U dvou koček, une chatte blonde et une chatte brune
Pour la dernière de notre série consacrée à quelques-unes des plus illustres brasseries pragoises, c’est cette semaine U dvou koček – Aux deux chats, que nous vous emmenons. Une autre de ces brasseries traditionnelles de la capitale qui propose elle aussi sa propre bière. Reportage.
Dans l’imaginaire de beaucoup de Tchèques, U dvou koček, c’est d’abord un film : Vrchní, prchni!, légendaire comédie du début des années 1980 dans laquelle un libraire pragois sans le sou se fait passer pour un garçon de café et encaisse les additions de certains clients. Et parmi les établissements du centre de la capitale dans lesquels le héros du film sévit figure le restaurant U dvou koček. Mais pourquoi « aux deux chats », c’est ce qu’explique, paradoxalement sans bien le savoir lui-même, Roman Pohanka, responsable des lieux :
« Tout ce que nous savons, c’est que le nom de la maison, qui est très ancienne puisque son histoire remonte au XIIIe siècle, a changé autour de 1920 pour devenir ‘U dvou koček’. Est-ce parce qu’il y avait des chats ? Est-ce que la propriétaire en élevait ? La vérité est que personne n’en sait rien. Et quand le restaurant a été ouvert, le nom est logiquement resté puisque l’inscription figurait sur la façade. Du coup, ces deux chats en sont devenus le symbole, notamment dans les années 60-70 quand U dvou koček est devenu un établissement réputé pour la qualité de sa bière de Plzeň. Cela est resté une tradition jusqu’à aujourd’hui. »
Comme dans la majorité des restaurants et auberges traditionnels situés dans les proches alentours, c’est de la Pilsner Urquell qui est traditionnellement servie U dvou koček. Autrement dit, pas du pipi de chat, et ce d’autant moins qu’ici aussi on brasse sa propre bière, singularité que souligne Roman Pohanka :
« Pendant longtemps, rien ne nous différenciait véritablement des autres auberges du centre de Prague. Mais aujourd’hui, ces auberges-là sont moins nombreuses qu’autrefois, entre autres raisons parce qu’il y a de moins de moins de Pragois de souche qui habitent et vivent dans le centre-ville. Ils ont laissé la place aux entreprises et aux touristes. Du coup, nous n’avons plus la même clientèle qu’autrefois. Les piliers de comptoir ne sont plus très nombreux. Aujourd’hui, quand vous venez le soir, les touristes constituent 70% de la clientèle et ils viennent dans ces auberges traditionnelles non plus pour boire de la bière comme les Tchèques, mais essentiellement pour manger. »
« Depuis quelques années de cela, nous proposons aussi notre propre bière, qui complète la Pilsner. Nous avons ouvert une microbrasserie du même nom que l’établissement et produisons deux lagers, que nous appelons la chatte blonde et la chatte brune. A ce que je sache, nous sommes les seuls dans ce cas avec la brasserie U Medvídků proche d’ici. C’est donc ce qui nous distingue aujourd’hui des autres : nous sommes une bière d’une grande brasserie et une bière maison. »
Une bière de la brasserie U dvou koček maison 100% tchèque, comme tient à le préciser Roman Pohanka, tout en étant bien conscient que les goûts des clients étrangers de plus en plus nombreux ne sont pas toujours ceux des Tchèques, fin connaisseurs du breuvage très exigeants sur la qualité de leur boisson nationale :
« La principale différence avec la Plzeň est que la nôtre est une bière vivante qui n’est ni filtrée ni pasteurisée, comme cela est le cas de la production de beaucoup de petites brasseries, même si cela demande plus de travail. Mais cela répond à la demande des gens. La brune nous a permis de remplacer la Velkopopovický Kozel. Ce sont surtout les touristes qui consomment de la brune, les Russes notamment. Dans tous les cas, nous utilisons les meilleurs ingrédients tchèques, qu’il s’agisse du houblon ou du malt. La teneur en alcool de notre bière est un peu plus importante que celle de Plzeň. Mais c’est bien d’avoir les deux. Les gens apprécient la Pilsner parce que c’est une bière relativement légère avec un goût amère très marqué. Il n’y en a pas deux comme elle, et c’est ce qui explique qu’elle reste si populaire. »
Populaire comme l’établissement, situé à deux pas de la place Venceslas, qui reste un lieu de passage obligatoire aussi pour les touristes tchèques qui rêveraient presque de se faire arnaquer, comme autrefois dans le film, par un faux garçon de café…
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