Regard d'un ex-otage tchèque en Irak sur le sort de C. Chesnot, G. Malbrunot et leur chauffeur syrien

Christian Chesnot et Georges Malbrunot (Photo : www.rfi.fr)

Christian Chesnot, Georges Malbrunot et leur chauffeur syrien ont été pris en otage sur le sol irakien depuis maintenant plus de deux mois. En avril dernier, ce sont des journalistes tchèques qui avaient été les victimes d'un groupe armé qui les avait séquéstrés pendant plusieurs jours. Parmi eux, notre confrère de la radio tchèque, Vit Pohanka, qui nous a donné son sentiment sur la situation et les tentatives entreprises en vue d'obtenir leur libération.

Petr Klima,  Michal Kubal et Vit Pohanka  (Photo : CTK)
Vit Pohanka a d'abord accepté de répondre en français, puis a poursuivi en tchèque.

« Je pense très fréquemment à mes deux confrères français. Principalement pour une raison personnelle, parce que leur situation actuelle est celle dont nous avions le plus peur, lorsque nous avons été enlevés au printemps dernier. Alors que la mort nous menaçait à chaque instant, j'ai réellement pensé que les Irakiens allaient nous retenir pendant des mois et que personne ne saura informé sur notre sort. Je pense à nos deux collègues français mais aussi et surtout à leurs familles, pour lesquelles cela doit vraiment être un enfer. »

Retenus par un groupe se faisant appelé « l'armée islamique en Irak », qui réclamait l'abrogation de la loi sur la laïcité en France, les journalistes français sont apparemment toujours dans la région de Fallouja, là-même ou leurs confrères tchèques, Michal Kubal, Petr Klima, et Vit Pohanka étaient restés une semaine en captivité. Vit Pohanka :

Vit Pohanka
« Personnellement, quand je pense à Christian Chesnot Et Georges Malbrunot, il suffit que je lise quelque chose sur leur situation pour ressentir même physiquement un certain malaise. »

« Ils sont peut être retenus seulement dans le but, pour les ravisseurs, d'avoir l'occasion d'exercer une pression et peut-être même dans le but de se faire de l'argent. C'est doublement injuste dans leur cas. Une prise d'otage est toujours répugnante, mais dans ce cas précis Christian Chesnot et George Malbrunnot sont de nationalité française, et nous savons - les Irakiens aussi le savent - quelle a été la position de la France contre l'invasion de l'Irak. »

Une petite centaine de policiers militaires tchèques est basée dans le sud de l'Irak. Un contingent qui était déjà stationné dans la région de Bassorah lorsque les journalistes tchèques ont été enlevés, ce que leurs ravisseurs ignoraient. Pour Vit Pohanka, le fait que Christian Chesnot et George Malbrunot soient de nationalité française est sans aucun doute un facteur positif.

« Je pense que cela joue certainement en leur faveur. Dans notre cas, malgré le fait que nos ravisseurs connaissaient vaguement la Tchécoslovaquie - et pas la République tchèque -, ils ignoraient la présence des policiers militaires tchèques sur le sol irakien. Evidemment, nous ne les avons pas informé de leur existence. Heureusement, nos policiers étaient stationnés dans le sud près de Bassorah, et nous étions, comme nos collègues français apparemment, près de Fallouja. Je crois que s'ils n'étaient pas Français, leur sort aurait déjà été celui subi par les derniers otages assassinés, comme le dernier otage britannique. »

Après les dernières polémiques autour des tentatives de « médiation parallèle » pour obtenir la libération des otages, beaucoup de voix, en France et à l'étranger, se sont élevées contre ceux qui essaient de jouer les héros sans résultats probants. A Prague, on avait beaucoup parlé du rôle du ministre irakien de la Culure dans la libération des otages tchèques. Mufid Jazaïri, communiste et très attaché à la République tchèque où il a vécu de nombreuses années, avait affirmé être entré en contact avec les ravisseurs...

« J'en ai parlé moi aussi avec Mufid Jazaïri lors de sa denière visite à Prague. Je dois dire que je reste sceptique sur les déclarations de personnes qui ont affirmé être en contact avec des intermédiaires qui étaient plus ou moins en relation avec les ravisseurs de Christian Chesnot et Georges Malbrunot.

Je ne veux pas minimiser les efforts des responsables tchèques dans notre cas et ce qu'a essayé de faire Mufid Jazaïri en tant que ministre irakien de la Culture ayant des liens particuliers avec la République tchèque. Je ne veux pas non plus minimiser les efforts des reponsables français dans cette affaire, mais je remarque que des nombreuses déclarations optimistes faites sur les otages français, aucune ne s'est concrétisée dans les faits.

Quand j'ai lu après notre libération ce qui avait été écrit, qui avait dit quoi sur notre situation et qui affirmait être entré en contact avec tel groupe, j'ai vraiment été surpris. Nous-même, nous n'avions acune information et jusqu'à aujourd'hui la seule raison probable qui explique notre libération reste la décision des ravisseurs eux-mêmes. »

Vit Pohanka veut rester optimiste. D'après sa propre expérience, le fait que les otages français et leur chauffeur syrien Mohamed Al Jundi soient encore ensemble est un facteur important, pour leur moral en tous cas.

« Si Christian Chesnot, Georges Malbrunot et leur chauffeur syrien sont encore ensemble, cela ne peut que les aider, même si c'est difficile à dire de loin. Dans notre situation, cela a vraiment été un facteur positif d'avoir pu rester tous les trois. De pouvoir communiquer ensemble, même si nous avions les yeux bandés, c'est vraiment quelque chose d'important dans ces circonstances. Je pense que c'est les cas des Français, mais chacun vit différemment une telle expérience et même dans notre cas, nous ne l'avons pas vécu de la même manière. »