Une écolière ukrainienne victime de harcèlement : un incident loin d'être isolé en Tchéquie
Ce samedi, le président Petr Pavel a reçu, au Château de Prague, l’écolière ukrainienne récemment victime de harcèlement de la part d’enfants tchèques. Selon l’ONG In IUSTITIA, qui se consacre à la prévention des actes de violence fondée sur les préjugés, il ne s’agit pas d’un incident marginal.
La vidéo qui circule depuis début juin sur les réseaux sociaux montre la petite fille de 7 ans se faisant cracher au visage après avoir dit qu’elle venait d’Ukraine à des garçons l’entourant et vantant la force de la Russie. L’incident a eu lieu lors d’une excursion organisée par une école primaire de Bohême de l’Est.
« Je condamne le harcèlement, l'humiliation et la violence dans les écoles en général. Et dans le cas d'une enfant qui a dû quitter son pays et ses amis à cause de la guerre, et à qui nous avons offert un refuge en sécurité, c'est particulièrement honteux », a indiqué sur Twitter le chef de l’Etat tchèque Petr Pavel, après avoir rencontré la petite fille ukrainienne. Le président s’est par ailleurs félicité de la réaction de l’école et des parents des élèves impliqués qui se sont excusés.
Le ministre de l’Education Mikuláš Bek a exprimé, lui aussi, son indignation, incitant les enseignants à s’opposer vigoureusement à toute forme de harcèlement dans leurs classes. « Cracher au visage d’un enfant, c’est cracher au visage de toute notre civilisation », a déclaré, pour sa part, le ministre de l’Intérieur Vít Rakušan.
Hormis cet incident, les condamnations publiques du comportement haineux vis-à-vis des réfugiés ukrainiens sont plutôt rares en Tchéquie. D’après la juriste Petra Naskosová de l’organisation In IUSTITIA, ceci contribue au fait que les agressions de ce type connaissent une recrudescence dans le pays :
« Malheureusement, le cas de cette enfant ukrainienne harcelée par ses camarades de classe n’est pas isolé. Au sein de notre organisation, nous constatons une augmentation considérable de la violence, tant verbale que physique, à l’encontre des réfugiés de guerre ukrainiens, que ce soient des adultes ou des enfants. Les réfugiés ukrainiens représentent environ 20 % des cas dont nous nous occupons, ce qui signifie qu'ils sont le deuxième groupe le plus à risque Tchéquie, en ce qui concerne la violence fondée sur les préjugés, après les personnes LGBT. »
« La situation s’aggrave, notamment dans certaines régions du pays, parce que nous n’entendons pas de condamnation ferme des attaques qui se produisent ici, et aussi à cause de la montée de la désinformation. »
Toujours est-il que la République tchèque a accueilli, depuis le début de l’invasion russe de l’Ukraine, plus de 300 000 réfugiés, principalement des femmes avec enfants. Ces derniers sont environ 70 000 à fréquenter les établissements scolaires tchèques.
Les autorités, les institutions ainsi que de nombreuses ONG tchèques apportent une aide de longue durée à l’Ukraine. Récemment, un « arbre de vœux et de prières » a été installé sur la place Václav Havel à Prague. Il s’agit de l’un des multiples projets réalisés par Caritas République tchèque et l’Ecole supérieure des arts et métiers (UMPRUM) de Prague. On écoute Dominik Lang, un des artistes qui ont participé à la création de cette œuvre avec des étudiants :
« Au début de la guerre, les étudiants de notre école ont ouvert une garderie provisoire destinée aux enfants réfugiés ukrainiens. Ils gardaient les enfants pour permettre à leurs mères de s’occuper de leurs affaires et surtout de trouver du travail. Au bout de quelques semaines ou mois, Caritas a repris ce jardin d’enfants et a continué à le gérer. (…) C’est aussi cette ONG qui a eu l’idée de cette installation, créée à partir d’un vieux tronc d’arbre. Dans ses trous et fentes, les passants peuvent mettre des bouts de papier avec leurs messages et vœux, qu’ils soient liés à l’Ukraine ou non. »
« L’arbre de vœux et de prières » sera installé à Prague jusqu’au 18 juin. Ensuite, il sera déplacé dans la région de Transcarpatie, dans l’ouest de l’Ukraine, dans une petite ville construite par Caritas République tchèque avec des maisons modulaires où sont logés temporairement les réfugiés des autres régions du pays.