Prague Pride : les communautés LGBT s'approprient la rue
Les organisateurs de la Prague Pride, le festival des minorités sexuelles, ont annoncé que 20 000 personnes avaient participé à la Marche des fiertés, qui a clôturé l’événement samedi. C’est 5 000 de plus que l’an passé. Après seulement trois éditions, le festival semble désormais bien établi et prépare sa version 2014. La manifestation de samedi a permis aux membres des communautés LGBT (lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres), en plus de réclamer de nouveaux droits, de s’approprier un espace public dont ils sont bien souvent exclus.
Certains de ces derniers ont d’ailleurs également utilisé des arguments religieux, s’appropriant les armes de leurs opposants, à l’image de Martin Putna, rendu célèbre malgré lui par le chef de l’État Miloš Zeman qui refusait de le nommer professeur d’université du fait de sa participation à l’édition 2013 de cette Marche des fiertés. On écoute ce théologien gay :
« En tant qu’enseignant et théologien, en tant que chrétien ordinaire, je le dis à tous mes amis et à tous mes opposants : nous sommes tous les fils de Dieu. Tous. Homosexuels comme hétérosexuels. »Selon une récente étude de l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne, la République tchèque appartient aux pays les plus tolérants en Europe vis-à-vis des minorités sexuelles. Pourtant, c’est loin d’être le nirvana : 36% des homosexuels tchèques déclarent avoir été victimes de discriminations ou de harcèlements l’an passé ; ils sont 47% en moyenne en Europe.
Et ce n’est pas un hasard si le thème de l’édition 2013 de la Prague Pride portait sur le « Coming out », dans un pays où seuls 11% des gays et des lesbiennes assument leur homosexualité sur leur lieu de travail. Membre de l’initiative PROUD, la plate-forme pour l’égalité des droits, la reconnaissance et la diversité, Zdeněk Svoboda relative lui aussi la prétendue ouverture de la société tchèque :
« Les Tchèques sont soi-disant tolérants mais sous certaines conditions. Cela signifie que nous vous tolérons si vous n’êtes pas nos voisins, si vous n’êtes pas nos enfants et si vous ne voulez pas avoir d’enfants. Nous vous tolérons si vous ne descendez pas dans les rues et si vous n’êtes pas trop visibles ; alors nous pouvons cocher la case « tolérance » dans des enquêtes. »Avoir des enfants, c’est pourtant le souhait de Petr et Honza, deux Pragois qui ont participé à la Marche des fiertés afin que de nouveaux droits soient ouverts aux couples de même sexe. On les écoute :
« Nous voulons avoir notre propre enfant. Nous voulons montrer que nous pouvons être d’aussi bons parents que des parents hétérosexuels. Cela fait cinq ans que nous sommes ensemble. Nous sommes en partenariat enregistré depuis trois ans. Nous aurions aimé pouvoir nous marier normalement, malheureusement ce n’est pas possible pour le moment. Nous voulons tout simplement élever un enfant. »
Les deux hommes restent cependant confiants et espèrent que les choses vont évoluer comme cela a pu être le cas cette année en France ou en Grande-Bretagne avec le mariage gay. Petr et Honza font partie des 1 585 couples homosexuels à avoir profité de cette union du partenariat enregistré, entrée en vigueur voici sept ans. Il leur est cependant interdit d’adopter. Aussi, dans un couple de même sexe, seul le parent biologique a des droits sur son enfant.L’un des organisateurs de la Prague Pride, Czeslaw Walek, se félicite de l’intérêt suscité par ce festival, qui, outre une Marche des fiertés, propose débats, expositions ou encore concerts, et donne déjà rendez-vous l’année prochaine pour la quatrième édition d’un événement désormais inscrit dans le paysage pragois.