Same Same : un duo dansant tchéco-belge
Les 13 et 14 février, rendez-vous au 140 à Bruxelles pour la toute dernière création de la chorégraphe franco-belge Karine Ponties. « Same Same » est un projet réalisé en collaboration avec deux artistes tchèques, la danseuse Tereza Ondrová et la metteuse en scène Petra Tejnerová. Avant d’évoquer la naissance de ce projet tchéco-belge, Karine Ponties est revenue au micro de Radio Prague sur les liens de longue date qu’elle entretient avec la République tchèque :
« Cela fait vingt ans que je viens à Prague. J’y ai enseigné, joué etc. Il y a longtemps, Tereza Ondrová avait fait un atelier avec moi. Elle a suivi nombre de mes projets. En 2016, la dernière fois qu’on y était allé, elle a vu une de mes pièces et un atelier de trois semaines que j’avais organisé en Slovaquie : elle a décidé de m’écrire, en me disant que je serai la personne idéale pour réaliser un duo improbable avec Petra Tejnerová, qui n’a jamais mis un pied sur un plateau ! Elles avaient donc cette envie de se rencontrer sur scène mais ne savaient pas comment commencer. L’une est en effet une bombe physiquement et danse très bien alors que l’autre, Petra, qui a d’énormes qualités de mise en scène, n’a pas de pratique de plateau. »
Quel est le thème de ce projet chorégraphique ?
« Le propos, ce sont deux filles, deux drôles d’oiseaux qui bougent bizarrement. Il a fallu trouver un langage commun dans lequel viennent se glisser plusieurs références. Elles voulaient quelque chose d’humoristique. En cherchant, j’ai fini par choisir le thème de l’absurdité du monde du travail. Mais dedans il y a aussi la ressemblance et la dissemblance, la domination et la soumission, la superficialité et la profondeur. Et il y a aussi ce double ironique, le sosie, puisqu’elles s’appellent Same Same dans la pièce, bien qu’elles ne soient absolument pas pareilles. Dans cette absurdité du travail, je me suis intéressée à ce qu’on appelle le ‘brown out’. On connaît le ‘burn out’ évidemment. Le ‘brown out’, c’est une espèce de panne d’électricité qu’on les employés quand leurs tâches deviennent absurdes et qu’ils ne comprennent pas l’utilité de leur travail. »Puisqu’on parle de travail, comment avez-vous procédé avec Tereza Ondrová et Petra Tejnerová ? Comment avez-vous créé à trois ce projet ?
« Ça a été très difficile au départ car j’essayais de comprendre comment elles pouvaient bouger ensemble. Il fallait beaucoup travailler avec Petra pour comprendre quel était son langage de plateau, lui donner la confiance. Elles sont été géniales parce qu’elles ont été un peu comme des enfants : elles se sont livrées à moi. Etant metteuse en scène, elle aurait pu avoir des commentaires, des remarques, mais en fait elle était totalement engagée. Elle a tout essayé, avec une énorme empathie de la part de Tereza qui l’a beaucoup soutenue. Ça a été grand travail de collaboration et d’écoute. »
Vous le disiez au début de cet entretien, cela fait vingt ans que vous venez en République tchèque – et en Slovaquie. Ayant votre propre expérience de chorégraphe d’un pays occidental, avez-vous senti une différence d’approche de la danse dans ces pays, ou est-ce que cette différence Est-Ouest n’a finalement pas ou plus lieu d’être ?
« Il y a une couleur particulière à l’Est. D’ailleurs je travaille aussi en Russie depuis neuf ans. Il y a vraiment quelque chose de particulier, une sorte d’honnêteté de la physicalité qui n’est pas esthétique mais entière. Je retrouve cela beaucoup dans ces pays de l’est de l’Europe. Il n’y a pas de chichis, c’est assez brut, parfois rude, mais on fonce et les choses sont possibles. C’est quelque chose que j’apprécie beaucoup. En ce qui concerne la Tchéquie, je trouvais qu’il y avait de très, très bons interprètes, mais peu de chorégraphes intéressants. Or, cela a beaucoup bougé. Les gens sont aussi partis à l’étranger, sont revenus, il y a eu beaucoup d’échanges et ça a beaucoup grandi. »