ou encore les moyens de lutter contre la crise fiancière – et nous attarderons davantage sur les parties de ce discours consacrées à la République tchèque et notamment à la révolution de velours qui s’est déroulée à Prague il y a vingt ans. Barack Obama, en tchèque dans le texte :
« Sametova revoluce – la révolution de velours – nous a appris beaucoup de choses. Elle nous a montré que la protestation pacifique pouvait secouer les fondations d’un empire et dévoiler le vide d’une idéologie. Elle nous a montré que des petits pays pouvaient jouer un rôle pivot dans les événements mondiaux, et que les jeunes pouvaient jouer un rôle majeur dans le réglement des vieux conflits. Et elle a prouvé que le leadership moral était plus puissant qu’aucune arme. »
« Nous sommes ici parce que Américains et Tchèques croyaient envers et contre tout qu’aujourd’hui serait possible », a ajouté Barack Obama qui a insisté sur la force du lien tchéco-américain.
Et les relations tchéco-américaines aujourd’hui sont souvent liées à une question géostratégique qui dépasse largement le simple cadre de la relation entre Washington et Prague – la question du bouclier antimissile américain en Europe. Un projet mené par les administrations précédentes qui prévoit une base de missiles en Pologne et un radar en République tchèque.
« La République tchèque et la Pologne ont été courageuses en acceptant d’accueillir un système de défense antimissile. Tant que la menace iranienne persiste, nous poursuivrons un tel projet dont l’efficacité serait prouvée. Si la menace iranienne est éliminée, nous aurons un socle plus solide pour la sécurité, et la force motrice pour la construction d’une défense antimissile en Europe sera éliminée. »
Interrogé après ce discours sur le sens de ce paragraphe, le Premier ministre tchèque, Mirek Topolánek, a déclaré que le projet de bouclier antimissile n’était en aucun cas à jeter aux oubliettes de l’histoire. Il a même accusé un journaliste qui posait une question sur ce thème de propager les idées de « plateformes pacifico-communistes »...
Que retenir d’autre de la visite de Barack Obama à Prague ? Sûrement sa rencontre avec Václav Havel, le meneur de la révolution de velours dont il venait de faire l’apologie dans son discours. Une rencontre à huis clos au cours de laquelle l’ancien président tchèque a tenu à mettre un peu en garde le nouveau chef de la Maison Blanche contre les énormes espoirs qu’il pouvait susciter. « Les gens pourraient par la suite penser qu’il les a déçus », a dit Václav Havel en ajoutant :
« C’est un homme d’une rare gentillesse, franc et charismatique. Je ne suis pas surpris par le phénomène mondial qu’est la ‘Obamania’ ».
Et le président- dramaturge de préciser pendant la conférence de presse qui a suivi cette rencontre qu’il avait offert sa dernière pièce et un tableau à Barack Obama. En revanche, il ne savait pas encore quel cadeau lui avait amené le visiteur du jour, il n’avait pas eu le temps de l’ouvrir mais s’est déclaré « très curieux ».
Que mentionner d’autre à retenir de cette visite ? Probablement le sommet entre l’UE et les Etats-Unis, même si rien de fondamental n’y a été décidé. Le nouveau chef de la Maison Blanche a apparemment fait excellente impression, en tout cas d’après le chef de la Commission européenne, José Manuel Barroso, charmé par le « style » Obama :
« Le président Obama – je l’ai déjà rencontré à Londres avant Prague - est à mon avis un leader exceptionnel. Je le dis avec une certaine expérience de ces réunions car il y a les phénomènes de marketing et les phénomènes de substance. C’est quelqu’un qui a un charisme personnel véritable et authentique et c’est très important. Vous savez, dans ce genre de réunions, le style ça compte aussi. »
Celui qui semble donc avoir impressionné les Européens par son charisme est depuis dimanche soir en Turquie. Un pays dont il a dit soutenir l’adhésion à l’Union européenne, ce qui n’a pas vraiment plu à Paris et à Berlin et qui restera peut-être la seule fausse note dans la tournée-séduction de Barack Obama.