Pour parer à l’afflux de malades, la Tchéquie veut mobiliser des structures d’accueil alternatives

Photo: ČTK/Ondřej Deml

Alors que la République tchèque est désormais le quatrième pays le plus touché au monde par le Covid-19, selon les données compilées par le New York Times, et qu’elle est le premier pays d’Europe en termes de circulation du virus, les autorités tchèques viennent d’annoncer la mobilisation de structures alternatives aux hôpitaux pour accueillir l’afflux de malades qui s’annonce.

« Les chiffres sont catastrophiques, » a concédé le Premier ministre tchèque Andrej Babiš, jeudi matin, avant de s’envoler pour le conseil européen de ces jeudi et vendredi consacré, entre autres, au climat. Venant de la bouche du chef du gouvernement qui est accusé par l’opposition de ne pas avoir anticipé la deuxième vague frappant durement le pays, cet aveu a de quoi inquiéter alors même que le ministre de la Santé Roman Prymula a affirmé mercredi que le système hospitalier était « au bord de l’effondrement ».

Jan Hamáček et Andrej Babiš,  photo: ČTK/Ondřej Deml

Alors que depuis plusieurs semaines, les mesures sanitaires n’ont cessé d’être renforcées, entre le rétablissement de l’état d’urgence, la fermeture des écoles, des bars et restaurants, la limitation des rassemblements, c’est entre autres de mobilisation de gymnases et de stades, ou de mise à contribution des stations thermales du pays, qu’il est question à désormais très court terme. Le gouvernement a également annoncé qu’il allait faire l’acquisition de 4 000 nouveaux lits d’hôpitaux en prévision de l’arrivée de nouveaux malades. En outre, le Premier ministre a évoqué des discussions avec le Land de Bavière voisin, dans l’optique d’un éventuel transfert de malades. Mais au final « la Tchéquie doit réussir à gérer la situation toute seule, » a précisé Andrej Babiš.

Parc des expositions à Prague - Letňany,  photo: Archives de PVO Expo Praha,  CC BY-SA 4.0

A Prague, un hôpital de campagne doit être mis en place à l’aérodrome du quartier de Letňany, dans le nord de la capitale, comme le précise le ministre de l’Intérieur, Jan Hamáček (ČSSD) :

« A partir de samedi, l’armée tchèque va construire à Letňany un hôpital de campagne d’une capacité d’accueil de 500 lits. Nous utilisons les bâtiments existants sur le site, des hangars qui sont chauffés. Tout l’équipement sera celui d’un hôpital militaire de campagne habituel. Du côté du personnel, il s’agira d’une base issue des rangs de l’armée, mais aussi des soignants mobilisés dans les hôpitaux. En cas de besoin, tout ce personnel peut être épaulé par les étudiants en médecine. »

Car loin de décroître, la courbe des cas de contamination ne cesse de dangereusement augmenter : mercredi a vu un nouveau triste record avec 9 544 cas positifs de Covid-19 dépistés.  Le nombre de décès est également sur une pente ascendante, et rapide : 1 172 à ce jour, dont 500 personnes sont mortes rien que depuis le début du mois d’octobre.

Photo: ČTK/Jaroslav Ožana

Et le type de foyers d’infection – et de diffusion – principaux n’a par ailleurs rien de réjouissant pour ceux qui espèrent un retour rapide des enfants du niveau primaire, sur les bancs de l’école – un retour actuellement et officiellement prévu pour le 2 novembre. Selon les données de l’Institut des informations et statistiques sanitaires analysées par le site de la Radio tchèque iRozhlas.cz, ce sont les écoliers qui sont les premiers touchés par le coronavirus (18 718 contaminations depuis le mois de mars, soit 16,42 % de tous les cas de Covid-19) et qui sont donc responsables de la transmission du virus dans leurs familles. Les enseignants arrivent en quatrième position (4 483 cas), mais combinés aux cas d’élèves malades, l’école apparaît en effet comme une des sources premières d’infection – une des raisons qui a d’ailleurs décidé de la fermeture totale des écoles (hors maternelles).

Les personnes âgées sont la deuxième catégorie de la population la plus touchée, alors même qu’elles sont aussi la catégorie la plus fragile face au SARS-CoV-2.

Photo : ČTK/Ondřej Deml

Enfin, le personnel médical est tout particulièrement touché, et notamment à Prague, alors même que la capitale tchèque est également un des principaux foyers d’infection du pays et que les capacités d’accueil de ses hôpitaux arrivent à saturation.

Comme l’a résumé le président de la Chambre des médecins, Milan Kubek, « la dynamique est telle que nous sommes dans une situation avec le double de personnes hospitalisées, le double de personnel soignant infecté et le double de personnes décédées. »

Si le gouvernement tchèque s’est pour l’heure refusé à prendre des mesures encore plus drastiques entraînant l’arrêt presque total de l’économie comme au printemps dernier, certains évoquent le côté inéluctable d’un lock-down complet.  En attendant, le ministre de la Santé en a appelé à la responsabilité des citoyens tchèques en les invitant à « [rester] tous à la maison ».