Un court-métrage tchèque au cœur d’une famille d’origine vietnamienne en lice pour les oscars
Le court métrage d'animation Love, Dad de Diana Cam Van Nguyen a remporté plusieurs prix internationaux et s'est récemment qualifié pour les Academy Awards 2023. Ce film de fin d'études de la FAMU est centré sur la relation trouble entre la réalisatrice tchéco-vietnamienne et son père et s'articule autour de lettres que les deux s'échangeaient lorsqu'elle était adolescente et qu'il était en prison. A à peine 28 ans, Diana Cam Van Nguyen, n’en est pas à son coup d’essai.
Emigré en Tchéquie, le père vietnamien de la réalisatrice a été emprisonné il y a un peu plus d’une quinzaine d’années.
Diana Cam Van Nguyen : « Il avait sa propre marque de tabac et vers l’année 2004 il n'a pas appliqué la taxe appropriée. Mais cette année-là c'était encore un peu comme dans les années 90 en République tchèque et il y avait un vide juridique dans la loi tchèque en fait, donc il était en quelque sorte possible de le faire. Mais il a été en prison pendant un an. Ensuite ils l'ont laissé sortir parce qu'ils n'avaient pas assez de preuves. »
Le film de 12 minutes est composé notamment des lettres et enveloppes que la réalisatrice échangeait avec son père.
« C'est la seule chose qui soit vraiment vraie et authentique dans le film, je veux dire du point de vue visuel. Je savais que je voulais utiliser ces lettres. Donc oui, elles sont authentiques et elles soont en tchèque. »
« Je suis de la deuxième génération. Je suis vietnamienne, je peux parler vietnamien, mais je ne sais ni l'écrire ni le lire. C'est pourquoi mon père devait m’écrire en tchèque. Il peut parler tchèque, mais il a aussi beaucoup appris en prison. C’est bien qu'il ait pu communiquer avec moi de cette façon. »
Le film a remporté le Grand Prix du Jury à l'AFI Fest, qui est un festival qualificatif pour les Oscars dans la catégorie des courts métrages :
« Cela signifie que je suis sur la longue liste, ce qui représente environ 80 à 90 courts métrages chaque année. À partir de cette longue liste, il y aura une liste courte de 15 ou 20 films. Donc maintenant, c'est comme si nous avions une chance, mais ça ne veut pas encore dire grand-chose [rires]. »
Le film a pour l'instant très bien marché. Il a été présenté dans plus d’une vingtaine de festivals internationaux et a remporté de nombreux prix :
« Je pense que la technique est vraiment spéciale. Les films utilisant cette technique sont rares - ou en tous cas je n'ai rien vu de tel. Alors c’est peut-être ça. Aussi, la technique fonctionne vraiment avec le sujet. Je pense que c'est une bonne combinaison. »
« Mais il y a eu beaucoup de courts métrages d'animation réussis ces dernières années. Et je ne suis pas une débutante si je peux le dire comme ça, parce que mon précédent film a aussi eu un peu de succès. Pas tant que ça, mais c'est quand même plus facile pour moi d'entrer dans ces festivals, parce que certains me connaissent déjà. »
« Aussi, nous avons une distribution professionnelle maintenant. Nous avons une distribution française, ce qui est nouveau, avec la société Miyu. »
« Même si elle est très personnelle et qu'elle porte essentiellement sur les cultures tchèque et vietnamienne, le monde entier peut d'une certaine manière comprendre cette histoire, car il y a davantage de problèmes de minorités dans le monde entier. »
Quelle a été la réaction du père de la réalisatrice après avoir vu ce film ? Réponse de Diana Cam Van Nguyen :
« Oui, mon père l'a vu. Je savais depuis le début qu'il devait le voir avant tout le monde, avant qu'il y ait des projections. J'étais vraiment préparée à cela, mais au cours de l'année, lorsque que nous avons commencé la production, j'étais de plus en plus nerveuse et je faisais de plus en plus attention à ses sentiments. Parfois, mes décisions étaient un peu difficiles à prendre. »
« Je lui ai montré le film quand nous l'avons terminé. C'était un peu étrange parce qu'il m'a demandé des choses plus pratiques sur le film, pas sur le sujet. Il demandait combien le film avait coûté, où j'avais trouvé les acteurs… J’ai dû le pousser, lui poser la question plus personnelle de savoir si cela ne le dérangeait pas que je rende public un sujet aussi personnel sur notre famille. Il était d'accord avec cela. Il m'a dit que, de mon point de vue, je disais la vérité, ce qui était en fait plus que ce à quoi je m'attendais. Mais je pense que nous ne reviendrons plus jamais sur ce sujet. Je suis très heureuse qu'il connaisse mes sentiments, et c'est suffisant pour moi. »