Partenariat oriental : un sommet presque pour rien

Le sommet du Partenariat oriental, photo: CTK

Quelles perspectives européennes d’avenir pour l’Azerbaïdjan, la Moldavie, l’Ukraine, la Géorgie, la Biélorussie et l’Arménie ? C’est la question à laquelle les dirigeants des Vingt-sept devaient chercher à répondre lors du sommet du Partenariat oriental qui s’est tenu à Varsovie jeudi et vendredi derniers. Lancé à Prague en 2009 lors de la présidence tchèque de l’Union européenne, ce projet de Partenariat oriental vise au renforcement des relations entre l’UE et ces six Etats post-soviétiques. Mais plus préoccupée pour l’instant par la situation politique en Biélorussie et en Ukraine et par la crise économique dans la zone euro, l’UE n’a proposé aucune perspective concrète à aucun des six pays, tous souvent plus proches d’un régime dictatorial que démocratique.

Le sommet du Partenariat oriental,  photo: CTK
Tout le monde était bien là, comme prévu, sauf la Biélorussie, dont le siège de la délégation à la table des négociations est resté vide pendant deux jours : une absence et un boycott remarqués conséquence des vives critiques formulées par les organisateurs du sommet à l’encontre de la répression de l’opposition par le régime du président Alexandre Loukachenko. Sans surprise, l’UE a donc exclu l’éventualité de toute forme de coopération et de rapprochement avec Minsk sans la libération des opposants politiques.

Outre le conflit sur les droits de l’homme avec la Biélorussie, le sommet du Partenariat oriental a également été assombri par les tensions avec l’Ukraine. Le procès en cours pour abus de pouvoir de l’ex-Première ministre devenue opposante Ioulia Timochenko est pointé du doigt par l’UE, qui voit dans son inculpation une atteinte à la démocratie. Pour beaucoup de responsables européens, ce procès Timochenko très controversé est aussi et d’abord la preuve que l’Ukraine n’est pas encore prête à intégrer l’UE, comme l’explique Karel Svoboda, analyste à l’Institut des études internationales de l’Université Charles à Prague:

Karel Svoboda
« Ce procès confirme tout d’abord la position des grands pays, c’est-à-dire concrètement la France et la Grande-Bretagne notamment, qui ne sont pas très intéressés par le Partenariat oriental. Leur avis est que de toute façon l’Ukraine ne deviendra pas membre de l’UE dans les vingt prochaines années tout simplement parce que les standards exigés ne sont pas respectés et ne le seront pas encore avant longtemps. Et le procès de Timochenko ne fait que confirmer cette vision des choses. »

Au final, donc, le sommet du Partenariat oriental, lancé il y a deux ans entre autres pour promouvoir la démocratie dans les pays de l’Est voisins de l’UE et porté essentiellement par la Pologne, s’est achevé sur un bilan très mitigé. Un constat décevant, mais qui n’a pas surpris la majorité des observateurs à Prague, à l’image de Karel Svoboda :

« Je crois que ce sommet était voué dès le début sinon à l’échec, du moins à n’aboutir à aucun résultat concret. Le problème est que tous les Etats membres ont des dossiers plus urgents que le soutien à des pays de l’ancienne Union soviétique. Ce projet de Partenariat oriental a un sens, mais dans le contexte actuel, il n’y avait aucune chance d’assister à une avancée majeure. »

Karel Schwarzenberg  (à droite) au sommet du Partenariat oriental,  photo: CTK
Si le projet ne suscite qu’un intérêt poli, le ministre tchèque des Affaires étrangères, Karel Schwarzenberg, estime, lui aussi, que c’est toutefois d’abord la situation économique de la zone euro qui constitue la principale raison de l’échec du sommet :

« C’est la période des vaches maigres. Nous savons tous que l’Europe est frappée par une crise économique depuis de longs mois. Les temps sont durs pour tout le monde, et dans ces conditions, personne ne veut s’engager à faire d’autres dépenses. »

Pour l’heure, le Partenariat oriental, qui est aussi une des priorités de la politique étrangère de la République tchèque, va donc rester ce qu’il est depuis le début : une forme de voisinage privilégié avec une ouverture des marchés et divers avantages et collaborations à certaines conditions. C’est une évidence : le sommet de Varsovie, deuxième du genre après Prague en 2009, n’a pas relancé le partenariat entre l’UE et les pays qui la séparent encore de la Russie. L’Europe, qui a la tête plus au sud qu’à l’Est en ces temps de crise, comme ses six pays « partenaires », parmi lesquels aucun ne présente une situation politique et démocratique particulièrement brillante, ont, chacun à leur manière, leur part de responsabilité dans ce surplace.