"Trois portes" - un projet par lequel le musée Juif de Prague commémore la Journée de l'holocauste
Le musée Juif de Prague a conçu plusieurs projets pour commémorer le 60e anniversaire de la Journée de l'holocauste, le 27 janvier prochain. L'un d'entre eux s'appelle "Trois portes". Il s'agit d'un monument symbolique qui doit donner une dimension nouvelle à la rue Pinkasova, qui longe la Synagogue du même nom, abritant, depuis 1958, un mémorial des victimes de la Shoah. Dans les murs de cette synagogue sont gravés les noms de 80 000 Juifs tchèques et moraves qui ont péri dans les camps de la mort. Michaela Hajkova, conservatrice du musée, nous en dira plus sur le projet "Trois portes:"
"La rue Pinkasova est l'un des derniers endroits qui peuvent évoquer l'existence de l'ancien ghetto juif à Prague. C'est un lieu qui séparait, autrefois, le ghetto de la Vieille-Ville. Lors de l'assainissement de Prague, au tournant des XIXe - XXe siècles, elle a cessé d'être une grande voie de communication, et est devenue une petite rue entre le cimetière et la synagogue inaperçue pour beaucoup. Une chose qu'il faut souligner, à savoir qu'à la sortie de la rue Pinkasova, dans sa partie sud, il y avait l'une des entrées de l'ancien ghetto. Les trois portes qui doivent remplir cet espace invitent symboliquement à une nouvelle entrée, à une nouvelle réflexion. Pour le professeur Ales Vesely, auteur du monument, la première idée qui lui est venue à l'esprit était celle d'une porte. Porte symbolique par laquelle est également passée, sur le chemin du ghetto de Terezin, sa soeur de 14 ans. Il savait aussi qu'elles devaient être trois, qu'il y a un lien avec la diaspora, le pèlerinage de 2000 ans d'un peuple dispersé, et la recherche éternelle d'un foyer. Les trois portes, en acier et en pierre, sont conçues comme une voie. L'homme qui se retrouve dans ce corridor n'a pas d'autre choix que de passer par les passages étroits qui symbolisent les différents degrés de connaissance. La première porte, avec une pierre accrochée sur un ressort, est une porte du rappel. Elle symbolise l'éternelle incertitude par rapport à notre propre existence. La porte du milieu est pratiquement toute remplie d'un bloc de calcaire, et on
ne peut passer par elle qu'en abaissant la tête et en glissant par un trou étroit. Une grande pierre non taillée pénétrant, d'en haut, au centre de la troisième porte empêche un passage direct : le dilemme se pose, laquelle des deux voies de sorties prendre. Lorsqu'on passe par cette dernière porte, on a devant soi un portillon menant au cimetière juif. L'utilisation de la porte en tant qu'archétype qui va à travers les cultures mondiales, les religions, les systèmes philosophiques, a une valeur symbolique. Symbolique est aussi le lieu où les trois portes sont installées: à la limite d'une rue des vivants et d'une zone des morts, à la limite d'une rue profane et d'une zone sacrale, d'un secteur public et privé. "Trois portes" n'est pas seulement un mémorial de la Shoah, qui se trouve à l'intérieur de la synagogue Pinkas, c'est un lieu qui devrait évoquer l'histoire et l'espoir pour l'avenir ainsi que le présent, c'est un projet environnemental hors du temps."