Comme un peu partout en Europe et dans le reste du monde, les journaux tchèques consacrent une part non négligeable de leurs pages internationales aux retombées des élections présidentielles en France. Petit tour d'horizon des opinions dominantes avec Guillaume Narguet.
La poignée de main du souriant Jacques Chirac à un Lionel Jospin venu lui apporter, les yeux baissés et visage barré du rictus du vaincu, sa démission, fait figure de symbole pour les principaux quotidiens tchèques. La photo du nouveau Premier ministre Jean-Pierre Raffarin ne manque pas non plus à l'appel, se retrouvant même en première page de Pravo. Pour l'ensemble de la presse, celui chargé de gouverner la France jusqu'aux prochaines élections législatives de juin n'était jusqu'à aujourd'hui qu'un inconnu notoire. Pourtant, tous notent l'importance et la pertinence de ce choix, celui d'un homme du terroir qui, à la différence des loups rôdant dans les salons parisiens, semble rester proche de la réalité et du quotidien des Français. Selon Lidove Noviny, conscient du terrain marécageux qui l'attend, Raffarin est un homme politique certes discret, mais qui possède une vision emplie de pragmatisme et n'hésite pas à mettre en avant le caractère traditionnellement multiculturel de la France. En se montrant convaincu que l'avenir du pays dépend aussi de sa capacité à se montrer sous un jour attirant pour les candidats à l'immigration en France, il répond à la crainte publiée dans Mlada Fronta. Le journal craint que la participation de Jean-Marie Le Pen au second tour des présidentielles puisse causer du tort à l'élargissement de l'Union européenne et, par-là même, à l'entrée de la République tchèque dans celle-ci. Tout simplement parce que Jacques Chirac ferait dorénavant passer, sous la pression et l'influence d'un électorat craignant pour son avenir à l'intérieur même de ses frontières, les intérêts propres nationaux avant la question européenne. Or, note-t-on dans le même article, la France est avec l'Allemagne le moteur de l'intégration européenne.
Sans doute posé avec plus de recul est le regard de Petr Pithart, président du Sénat tchèque, qui, dans un éditorial intitulé "Devenir Français" et publié dans Lidove Noviny, n'oublie pas, entre autres idées développées, que ce qui "fait" l'Europe est un destin commun à tous ses membres. Ainsi, même si la Tchéquie n'a jamais eu, comme la France, de colonies et, de ce fait, n'a que très peu d'immigrés, il met en garde devant l'éventualité d'élections identiques à celles que vient de connaître la France.