Olivier Coussemacq: "Je suis très honoré d'être invité à Karlovy Vary"

'L'enfance du mal'

La ville thermale de Karlovy Vary rassemble toute cette semaine les amoureux du 7e art. Parmi les films de la compétition principale, le premier long-métrage du réalisateur français Olivier Coussemacq, L’enfance du mal. Une jeune fille de 15 ans, Céline, va bouleverser la vie d’un couple enfermé dans sa routine et les règles sociales. Tour à tour victime trop jeune et provocatrice pas si dupe que cela, elle est une Lolita sans mièvrerie, mais souvent sans scrupules. Olivier Coussemacq était présent à Karlovy Vary, il a d’abord confié à Radio Prague ses impressions du festival :

Olivier Coussemacq,  photo: Štěpánka Budková
« Pour moi c’est un grand honneur, car c’est un festival ancien et j’accorde beaucoup d’importance à l’histoire de ce festival. Parce que c’est la République tchèque, autrefois la Tchécoslovaquie, et que ça veut vraiment dire quelque chose au cinéma. L’école de cinéma et les cinéastes ici représentent vraiment quelque chose pour les cinéastes français et du monde. Parce que la République tchèque c’est aussi cela, quitte à ce que les autres soient jaloux : j’adore passionnément Amadeus de Milos Forman, c’est un film que je peux revoir un boucle et que je revois presque tous les deux ans. C’est un bonheur constant, un film qui ne vieillit pas du tout, qui ne vieillira à mon avis jamais, et qui est une chose absolument impressionnante et merveilleuse ! C’est tellement impressionnant d’être choisi dans le cadre d’une compétition internationale, en se disant : moi, on m’a choisi parmi tous les autres. C’est tellement incroyable... merci au festival, merci Eva. Je suis vraiment honoré, sincèrement. »

Dans les commentaires qu’ont pu faire Pascal Greggory et Ludmila Mickaël, les deux principaux acteurs de votre film, ils insistent tous les deux sur la vraie qualité du scénario. C’est important pour vous de ciseler un scénario, de bout en bout ?

'L'enfance du mal'
« On raconte une histoire pour des spectateurs. Je ne peux pas imaginer une seconde ennuyer le spectateur. Je ne dis pas que ça n’arrive pas, peut-être qu’il va s’ennuyer, mais j’ai cette obsession, celle de raconter une histoire qui convienne au spectateur et qui porte son attention. Après, en ce qui concerne la précision de l’histoire, je ne sais pas si j’écrirai toujours dans le futur des choses aussi précises. J’imagine d’ailleurs que celles que j’ai écrites récemment le sont un peu moins. Est-ce qu’il ne faut pas à un moment donné s’affranchir de cette rigueur de l’écriture et se laisser aller à plus de liberté au moment du tournage ? Peut-être que je serai amené à plus réfléchir à des choses de ce genre. Mais je pense quand même que le film transite d’abord par une vraie exigence au niveau de l’écriture. »

Vous dites que ce film est né d’une révolte. Pourriez-vous détailler en quoi il est né d’une révolte et en quoi c’est lié à l’histoire de L’enfance du mal ?

'L'enfance du mal'
« L’être humain est un être infiniment complexe, avec ses zones de lumière et ses zones d’ombre. Je trouve un peu scandaleux que beaucoup de gens, des gens connus, qu’on voit régulièrement, politiques ou autres, s’achètent une moralité à très bon compte, en stigmatisant l’autre, en disant : ‘voyez ce déviant, il ne faut le laisser, car il a dévié, nous sommes du bon côté, et lui du mauvais’. La lecture que moi je fais de l’être humain c’est que c’est un être infiniment complexe. Il y a une pertinence à faire face à ses zones d’ombre si on ne veut pas y plonger un jour, si on veut les gérer, avec bon entendement, avec intelligence. »

C’est l’actualité qui vous a inspiré ?

'L'enfance du mal'
« Peut-être, à force d’entendre ces affaires de pédophilie qui ont dérapé... Mais ce qui me tient surtout à coeur, c’est que je trouve qu’en France en particulier, il y a une judiciarisation de la société et des problèmes qui m’effraye. Je pense que la loi vient quand la raison a échoué, et qu’il faut continuer à faire appel à la raison. La loi est systématiquement un pis-aller et la judiciarisation de la société n’est pas forcémment un réponse. Je vois comme les politiques démagogiques se saisissent systématiquement du moindre fait divers pour se mettre en avant, pour dire ‘nous nous sommes le bien, il faut enfermer ces gens’. Je ne peux pas accepter ce discours, il me révolte pronfondément. »