Pour une éducation sexuelle plus ambitieuse dans les écoles tchèques
L’ONG tchèque Konsent (Consentement) a lancé une pétition appelant à une meilleure éducation sexuelle dans les écoles et à formation plus exigeante des enseignants sur un sujet qui ne relève pas seulement de la biologie, mais qui est souvent traité comme tel. Plus de 8 000 personnes ont déjà apposé leur signature.
Oubliez la flamboyante sexologue incarnée par Gillian Anderson et le contraste entre les images un brin suranné de Sex Education et le propos de la série Netflix, ébouriffant de naturel et de franchise. En Tchéquie, l’éducation sexuelle à l’école reste, selon l’association Konsent, d’un classicisme à toute épreuve – si tant est que les enseignants l’abordent tout court, comme le relève Karolína Křízová :
« Il est difficile généraliser, car chaque école aborde la question de manière très différente. Il y a des écoles qui parlent de sexualité et qui propose des cours d’éducation sexuelle très complexe, mais en même temps beaucoup, vraiment beaucoup d’écoles ne l’abordent pas ou ne l’abordent pas de la bonne manière. Mais si on devait généraliser sur la base des données, les écoles tchèques n’enseignent pas vraiment l’éducation sexuelle ou, si elles le font, elles se concentrent uniquement sur l’aspect biologique ou des sujets très factuels, comme la contraception ou la protection contre les MST. Elles n’abordent pas vraiment les sujets qui nécessiteraient plus de discussions ou d’échange d’opinions, car elles ne sont pas aussi sûres d’elles sur ses questions. »
D’après une enquête menée en 2020 par la sexologue Petra Sejbalová et Jana Martincová, auteur de livres d’éducation sexuelle, un tiers des enfants tchèques s’informent sur la sexualité auprès de leurs amis, 29 % sur Internet et 7 % via les films porno. Plus de la moitié des adolescents pensent que le porno est une représentation réaliste de la sexualité. Un constat également fait par les équipes pédagogiques, comme le note Karolína Křížová :
« D’après les recherches menées par l’Union des écoles secondaires, les enfants tchèques apprennent des choses sur la sexualité et les relations amoureuses principalement sur Internet, et auprès de leurs camarades. Les parents et les écoles sont les derniers vers lesquels ils se tournent pour chercher des informations ou en savoir davantage. 47 % des enfants interrogés déclarent n’avoir rien appris sur le sexe et le consentement à l’école, un constat plutôt alarmant. Mais selon cette même étude, ils disent être également intéressés et qu’ils voudraient bien que l’école accorde plus d’attention à ces sujets, ce qui montre bien qu’ils sont ouverts à ces questions. »
Depuis 2016, l’association Konsent propose des ateliers qu’elle organise dans les écoles qui en font la demande. La pétition initiée par l’ONG a été pensée davantage comme une forme de soutien qu’une confrontation. Elle appelle le ministère de l’Education à actualiser les recommandations sur l’éducation sexuelle, à fournir un soutien méthodologique aux enseignants via des formations, des manuels et la création d’un portail méthodologique, et enfin de mettre en place un système de contrôle sur la manière dont l’éducation sexuelle est dispensée dans les écoles tchèques.
« Nous ne disons pas que le ministère de l’Education ne fait rien. Il a publié des recommandations et des normes en 2010, que nous trouvons plutôt bonnes, mais nous pensons qu’elles doivent être actualisées en fonction de l’évolution actuelle, des nouveaux résultats de la recherche et des nouvelles données. Nous souhaitons une mise à jour ces recommandations sur l’éducation sexuelle à l’école et qu’il fournisse un soutien méthodique plus important aux enseignants. »
Des discussions allant dans ce sens ont donc été lancées avec le ministère afin qu’à l’avenir, l’éducation sexuelle dans les écoles ne se limite pas uniquement à des sujets comme la contraception et la prévention des MST.
Pour l’ONG Konsent, l’accent doit être également mis sur les aspects sociaux des relations sexuelles, notamment en termes de prévention des violences sexuelles. Pour les auteurs de cette nouvelle conception pédagogique, si les jeunes savent connaître et faire connaître leurs limites, communiquer leurs besoins, ils seront mieux équipés lorsqu’ils s’engageront dans des relations intimes.