Pollution : la Tchéquie et huit autres pays réprimandés par Bruxelles
Les représentants des ministères de l’Environnement de neuf pays européens, dont celui de la République tchèque, étaient convoqués mardi à Bruxelles pour une réunion exceptionnelle sur la qualité de l’air. La Commission européenne est mécontente de leur inaction face à la pollution et menace de les traduire en justice si des mesures ne sont pas prises.
60 % de la population tchèque aux prises avec la pollution
Outre la Tchéquie, l'Allemagne, l'Espagne, la France, la Hongrie, l'Italie, la Roumanie, le Royaume-Uni et la Slovaquie sont les Etats membres où les limites maximales autorisées en termes de concentration dans l’air de particules fines et de dioxyde d’azote sont régulièrement dépassées. Avec des conséquences directes sur la santé des citoyens européens, comme l’a rappelé le Maltais Karmenu Vella, le commissaire en charge de l’environnement :« Chaque année, un nombre stupéfiant de vies de nos citoyens sont fauchées en raison de la pollution de l’air. Cela fait des décennies que nous le savons et les seuils de qualité de l’air ont été mis en place depuis au moins aussi longtemps. Et pourtant, aujourd’hui encore, en 2018, 400 000 personnes meurent de façon prématurée chaque année en raison d’une totale incapacité à résoudre le problème. »
Un constat pour le moins alarmant qui vaut donc aussi pour la Tchéquie, ainsi que le note Jiří Koželouh, de l’organisation écologiste Hnutí DUHA :
« En République tchèque, 60 % de la population vit dans des régions où les seuils de santé sont dépassés, principalement justement pour la concentration de particules fines dans l’air. 12 000 personnes décèdent prématurément en raison de la pollution dans le pays. C’est donc un problème sérieux, c’est l’un des plus importants dans le domaine de l’environnement auquel nous faisons face et c’est pour cela qu’il faut le résoudre. »
Dans le viseur : les vieilles chaudières, les centrales à charbon, le transport routier
Le ministère tchèque de l’Environnement estime que d’ici à 2020, les normes européennes devraient être respectées. Dans son communiqué de presse, le cabinet ne semble pas considérer la convocation à Bruxelles comme une remontrance mais comme une « opportunité » de présenter le programme d’action de la Tchéquie.Outre le transport routier et l’activité économique, en particulier la production d’énergie, le chauffage des foyers au charbon est l’un des principaux facteurs de pollution de l’air dans le pays. Prague entend donc poursuivre un programme entamé depuis plusieurs années déjà pour remplacer les vieilles chaudières polluantes par des appareils modernes. L’objectif est de remplacer 80 000 chaudières d’ici à 2022. Pour les organisations écologistes, l’effort est louable mais il doit être accompagné d’autres mesures, par exemple la taxation de l’extraction du charbon. Au niveau énergétique, il y a également des possibilités. Jiří Koželouh :
« Il faut que le gouvernement tchèque profite des toutes nouvelles limites d’émissions polluantes qui ont été décidées au niveau européen pour les centrales thermiques, qui fonctionnent au charbon. Ces limites sont entrées en application mais le gouvernement a actuellement la possibilité de mettre en place des exceptions. Selon nous, il faut renoncer à ces exceptions, surtout pour les grandes centrales thermiques. »
Dix jours pour revoir la copie
D’après le ministère de l’Environnement, une région comme la Moravie-Silésie souffrirait également de la pollution de l’air liée à l’activité industrielle chez le voisin polonais. Il faudrait sur ce point espérer un changement d’attitude du côté de Varsovie.Le gouvernement veut par ailleurs « un effort exceptionnel dans les années à venir » face à la hausse du nombre de véhicules particuliers. Les mesures concrètes restent cependant assez vagues. Aussi, le commissaire européen Karmenu Vella est resté sur sa faim quant aux propositions, pas seulement tchèques, qui lui ont été formulées :
« Il y a eu des suggestions positives, mais je dois dire qu’à première vue, elles ne sont pas suffisamment considérables pour traiter le problème dans son ensemble. Sans des mesures nouvelles et efficaces sur de nombreux aspects, les seuils de qualité de l’air continueront d’être dépassés pour des mois et des années, bien au-delà de 2020. »
L’eurocommissaire a accordé un délai de dix jours aux pays concernés pour améliorer leurs propositions. « La qualité de l’air reste notre plus grande priorité », a de son côté déclaré le ministre adjoint de l’Environnement, Vladislav Smrž. Le gouvernement en démission a l’occasion de le démontrer d’ici à la fin de la semaine prochaine.